Vie pratique

Le débat des grands-parents : au moment de la séparation des parents, j’ai ramené mes petits-enfants chez moi…

Nous restons les grands-parents quoi qu’il arrive ! Une fois ces choses dites, difficile pour les papys-mamys de voir leurs enfants s’entredéchirer et au milieu de tout ça, les petits-fils, les petites-filles, qui vont tout faire pour rester loyaux à papa comme à maman. Comment soutenir ses petits-enfants tout en gardant sa place ? Car, au moment d’une séparation, d’un divorce, nous avons la double casquette : celle du parent et du grand-parent. Pas toujours très confortable !

Régine, 61 ans
Le père de mes petits-fils a de sérieux problèmes avec l’alcool. Ma fille gérait ça tant bien que mal jusqu’au jour où il est devenu violent. Ils ont décidé de se séparer. J’ai alors voulu mettre à tout prix mes petits-enfants à l’abri et je les ai ramenés chez moi !

Pour  

On veut les protéger !
J’ai eu ce réflexe lors d’une situation semblable. Mon beau-fils, déjà porté sur la bouteille, avait bu, ce soir-là, plus que de raison. Aussitôt, ma petite-fille de 8 ans s’est réfugiée tout contre sa mère, comme un poussin sous l’aile de la poule. Elle était tétanisée. Elle s’exclamait : « Ah non, papa ne va pas de nouveau boire ! ». Comment ne pas vouloir l’éloigner d’une telle scène ?
Christine, 59 ans

Contre

Ne pas s’en mêler
Surtout, ne pas donner de conseils, ne pas prendre parti. Au contraire, prendre sur soi et se taire… au risque de déclencher l’irrémédiable. C’est ce que j’ai fait tout au long de la séparation de ma fille avec son compagnon. Par contre, j’étais pleinement disponible pour recevoir mes petits-fils. Aujourd’hui, ils ont grandi. Je les vois moins, c’est vrai, mais avec les SMS, les mails, Skype et je ne sais quoi encore, on garde le contact et c’est génial !
Vincent, 56 ans

Ni pour - Ni contre

Aux aguets
Ai-je soutenu suffisamment mes petits-enfants à l’époque de la séparation de leurs parents ? Ils avaient 4 et 6 ans et étaient souvent chez moi. Racontaient-ils ce qu’ils vivaient à la maison ? Très peu. L’aîné en parlait plus pour lui-même, en jouant notamment. Le plus jeune faisait de l’herpès. C’était sa manière de communiquer… Moi, j’étais aux aguets, mais ne disait rien parce qu’ils ne me disaient rien. Aurais-je dû provoquer la parole ? Je n’en suis pas sûr…
Johanna, 63 ans

Pour  

Peux pas me taire !
Il n’est pas question d’intervenir comme Régine l’a fait. Mais me taire, c’est impossible aussi. Mon fils est sur le point de rompre avec ma belle-fille pour s’installer avec une nouvelle femme qui, elle-même, a deux enfants. Je suis inquiète, sans doute parce que j’ai vécu cette situation bien avant eux. Et je ne peux m’empêcher de répéter à mon fils que, quoi qu’il fasse, cette situation ne sera confortable ni pour lui, ni pour ma petite-fille. À 6 ans, elle n’aura plus de lieu unique et réconfortant, elle sera transbahutée d’un coin à l’autre et devra composer avec des enfants qu’elle n’a pas choisis. Inutile de vous dire que mon discours est plutôt mal pris…
Françoise, 59 ans

Ni pour - Ni contre

Je les vois moins
Assister, impuissant, à la séparation de ses enfants, c’est toujours un coup dur. Aujourd’hui, ma fille vit seule avec mes deux petits-fils qui n’ont pas 10 ans. Je reconnais que la rupture s’est faite le plus correctement possible, et ma fille et mon beau-fils sont restés parents. Curieusement, nous, les grands-parents, nous restons un peu en rac. Je vois beaucoup moins mes petits-fils puisqu’ils sont une semaine sur deux chez leur papa. Ça me peine.
Ben, 66 ans

Contre

SOS dépannage
Au moment du divorce de ma fille, j’ai craint de devenir la grand-mère de dépannage. J’avais déjà été la grand-mère tampon durant les dernières années de son mariage !
Anne-Marie, 69 ans

Contre

Ne pas rajouter au drame
J’étais déjà présente tous les lundis et jeudis. Lors de la rupture des enfants, je n’ai pas intensifié ma présence de peur de dramatiser davantage les événements. Ça suffisait déjà comme ça.
Véronique, 61 ans

Ni pour - Ni contre

Les liens passent par les chats
Chacun fait comme il peut. Moi, j’ai décidé de ne pas me mêler des affaires de ménage de ma fille, mais je reste attentive. Et quand ma petite-fille vient chez moi, je demande des nouvelles des deux chats que son papa a pu garder parce qu’il a une maison. C’est une manière de parler de son papa et de montrer qu’il n’y a pas de rupture entre moi et lui…
Martine, 58 ans

