Vie pratique

Le devoir de vacances… malgré la crise

Partir en vacances n’est pas nécessairement beaucoup plus coûteux que d’acheter un écran plasma pour les parents, une tablette numérique pour l’aîné et un smartphone pour le petit. Et c’est souvent un projet bénéfique pour tout votre petit monde qui se retrouve à l’occasion de cette escapade… Pour avoir suffisamment de choix, au risque de vous bousculer un peu (vous êtes à peine sortis des fêtes…), le Ligueur vous invite à explorer déjà les différentes offres du secteur. À vos rêves !

Les politiciens ont depuis longtemps consacré dans les textes « le droit au tourisme ». Les psychologues évoquent « le devoir de vacances » que les parents considèrent à leur tour comme une responsabilité à l’égard de leurs enfants. Les sociologues parlent de « victoire sociale », d’élément structurant de notre société et de libération des corps et des âmes.
Les économistes, eux, observent attentivement les tendances de la première industrie mondiale dont le sens et la santé sont dictés par des êtres humains qui cherchent avant tout à opérer une rupture avec le quotidien. Genre : une plage où le soleil efface le gris et où les rires des enfants couvrent les cris de la crise.

Se vider la tête

L’image peut évidemment se décliner sous différents cieux et différentes formes. Les tendances des consommateurs et leurs moyens, l’imagination des opérateurs, l’ouverture au monde, la multiplicité des moyens de transport, les aspirations des uns et des autres, souvent au sein d’une même famille, inscrivent ce qui était considéré comme un produit de luxe et qui est devenu un besoin sur l’ensemble du globe.
Et, si les difficultés financières incitent évidemment les Belges à la réflexion et à certaines restrictions, elles ne les poussent pas encore à la privation si l’on en croit les premiers chiffres liés aux réservations estivales - étant entendu que l’été, pour le secteur, commence le 1er avril, c’est-à-dire à l’aube des vacances de Pâques.
Pour les observateurs, la crise rend les vacances d’autant plus salutaires pour se changer les idées et des études mesurent que ceux qui sont partis au moins une fois sur l’année sont, pour 30%, davantage satisfaits de leur cadre de vie quotidienne. Les Belges continuent à serrer tous les postes possibles pendant l’année, mais tentent toujours de sauver les fêtes et les vacances.

Le last minute est mort, vive le early booking

Si, cet hiver, la France a obtenu les faveurs des skieurs belges dont les vacances ne correspondaient pas aux périodes de l’Hexagone (100 % de réservation en plus qu’en 2012), Pâques et l’été leur donnent des idées de grand large.
Les croisières cartonnent. Les longs courriers attirent toujours le public (Thaïlande en tête, et les îles jusqu’en Océanie !). Les pays du pourtour méditerranéen au climat politique posé, Espagne, Grèce, Turquie et Maroc, se partagent le gâteau du moyen courrier. Avec, entre les deux, le Sénégal et le Cap-Vert qui continuent à grimper.
Les principaux tour-opérateurs - Jetair et Thomas Cook, qu’on ne peut ne pas citer puisqu’ils font voyager 75 % des Belges dont une majorité de familles - affichent des sourires de satisfaction en assurant que deux fois plus de parents ont, à ce jour, déjà réservé leurs vacances de Pâques et d’été, projetant une augmentation à deux chiffres pour 2013.
De plus en plus proactifs (les comportements des voyageurs fluctuent au gré de l’environnement économique, de l’offre sur Internet, des modes et de la météo), ils ont compris que les vacanciers devenaient très attentistes ces dernières années, raflant littéralement tous les last minutes. Ce qui, finalement, n’arrange personne puisque les organisateurs ne peuvent rien prévoir et donc moins bien négocier les prix et les vacanciers se trouvent devant une offre, certes moins chère mais très limitée en termes de choix d’hébergement, de catégorie de chambres (famille, communicante, single), de services, d’activités et souvent même de destination.
Pour 2013, les brochures étaient donc disponibles dès le mois d’octobre et la communication sur l’avantage des « early bookings » appuyée par de nouveaux avantages. Outre le choix le plus grand, les clients se voient désormais assurés de ne pas payer plus cher que toutes les offres qui pourraient survenir avant leur départ, y compris les last minutes ! Les acomptes ont été revus à la baisse et les primes d’assurance annulation fortement réduites pour rassurer les plus inquiets qui hésitent légitimement à anticiper six mois à l’avance.
De plus, les T.O. traditionnels et les autres, même ceux dits de niche, se sont adaptés aux tendances. Le voyageur prépare son périple à la carte sur Internet - avec le risque, il faut le rappeler, de ne pas être couvert en cas de difficultés, d’annulation ou de non-respect d’un contrat. Le tourisme de découverte et de rencontre est de plus en plus sollicité car « l’autre » semble toujours plus attirant ailleurs.
Le tourisme d’aventure et d’expérience est à la mode pour raconter quelque chose en rentrant. Les achats groupés se multiplient pour économiser, mais attention aux arnaques. Le tourisme solidaire se développe car la crise éveille les consciences. L’exigence écologique et éthique est en hausse. Tout est désormais possible. Même le fameux all-in (la formule tout compris), pour lequel le Belge se montre le plus friand des Européens parce qu’il assure un contrôle total du budget, s’adapte en diversifiant son offre.

