Harcèlement : tous concernés !

En France, une campagne « Mobilisons-nous contre le harcèlement » a été lancée ce mois-ci à destination des jeunes par le ministère de l’Éducation nationale. Parallèlement, un site extrêmement complet a été dédié à la question du harcèlement.

En Belgique, l’enquête HBSC (Health Behaviour in School-aged Children) de 2010 révèle que, à 15 ans, 15 % des filles et 25 % des garçons ont été harcelés au moins deux fois dans les deux mois qui ont précédé l’enquête. Les chiffres sont presque similaires (13 % et 22 %) en ce qui concerne le fait d’avoir harcelé. On estime à 6 % les cas de harcèlement « sévères ».
Les formes comme les effets du harcèlement peuvent en effet aller très loin. À force de se retrouver raillés, bousculés, humiliés ou même violentés en permanence, des jeunes perdent toute confiance en eux et sombrent dans la dépression. Certains se suicident. Il importe donc de ne pas minimiser le phénomène.

Des éducateurs mal informés

Les adultes (professeurs, direction et parents) ont encore souvent des difficultés à comprendre le phénomène, à le prévenir et à intervenir adéquatement quand il se présente. Repérer des situations de harcèlement n’est pas toujours aisé, d’autant plus que la victime a tendance à se taire par peur des représailles, par honte, par crainte de passer pour une « mauviette », etc.
Lorsque les enfants s’expriment, ils ne sont pas toujours pris au sérieux : les éducateurs sont souvent amenés à penser qu’il s’agit de gamineries ou que l’enfant est plus geignard qu’un autre, que ses parents sont trop protecteurs et qu’il doit apprendre à se défendre. Face au déni de ce qu’il vit, l’enfant va se replier sur lui-même et arrêter de se confier.
Pourtant, c’est bien aux adultes qu’incombent la responsabilité d’éduquer et de protéger les enfants. L’enfant victime de harcèlement n’a pas le pouvoir de faire cesser seul la situation.

Le processus du harcèlement

Le harcèlement peut être psychologique ou physique, ou combiner les deux comportements. Il s’agit d’un comportement dénigrant, intimidant ou violent adopté de manière répétée auprès d’une même personne.
Contrairement à une croyance répandue, il n’y a pas un profil type de harcelé. Un jeune harcelé dans une école ne le sera pas dans une autre, ni dans son club de sport. Une caractéristique physique ou comportementale peut être repérée et devenir le prétexte à du harcèlement dans un groupe et pas dans un autre.
De la même manière, un jeune peut débuter par des taquineries sans importance vis-à-vis d’un autre et, peu à peu, se prendre au jeu et devenir harceleur. Les jeunes harceleurs ne se rendent pas toujours compte de l’ampleur des dégâts qu’ils occasionnent chez le jeune harcelé. Par ailleurs, être harceleur ou témoin passif de harcèlement entraîne également des dégâts psychiques. Ce sont donc tous les jeunes entraînés dans la spirale du harcèlement qui doivent être pris en charge par l’équipe éducative.
Le harcèlement à l’école se produit plus souvent lorsque deux éléments de contexte sont présents : le climat scolaire général dégradé dans l’établissement et les situations de harcèlement mal identifiées par l’équipe éducative.

Le rôle des parents

Il est certain que l’éducation générale que nous donnons à notre enfant joue un rôle dans la confiance qu’il aura en lui, dans sa disposition à demander l’aide dont il a besoin, comme dans le respect qu’il aura pour les autres. Parler du harcèlement avec son enfant de manière générale peut être utile pour qu’il sache que certaines limites ne doivent pas être dépassées vis-à-vis de ses condisciples et qu’il ait des repères si une situation de ce type survenait dans son école.
Si notre enfant est harcelé, certains signes peuvent nous alerter : troubles du sommeil, irritabilité, troubles liés à l’anxiété ou au stress (tels que les maux de ventre ou de l’eczéma), arrêt des invitations de ses camarades, refus soudain d’aller à l’école… Des signes concrets plus visibles aussi : vêtements abîmés de manière récurrente, voire des traces de coups.
Il faut tout d’abord écouter son enfant, ne pas le culpabiliser parce qu’il se serait laissé faire, ne pas minimiser son ressenti. Sur base de ces informations, s’il y a soupçon de harcèlement, il sera nécessaire de rencontrer l’équipe éducative, voire de contacter des professionnels compétents en dehors de l’école. Par contre, les parents de l’enfant harcelé et de l’enfant harceleur font partie du système, il est préférable qu’un médiateur intervienne dans leurs interactions.
Nous pouvons tous nous retrouver un jour dans la peau d’un parent d’enfant harcelé, harceleur ou simplement témoin de harcèlement. Son issue dépendra en partie de notre attitude d’adulte face à cette situation. Si notre enfant se révèle harceleur, il faudra tenter de comprendre ce qui l’a mené dans ce rôle, travailler avec l’équipe éducative pour l’aider à quitter cette position, lui rappeler clairement les règles du vivre ensemble. Les parents d’un enfant harceleur peuvent eux aussi avoir besoin de soutien d’experts externes.



Anne-Marie Dieu, vice-présidente de la Ligue des familles

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