Développement de l'enfant

Pas de relais, comment je fais ?

On retient sa respiration. C’est parti pour quelques semaines mouvementées pendant lesquelles le rythme réaccélère. Pour certain·e·s, le temps rétrécit davantage. Notamment pour celles et ceux qui manquent d’appui, privé·e·s d’une mamie disponible ou d’ami·e·s en or. La bonne nouvelle est qu’il existe des solutions qui permettent de souffler.

À quelques jours de la rentrée, on pose la question un peu empathique à Justine, maman solo de trois enfants : « Alors, pas trop d’appréhension à l’idée de reprendre le rythme effréné du quotidien ? ». On a le sentiment qu’elle n’avait pas encore réalisé que la cadence infernale allait reprendre de plus belle. « Vous venez brusquement d’interrompre mes vacances, là ».
Si le retour à la normale après deux mois d’accalmie a un goût souvent saumâtre, il l’est davantage pour celles et ceux qui se dépatouillent seuls. Dressons donc un panorama des possibles avec Noémie Simon, coordinatrice de la Maison des parents solos.

► Conduire ou rapatrier son petit monde

Nous avons beau connaître la problématique, nous avons demandé à différents parents de balayer les moments charnières de leur quotidien chargé. C’est donc Justine qui ouvre le bal. « Je suis infirmière indépendante. J’ai des horaires fluctuants. Parfois, je dois commencer très tôt le matin. Heureusement que j’ai de gentils voisins pensionnés qui nous apportent leur aide. Autrement, on s’organise avec d’autres parents. Chaque semaine, c’est l’angoisse de comment je vais réussir à conduire ou rapatrier tout ce petit monde au bercail ».

Noémie Simon : La grosse difficulté qui fait reculer chaque bonne initiative en matière de mobilité, ce sont les questions liées aux assurances. On peut citer les Amis d’Accompagner, par exemple, qui proposent ce genre de services, à condition que tout se fasse à pied.
Ce qui fonctionne, ce sont les actions au niveau local. Bien se renseigner sur les réseaux sociaux. « Parents à Jodoigne » sur Facebook, par exemple. Et si ça n’existe pas, les créer. Lancer un groupe WhatsApp pour organiser un réseau dans le quartier. En se parlant. Ça va vite.
On a eu aussi plusieurs fois la demande de troc de babysitter : « J’échange une matinée le mardi contre une soirée le samedi ». Que les parents solos ne se débrouillent qu’entre parents solos. Qu’ils n’hésitent pas à demander de l’aide aux autres. Plein sont prêts à aider. Il suffit souvent de demander.

Jamais sans mes devoirs

On rencontre cette fois Assia, maman d’une fille de 11 ans. Cette maman seule à la barre doit s’organiser avec un rythme aléatoire de technicienne dans le spectacle. « Le plus difficile ? Les devoirs. Généralement, ma gamine reste à l’étude, mais je tiens à tout prix à assurer le suivi. Une façon de garder la main. De ne pas être larguée. Ça nous arrive de revoir rapidement le matin ce qui a été fait la veille. On court tellement que c’est tout sauf une bonne idée. L’idéal, ce serait de trouver une formule où je sais qu’elle n’est pas livrée à elle-même ».

Noémie Simon : Clairement, la solution dans ce genre de contexte, c’est l’EDD. Même si tout le monde n’a pas la chance d’en avoir une sous la main. Les parents ignorent souvent qu’il peut exister un service au sein de la commune qui propose ce type d’aide. Pour mes enfants, j’ai trouvé sur un groupe WhatsApp près de chez moi une personne qui vient les chercher le mercredi et qui leur fait faire leurs devoirs. Une double solution en somme.

► Les activités, le grand marathon des parents

L’autre grand ennemi de l’horloge : les activités. Le soir. Le mercredi. Le week-end. C’est Francky, papa de trois enfants de 4, 7 et 12 ans, qui raconte. « Le plus dur, ce n’est pas le jour où les enfants rentrent à l’école, mais dès que tout se remet en place. Les cours de piano, le judo, la capoeira, la gym, le foot, les scouts… ». Il a beau être graphiste et indépendant, il n’en est pas moins soumis à des horaires. Sa compagne travaille dans le cinéma et part parfois des mois entiers sur des tournages. Pas de famille en Belgique et l’homme n’a que deux mains.

Noémie Simon : Le parascolaire, ce gros problème de logistique. Les familles qui viennent nous voir ne se posent même pas la question. Le peu de temps dont elles disposent est dédié aux tâches quotidiennes. Dans ces cas-là, pas d’activité. Ni pour les enfants, ni pour les parents. C’est très courant. Il n’existe rien, c’est la pénurie structurelle. Par ailleurs, il existe de chouettes initiatives genre petitvelojaune.be ou hamacasbl.be. Pas pour pallier les problèmes logistiques, plutôt pour à la fois offrir un véritable temps de qualité d’un parrain/marraine à l’enfant et permettre au parent de souffler. On est loin de la situation de Francky, mais c’est à garder en tête pour des situations plus impératives.

Des vacances à la maison

On retrouve Justine. Elle garde un goût un peu amer de son été passé à la capitale, trop monotone pour ses enfants. « Mes parents sont trop âgés pour accueillir leurs petits-enfants. Et cette année, impossible pour moi de débloquer des congés. Je me suis mal organisée. Normalement, j’arrive à louer un petit truc. Au pire, à organiser des vacances dans la famille. Je ne sais pas s’il existe des formules de confiance qui permettraient à mes enfants de partir sans moi, dans d’autres familles ».

Noémie Simon : Là encore, tout ce qui touche aux vacances est souvent traité dans le cadre de l’Aide à la jeunesse. Pour des situations, là encore, plus urgentes. Beaucoup de parents qui veulent offrir des vacances à leur enfant ne vont pas faire appel à des actions de parrainage. Parce qu’il y a comme une notion de placement, c’est déjà trop encadré. Il faudrait une formule moins lourde, moins judiciaire. Comme certaines ONG ou asbl proposent aux jeunes migrants, par exemple. Sans passer par l’entremise de la justice. Il y a un manque évident de structures, puisque plein de gens veulent aider. Le problème de la solidarité entre parents, c’est qu’il faut qu’elle soit à double sens. Sans quoi, elle se tarit. D’où un besoin plus institutionnalisé, type volontariat ou autre, qui fonctionne hélas moins pour de simples projets. Mettre en relation les bonnes volontés est un de nos objectifs.


Yves-Marie Vilain-Lepage

La Maison des parents solos

Cette structure flambant neuve est un espace d’accueil et d’écoute pour la Région de Bruxelles-Capitale. Elle offre une permanence psychosociale ou juridique. Mais elle constitue aussi un espace ludique qui propose entre autres un atelier pour les parents. En fin de journée, on s’y amuse en famille. On y sert même une bonne soupe et du pain pour qu’il n’y ait plus qu’à rentrer chez soi relax et détendu·e. L’objectif y est de co-créer. Pas juste d’aider. Chaque parent est acteur de son propre destin.
Pour les parents solos wallons, une telle structure n’existe pas. Mais la Région wallonne a mis en place un site qui regroupe pas mal d’infos : actionsociale.wallonie.be/seulavecenfant

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