Contre

Se maîtriser, c’est dur !
S’efforcer de rester neutre ne signifie pas qu’on ne peut pas soutenir notre fils ou notre fille. Ce sont nos petits-enfants qu’on ne doit pas mettre face à un dilemme. Ils n’ont pas à choisir un camp. Quand mon petit-fils chante les louanges de son papa, je mords sur ma chique, je ne démolis pas le personnage, même si, pour moi, ce n’est qu’une brute. Son fils, hélas, le découvrira assez vite tout seul !
Yves, 65 ans

Contre

Je ne suis « que »…
Je ne suis plus que la grand-mère paternelle. J’ai toujours su que la fille se tourne plus naturellement vers sa maman et tout ça est normal. Mais depuis que mon fils a divorcé, je me sens davantage reléguée. Lui-même n’a déjà les petits qu’un week-end sur deux, alors me rajouter encore à tout ce petit monde, ça me semble difficile. Peut-être suis-je trop discrète ? En tous cas, je n’aurais jamais osé faire comme Régine !
Pauline, 64 ans

► Les grands-parents : un refuge où trouver des câlins

Comment être le plus « juste » possible avec ses petits-enfants pris dans le maelström d’une séparation ? Réponse de la psychologue Mireille Pauluis, qui nous conseille de faire appel à notre bon sens.

Ce conflit n’est pas le vôtre

« Il faut tout faire pour ne pas rester coincé dans une fidélité à son propre enfant que l’on aimerait défendre à tout crin, sinon le conflit déborde sur d’autres territoires, observe Mireille Pauluis. En tant que grand-parent, vous gardez la liberté de vos relations et vos petits-enfants restent toujours à la même place. »
Vous vous entendiez bien avec l’autre conjoint ? Vous pouvez sauvegarder cette bonne relation sans endosser les dissensions. D’accord, c’est plus facile à dire qu’à faire : il faudra marcher sur des œufs pour éviter que votre propre enfant ne se sente trahi.

N’ayez pas peur d’en parler avec vos petits-enfants

Les grands-parents ne peuvent pas prendre parti (sauf s’il y a maltraitance !), mais ils peuvent émettre un avis, dire à leurs petits-enfants qu’ils ne sont pas nécessairement d’accord avec tel point de vue ou telle décision pris par les parents.
« On peut discuter de beaucoup de choses avec ses petits-enfants, affirme notre psychologue, pourvu qu’on leur rappelle que, au départ, papa et maman s’aimaient très fort, sinon ils ne seraient pas là ». C’est le moment de puiser dans vos souvenirs, de raconter comment les parents se sont rencontrés, ce qui s’est passé de gai, de chaleureux au moment de leur naissance, etc. Revenir aux bons moments, c’est un moyen de faire en sorte que les défauts du présent ne prennent pas le dessus.

Soyez à l’affût des instants où ils tentent de s’exprimer

Les enfants arrivent rarement franc battant avec les questions les plus délicates. C’est souvent au moment où vous vous y attendez le moins qu’ils disent un mot, une petite phrase, qu’ils lancent comme un ballon d’essai.
« Si vous ne vous en saisissez pas, explique Mireille Pauluis, ils risquent de se refermer comme une petite huître. Les grands-parents doivent donc être attentifs, cueillir ces moments, particulièrement au tout début d’une séparation, quand l’atmosphère est très conflictuelle. » 

Vous êtes un soutien important

Vous êtes l’élément stable, cette deuxième ligne qui vient en soutien au moment où les choses volent en éclats. « Comme l’école, comme les louveteaux… », conclut Mireille Pauluis. Important, quand tout chavire !



M. K.

Vos droits

 Le droit de visite, ça existe

La loi permet aux grands-parents d’obtenir un droit aux relations personnelles pour voir leurs petits-enfants. Normalement, c’est une place reconnue volontairement, modulée par les parents. Ce droit n’est pas automatique et s’apprécie en fonction du critère de l’intérêt de l’enfant. Pour obtenir ce droit, il est possible de s’adresser en direct à un médiateur ou proposer cette solution plus souple à son avocat. La possibilité existe aussi de s’adresser directement à un Espace Rencontre qui est un lieu neutre et sécurisant où les enfants peuvent retrouver leurs grands-parents. (02/742 22 64 pour Bruxelles ; http://socialsante.wallonie.be pour la Wallonie).
Une procédure peut aussi être engagée par une requête devant le tribunal de la jeunesse. Souvent, les juges exigent un bilan familial pour comprendre l’origine de l’éloignement et dans la foulée, le conflit familial éventuel. Ils peuvent ordonner une étude sociale ou/et une expertise médico-psychologique pour examiner la raison du dysfonctionnement de la dynamique familiale. Les personnes devront payer elles-mêmes les frais de cette dernière expertise civile, sauf si elles bénéficient de l’assistance judiciaire.

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