La croisière : un all-in à la carte

D’ailleurs, la dernière tendance, liée à une combinaison à la fois économique, sociologique et affective, est la croisière tout compris. En constante augmentation (comme pour les avions, malgré les catastrophes qui frappent pourtant plus les esprits que les accidents de la route), cette formule concentrerait une grande partie des aspirations du plus grand nombre. La recherche d’exclusivité et d’authenticité parvient, semble-t-il, à s’accommoder de la massification de cet univers particulier. Les décors, justement fort peu authentiques des navires qui rencontrent les plus gros succès ne feraient pas d’ombre à « l’authenticité existentielle » qu’offre cet exemple de fuite du quotidien.
Le bateau, la mer, l’océan sont des espaces de liberté qu’on partage de plus en plus en famille et entre amis. L’univers clos favorise le rapprochement et est organisé pour donner la sensation d’absence de contraintes et de responsabilités. Tous les profils y trouvent leur place (jeunes, vieux, parents solos, recomposées ou monoparentales, célibataires, homosexuels, handicapés, seniors, bébés…) puisque la formule est intergénérationnelle et ouverte à tous. L’offre de services semble aussi extensible que sur terre (sans parler des escales que certains ne découvrent même pas tant ils se sentent bien sur leur paquebot-cocon) et le sentiment d’être chouchouté est plus intense.
Le all-in sur mer est, en outre, plus intelligent que sur terre puisqu’il bouge ! Les réductions accordées aux parents et aux enfants sont souvent stupéfiantes et de nombreux packages sont disponibles selon le profil du passager - cartes boissons, enfants, familles, journées, soirées, pratiquement tout est modulable. C’est au fond un « all-in à la carte » qui se révèle, si on le prépare bien, moins cher que sur terre. Les croisières seront d’ailleurs à l’honneur au prochain Salon des Vacances de Bruxelles. Un signe évident qui ne trompe pas puisque ce salon, et ce qu’il propose, est également un baromètre tangible du comportement des touristes.

Un départ pout tous ceux qui le souhaitent

Mais la crise booste aussi les formules les plus économiques et créatives dont on vous parle régulièrement dans le Ligueur. On redécouvre une tante qui a une maison dans le Sud et on rassemble la famille au sens large. On loue avec des amis ou plusieurs familles - surtout en France et en Espagne. On échange sa maison malgré le frein psychologique qu’on décèle encore. On teste le couchsurfing, difficile en famille mais exceptionnel pour les jeunes adultes qui aiment bouger. Tout cela permet ensuite de réduire les dépenses de consommation quotidiennes bien que le Belge soit connu dans le monde pour dépenser beaucoup sur place.
La crise resserre aussi les liens familiaux. Par obligation, car ensemble, c’est moins cher que chacun de son côté, mais ça ne peut réussir que si le projet est commun. Par conviction pour combler les absences du quotidien, parce que l’individualisme régnant pousse à intégrer une certaine collectivité en vacances. Par prise de conscience aussi : des tas de petites bulles de solidarité et de partage éclosent dans tous les coins du pays, pourquoi pas pour les vacances, ici et ailleurs ?
La crise n’est pas seulement économique, c’est aussi une crise de société. Et les vacances sont partie prenante de notre vie sociale et familiale.
Le défi, aujourd’hui, est donc d’assurer un départ pour tous ceux qui le souhaitent et des vacances de qualité sans impact négatif. Cela passe à la fois par une remise en question amorcée du secteur et du vacancier.



Béatrice Demol

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