Développement de l'enfant

Comment faire perdre l’habitude du pouce à un enfant, alors qu’il n’en a absolument pas envie ? La tétine a l’avantage de pouvoir être rendue à saint Nicolas ou à la petite souris... mais votre enfant ne peut pas être amputé de son doigt ! Mission impossible, alors ?
Il a la taille, la rondeur et la douceur parfaite pour une bouche et s’enfourne comme une sucette à la fraise, sauf que le plaisir du pouce vient bien avant les plaisirs sucrés. Et pour cause, la succion est un réflexe qui apparaît avant même la naissance. Nombreux sont les fœtus qui sucent déjà leur pouce dans le ventre de leur maman.
Pourquoi, dès lors, vouloir à tout prix venir à bout de cette habitude naturelle et tant appréciée par nos petits bouts ? Eux qui ne demandent qu’une chose, pouvoir se rassurer en mordillant doucement le doigt qui semble avoir été « inventé pour ça » ? Pour la dentition, pardi ! Le risque, bien entendu, est que votre chérubin ait très rapidement les dents qui poussent vers l’avant, un tableau fort peu esthétique.
Et au-delà de l’aspect « dents de cheval » qui vous coûtera les yeux de la tête en appareil dentaire, cette déformation peut poser des problèmes de prononciation au moment de l’acquisition du langage. Ouille, c’est nettement plus embêtant !
Les orthodontistes préconisent d’ailleurs de faire perdre cette habitude dès l’âge de 2-3 ans. Prématuré ? Tout dépend de la manière dont les parents s’y prendront. Sachez juste que l’impact sur les dents sera moins grand si le sevrage a lieu avant la percée définitive, soit vers l’âge de 5 ans.
Y aller en douceur !
Heureusement, la plupart des enfants réduisent naturellement l’habitude du pouce entre 2 et 4 ans, émerveillés par ce qui les entoure et parfois convaincus par les commentaires de leur entourage. Mais ce n’est pas toujours le cas et il faut veiller à rester positif pour accompagner en douceur votre enfant vers le sevrage.
« Je me souviens que ma mère m’avait d’abord mis un vernis amer sur les ongles des deux pouces, mais je l’avais gratté avec mes dents, se souvient Julie. Elle a alors décidé de glisser mes mains dans des gants de toilette attachés aux poignets. Elle leur avait donné des petits noms Lolec et Bolec, sans doute pour faire mieux passer la pilule, mais j’avoue que j’en garde un très mauvais souvenir. Je me souviens très bien de la détresse que j’ai ressentie à ce moment-là. »
Myriam, quant à elle, se souvient avec regret des punitions infligées quand elle prenait encore son pouce vers l’âge de 6 ans. « Je glissais une peluche de ma couverture Sole Mio dans le creux de mon pouce pour m’endormir... C’était doux et ça sentait bon, mais le lendemain la punition était canon. »
Ces témoignages attestent des traces que la privation brutale peut laisser. Alors, que faire ? Il faut savoir que l’enfant suce son pouce pour se rassurer et pour décompresser. Faire pression sur lui pour arrêter sera dans le meilleur des cas contreproductif et même traumatisant dans le pire des cas.
Bannissez donc les phrases dénigrantes du genre « Sucer son pouce, c’est pour les bébés » ou « Tu es ridicule quand tu suces ton pouce ». Choisissez plutôt la voie du renforcement positif, confectionnez un tableau avec des autocollants et collez des gommettes colorées lorsqu’il s’abstient. Pas la peine de mettre des rouges qui sanctionnent, concentrez-vous sur ses efforts, félicitez-le quand il ne prend pas son pouce chaque fois qu’il en avait l’habitude. Et, surtout, rassurez-le autant que possible par des câlins.
Vous pouvez également solliciter le dentiste en lui demandant d’expliquer à votre bambin les risques qu’il encourt s’il persiste. L’intervention d’un spécialiste peut parfois faire des miracles, aussi bien sur l’enfant que sur les parents. N’oubliez pas que votre enfant est relié à vos émotions et que vous lui transmettrez votre appréhension si vous n’êtes pas convaincu qu’il y parviendra.
Grandir le pouce en bouche
Si la succion a pour fonction primaire de rassurer le petit, elle peut aussi devenir une mauvaise habitude ou un réflexe dans certaines situations. Suce-t-il son pouce lorsqu’il est fatigué, lorsqu’il est stressé, lorsqu’il ne reçoit pas ce qu’il veut ? Peut-être lorsqu’il est dans son siège-auto ou quand il a faim ? Observez ses habitudes et tentez d’identifier les raisons pour lesquelles il porte le pouce à la bouche.
S’il est fatigué, mettez-le directement au lit, sans repousser ses limites. S’il est anxieux, tentez de le rassurer en le prenant dans vos bras, en lui lisant une histoire ou en jouant avec lui. Si le réflexe est lié à certains moments d’inactivité, proposez-lui un doudou que vous lui mettrez dans la main du pouce qu’il suce. Ce ne sera sans doute pas évident et cela prendra un peu de temps, mais l’idéal serait de casser les schémas habituels en occupant ses mains et en le distrayant.
S’il prend son pouce au moment d’aller dormir, proposez-lui à nouveau le doudou qui fera office de substitut et avec lequel il pourra se rassurer. Laissez-le choisir l’objet, cela passera mieux si l’enfant l’adore. Et si cet objet de transition ne s’avère pas être le pingouin en peluche que vous lui avez choisi avec amour, mais plutôt le haut de votre pyjama qu’il aime piquer dans la salle de bain le matin, qu’à cela ne tienne, Choubidou préfère sans doute à la bonne bouille d’un ours en peluche votre odeur mêlée à celle de la lessive. Ce qui compte finalement, c’est qu’il soit rassuré.
J. R.