
Le 22 mars, la Belgique va commémorer les attentats de Bruxelles. Des cérémonies officielles et des Cercles de silence seront organisés sur les lieux touchés par l’horreur il y a un an. Objectif : rendre un hommage solennel aux victimes, à leurs familles, aux secouristes et aux personnes qui ont aidé là où elles le pouvaient. Être ensemble, oui, mais comment en parler aux enfants ? Écouter et expliquer, c'est ce que préconise la psychologue Mireille Pauluis.
La journée de commémorations permettra de célébrer le refus de la haine, de réaffirmer la foi en l’avenir, de promouvoir la paix, notamment à Brussels Airport, dans la station de métro Maelbeek et Petite Rue de la Loi à Bruxelles. Des plaques commémoratives avec les noms des victimes seront dévoilées, un monument aux victimes, sculpture en inox de l’artiste Jean-Henri Compère, sera installé entre le parc du Cinquantenaire et Schuman et un memorial est prévu dans la forêt de Soignes où seront plantés 32 arbres, pour les 32 victimes des attentats.
Une marche des citoyens représentatifs des différentes communautés de Bruxelles sera organisée par le collectif #TousEnsemble#SamenEen#AllUnited, pour donner un signal fort de d’antiracisme et d’unité. Vous êtes invités à vous munir d’une fleur et à marcher dès 15h depuis plusieurs points de rassemblement vers la Bourse. Les cortèges prendront le départ de la place communale de Molenbeek, de la gare du Nord et de la place du Luxembourg.
Dans le même temps, la chorégraphe Anne Teresa De Keersmaeker, Rosas et P.A.R.T.S. organiseront un « rituel de reconnexion » à BOZAR, qui propose de se rassembler autour d’un programme artistique dédié au souvenir et au recueillement. La grande commémoration citoyenne se déroulera à la Bourse à 16h. Enfin, une soirée d'hommage rediffusée par la RTBF aura lieu au Cirque Royal.
Dans la tête des enfants
Un an après, la douleur reste. Ce n’est plus la sidération, mais à l’évocation des attentats, les émotions remontent : tristesse, colère, peur. Dossiers spéciaux, reportages : ces derniers jours, les médias ont revisité les événements, recoupé les chronologies. À nouveau, les enfants ont été confrontés aux images violentes et crues, les questions fusent et vous vous interrogez : comment en parler sans les angoisser ? Il revient aux parents de rassurer et de protéger rappelle Mireille Pauluis, psychologue.
► Les commémorations
« Un an après, on n’a pas oublié. C’est bien. C’est une valeur à exalter. Il faut que les enfants comprennent qu’il est important de commémorer des événements graves. Que les cérémonies autour de la mémoire, du souvenir, sont un acte de solidarité, de soutien. C’est parce que l’on se souvient que l’on permet à de tels événements de ne plus se reproduire. S’ils sont touchés de près, qu’ils empruntent le métro, par exemple, on peut les accompagner dans un acte qu’ils voudraient poser : allumer une bougie, déposer une fleur, tant que cela reste raisonnable. »
► L’actualité
« Je trouve qu’il y a eu un peu trop d’émissions sur le sujet. La pression émotionnelle peut s’avérer trop forte pour les enfants. Ils sont débordés par les émotions. Il est préférable d’éviter que les jeunes enfants voient des images trop violentes. Certaines chaînes prennent la peine de déconseiller le visionnage de leurs programmes en dessous d’un certain âge : j’encourage les parents à respecter ces indications. Et puis, bannissez les infos en continu : il vaut mieux couper la télé quand les petits sont présents. Pour les ados, leurs téléphones et leurs tablettes les mettent en contact permanent avec les images : demandez-leur ce qu’ils ont vu, décryptez avec eux. »
► Les questions
« Les parents sont parfois embarrassés, ils espèrent éviter que leurs enfants ne souffrent tout simplement en ne parlant pas des choses douloureuses. Or, il faut toujours répondre aux questions. Ce qui protège le plus les petits enfants, c’est que l’adulte contextualise. La fonction parentale, c’est donner un cadre. Faites-les parler de ce qu’ils ressentent, aidez-les à prendre de la distance. »
►La confiance
« Certains se demandent si de tels attentats pourraient se reproduire : avouez que vous ne savez pas, que l’insécurité existe depuis plusieurs années, qu’elle sévit ailleurs. Mais saisissez cette occasion pour confirmer la confiance : nous sommes protégés par les autorités, des gens travaillent à assurer notre sécurité, nous ne sommes pas en guerre. Il ne faut pas mentir, mais on peut rappeler aussi que de tels événements demeurent exceptionnels, même s'ils sont dramatiques. »
► Comment faire ?
« D’abord, écouter les enfants : leur demander ce qu’ils ont entendu, à l’école, chez les amis, à la télé. Dans un deuxième temps, leur demander d’expliquer ce qui pourrait les rassurer. Préciser ensuite avec eux ce dont ils auraient besoin pour se sentir mieux, moins inquiets. Répondre franchement, ne pas leur mentir. »
A. K. et Yves-Marie Villain-Lepage
En bref
- Avant 6 ans : ne pas montrer d’images. Expliquez que ce qui vient de se passer est grave, que vous êtes touché et ému. Il est important de dire que les adultes les protègent et qu’ils sont en sécurité à l’école, à la maison, mais qu’ils doivent faire attention.
- Les 7-11 ans construisent leur pensée critique, leur territoire psychique. N’hésitez pas à les faire parler. Apportez des réponses factuelles. Les échanges avec vous doivent les rassurer. Parlez avec eux, proposez de dessiner ce qu’ils ont enregistré. Expliquez les images, etc. Autant de façons simples de leur permettre d’extérioriser leurs angoisses.
- Côté ados : ce sont les plus exposés via internet et les réseaux sociaux. Vérifiez la façon dont ils s’informent. Encadrez leurs réactions. Exposez votre point de vue de façon simple. Vous devez incarner un soutien stable, solide et les rassurer autant sur la vie à la maison que sur la vie à l’école.
Le choix des mots
- Les mots à éviter : exclusion - racisme (et tous les termes en « isme » !) - lâcheté - méchants /gentils.
- Les mots à utiliser sans modération : respect - savoir vivre ensemble - libre pensée - des jeunes désespérés - espoir... Remettons ces mots à la mode.
- Pas de jugement négatif
- Ouvrir le débat au maximum.
- Condamner ceux qui manipulent les jeunes et leur désespérance.
- Aucune forme d’espoir ne réside dans la mort.
En savoir +
Cercles de silence - We have the choice organise des Cercles à différents endroits à Bruxelles, et unit ses forces avec celles de Silence for Peace, BOZAR et un groupe de citoyens engagés pour créer des opportunités de s'arrêter d'une manière constructive à ce qui s'est passé et à ce qui se passe aujourd'hui, en offrant plusieurs moments de silence, d'approfondissement et de mise en lien. Programme complet : cliquez ici.
Conférence sur la paix, animée par Thomas d'Ansembourg : « La paix, ça s’apprend, comme les maths ou le foot ! » - Comment développer notre intériorité citoyenne pour mettre le meilleur de soi au service de tous et ré-enchanter le monde. Mercredi 19 avril de 20h à 22h30 (ouverture des portes à 19h) - Louvain-la-Neuve, auditoire Socrate.