Développement de l'enfant

Les amours de nos petits : à ne pas prendre à la légère !

Les relations affectives de nos enfants ne sont pas à prendre à la légère. Ils peuvent très tôt tisser des liens forts. Ces amitiés, tant qu’elles restent des relations préférentielles, sont en général source d’équilibre et de plaisir.

Julien et Lola sont amoureux. Louis et Élise aussi. Tout le monde le sait, tout le monde le dit. Julien est très attaché à la petite Lola. Il parle tout le temps d'elle, de ce qu'elle dit, de ce qu'elle fait. Il demande presque tous les jours à sa maman d'inviter Lola à jouer.
Ils ont 3 ans et un lien particulier s'est tissé entre eux dès leur entrée à l'école. Cette amitié les aide beaucoup : ils sont là l'un pour l'autre, se rassurent, se consolent. Les parents sont tout attendris de les voir se tenir par la main et se raconter leurs petits secrets. On les imagine déjà mariés !

Avec le temps…

Ce n'est plus tout à fait pareil pour Louis et Élise. Ils sont un peu plus grands et se connaissent depuis leur plus tendre enfance. Les mamans sont amies et les enfants étaient jusqu’il y a peu dans la même classe. Leur amitié est reconnue par tout le monde : quand on voit l'un, l'autre n'est pas loin. Ils vont dormir l'un chez l'autre et adorent ça. Louis ne veut rien faire sans Élise.
Cela s'est toujours bien passé. Mais, petit à petit, Élise se démarque de son ami. Elle a d'autres copines et rouspète parfois d'avoir Louis qui la suit partout. Et puis, les copines n'ont pas toujours envie d'avoir Louis avec Élise. Cette amitié devient encombrante pour Élise et un frein pour Louis. Il a du mal à aller jouer avec d'autres, refuse les invitations si Élise n’est pas de la partie.
Cette amitié-là, si elle a été source de sécurité pour leurs débuts à l'école, devient un frein dans leur intégration. Surtout pour Louis, très dépendant de sa copine. Les adultes, parents et institutrices, se sont rendus compte de cette évolution et ont proposé de ne pas les laisser dans la même classe à la rentrée suivante. Ce fut difficile pour Louis, mais cela lui a permis de s'ouvrir aux autres et de s'intégrer dans le groupe de garçons de sa classe.

Une préférence, pas une exclusivité

Les amitiés enfantines, tant qu'elles mettent en avant une préférence pour un autre enfant, sont en général source d'équilibre et de plaisir. Cela devient problématique quand elles deviennent exclusives. Elles risquent alors de freiner l'intégration des enfants dans le groupe. Elles nécessitent parfois l'intervention, respectueuse et diplomatique, de l'adulte.
Il ne s'agit pas d'interdire purement et simplement aux enfants de se voir, mais de les aider à s'ouvrir à d'autres. On peut alors proposer, par exemple, d'inviter de nouveaux copains à la maison ou bien inscrire son enfant dans des activités différentes pour lui permettre de côtoyer de nouveaux camarades de jeu.



Mireille Pauluis

ZOOM

Gare aux mots !

Les amitiés entre jeunes enfants sont mignonnes et très touchantes. Elles sont reconnues par les adultes et par les autres enfants. On dit souvent d'eux qu'ils sont « amoureux ». Jusqu'à 4 ou 5 ans, cela ne pose généralement pas de problème. Mais en grandissant, les enfants maîtrisent mieux le sens des mots. Ils n'aiment plus trop qu'on les dise « amoureux ». Ils comprennent que le mot « amoureux » a une signification particulière qui a à voir avec l'exclusivité : on a un amoureux ou une amoureuse, mais un(e) seul(e). Ils perçoivent qu'il s'agit d'une sorte d'engagement et que cela concerne la sphère affective et l'intimité.
Cela vaut la peine de discuter avec eux du sens qu'a, pour eux, le mot « amoureux » : il n’est pas le même pour les enfants et pour les grandes personnes. Alors, évitons de les encombrer avec nos projections d'adultes !
Les enfants peuvent être réellement amoureux... avec une expression correspondant à leur niveau de développement. On n'est pas amoureux de la même façon à 5 ans, 15 ans, 20 ans ou 60 ans. Les gestes, les mots, les comportements ne sont pas les mêmes.
Les enfants, dès 4-5 ans, vivent mal les moqueries sur ce thème. Ils n'aiment pas qu'on les dise « amoureux ». Ils peuvent avoir un amoureux, mais ils ont besoin que cette relation soit respectée. Ils deviennent plus sensibles au regard des autres. Et les commentaires des adultes, avec leurs sous-entendus, sont parfois blessants.

J. R.

À lire

  • Dès 3-4 ans : Mon petit lapin est amoureux, Grégoire Solotareff, Éd. L'École des loisirs, coll. Lutin poche.
  • Dès 5 ans : Lili est amoureuse et Max a une amoureuse, Dominique de Saint Mars et Serge Bloch, Éd. Calligram. ; Monsieur Leloup est amoureux, Frédéric Stehr, Éd. Milan.

En pratique

POUR SÉCHER LES LARMES…

  • Vous le (ou la) voyez triste et l’œil vague. Rien ne vous empêche de lui tendre des perches pour lui montrer qu’il peut vous parler, en lui demandant par exemple : « Tiens, comment ça va avec ta copine Charlotte ? », « Tu ne joues plus avec ton copain Nathan ? ». Votre tout-petit peut éprouver une véritable tristesse, qu’il a encore du mal à gérer vu son jeune âge. Il a besoin qu’on l’aide à prendre du recul, tout en respectant son rythme et son niveau de compréhension.
  • Pas la peine de lui fournir des explications métaphysiques sur le couple, mieux vaut lui parler avec des mots simples. S’il est triste de devoir se séparer de son amoureux-amoureuse pour les fêtes, le plus efficace sera de lui parler des chouettes projets qui l’attendent le week-end prochain. Votre mission : lui changer les idées.

Des parents en parlent...

Un sujet toujours sensible

« À 4 ans, Marie avait quatre ‘amoureux’. Puis, au fil du temps, elle n’en a plus eu que trois, puis deux et enfin un seul, Thibaut. Elle a 7 ans aujourd’hui et Thibaut est resté à la même place dans le cœur de Marie. Au début, on l’a gentiment moquée, jusqu’au jour où elle s’est mise à pleurer suite à une bête réflexion. On a alors compris que c’était un sujet sensible, très important pour elle. Depuis, on regarde cette relation d’un peu plus loin, avec une certaine bienveillance. »
Adrien, 36 ans 

Un vrai chagrin d’amour… à 6 ans !

« Luciana avait un amoureux en 1re primaire, un beau petit blondinet tout mignon. Et puis, un jour, patatras, le bel amoureux ne voulait plus de ma princesse. J’ai été sidérée de la tristesse que pouvait ressentir Luciana. Elle a été inconsolable pendant des jours et des jours, alors que j’ai tout essayé pour lui remonter le moral. À un moment, elle a décidé que c’était fini, elle m’a juste dit : ‘Ben, tant pis pour lui. J’en trouverai un autre qui sera mieux’. Et hop, elle est redevenue toute souriante, toute joyeuse. »
Gabriella, 29 ans 

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