Vie pratique

Votre grand·e ado veut se trouver un job estival ? Quoi de plus normal ! Entre désir d’autonomie et envie de se frotter au monde du travail, c’est une évolution logique dans le développement de ces graines d’adultes. S’il y a des bénéfices à en retirer, il y aussi un cadre à rappeler. Pour éviter les mauvaises surprises.
« C’est clair que, pour moi, les jobs d’étudiant·es ont eu beaucoup d’importance dans la construction de ce que je suis aujourd’hui. Ça m’a permis de sortir de ma bulle familiale, de me forcer à aller à la rencontre des personnes alors que j’étais plus timide. Cela fait peut-être un peu vieux con, mais je crois que c’est là que j’ai aussi compris ce que voulait dire le mot responsabilité. En dehors du cadre familial ou scolaire où généralement tu es fort préservé. »
Bernard affiche une bonne quarantaine au compteur, il se souvient avec nostalgie de ses premières expériences de boulot et soutient sa fille Alice qui, entre deux préparations d’examens de fin d’année, postule pour sa toute première expérience professionnelle.
Le job d’étudiant·e est quelque chose de bien ancré dans notre société. Au fil du temps, chacun·e y a trouvé son compte. Les grand·es ados, les employeurs et employeuses, mais aussi les parents qui espèrent que ces incursions dans le monde du travail permettent à leurs jeunes pousses de développer des compétences et, pourquoi pas, de trouver leur voie. Les attentes sont donc là. Bien réelles. Pour que celles-ci soient rencontrées de façon sereine, il s’agit d’être attentif à plusieurs points très concrets. Qui tiennent à des aspects juridiques, légaux, administratifs.
Des contrats conformes
« Le premier conseil que je donne, c’est d’abord et avant tout d’éviter le travail au noir ». Celui qui parle ainsi, c’est Arnaud Le Grelle, le directeur, pour la Wallonie et Bruxelles, de Federgon. Cette fédération regroupe « les opérateurs privés du marché du travail et des prestataires de services en ressources humaines ». On y retrouve notamment les agences d’intérim très actives dans le domaine du job étudiant. Celui-ci représente un tiers des heures prestées au sein de ces agences.
Lorsqu’il met en garde contre le travail au noir, Arnaud Le Grelle défend donc en quelque sorte son secteur. Mais ses arguments dépassent le simple réflexe protectionniste. « Malheureusement, nous avons quantité d’histoires qui nous remonte. Qui vont de la moins malheureuse, le non-paiement de salaire, jusqu’à des problèmes d’accidents de travail non déclarés. Les étudiant·es, les parents, les ami·es ne pas toujours très conscient·es des risques que représente un boulot qui ne repose sur aucun cadre ».
« Le premier conseil que je donne, c’est d’abord et avant tout d’éviter le travail au noir »
Dès lors, c’est le contrat qui fait toute la différence. Un contrat écrit. « Si la loi le prévoit, ce n’est pas pour rien, note Arnaud Le Grelle. Un job étudiant, c’est un travail qui doit passer par une déclaration à l’ONSS. L’entreprise doit se mettre en règle pour couvrir l’étudiant·e, que ce soit sur son trajet domicile-lieu de travail ou dans toutes les obligations qu’exige le boulot ».
Tout cela relève du bon sens, mais pas mal de jobs d’étudiant·es se font en stoemeling, sur base d’une relation de confiance. Tant que tout roule, ça va. Mais dès qu’un incident se produit, c’est la galère assurée.
Un job dès 15 ans ?
« J’ai entendu dire que les étudiant·es ne devaient pas dépasser un certain nombre d’heures, au risque de payer des impôts ou d’être confronté·es à une perte des allocations familiales. Qu’en est-il ? ». Ce qu’exprime Sabrina, maman d’Augustin (15 ans) et Léonie (17 ans) est une préoccupation qui revient souvent dans les témoignages récoltés dans le cadre de cet article.
C’est vrai que les règles ne sont pas toujours simples, car au-delà des heures prestées, il y a aussi le montant des revenus qui entre en jeu. Ajoutez au-dessus de tout cela une couche de complexité régionale et vous comprendrez qu’une mise au point s’impose.
Avant d’explorer tout cela, une première question. À partir de quand peut-on exercer un job d’étudiant·e ? Là, c’est Pierre Targnion, porte-parole de la fédération Infor Jeunes, qui nous donne la réponse. « L’âge minimum légal, c’est 15 ans, à condition d’avoir au moins suivi les deux premières années du secondaire (sans condition de réussite). Sinon, c’est 16 ans ».
Ensuite, postuler pour un job d’étudiant·e nécessite qu’on soit toujours… étudiant·e. Cela doit être l’activité principale. La question peut se poser dans le cadre de parcours scolaires atypiques ou de situations transitoires. Dans ces cas, on peut contacter le contrôle des lois sociales (voir les coordonnées en fin de cet article) qui peut confirmer si oui ou non le statut du/de la jeune est compatible avec un job estudiantin.
À présent, explorons la problématique de ces fameux plafonds à ne pas dépasser. Deux paramètres sont donc à prendre en compte : les heures prestées et le montant des revenus.
Des heures limitées
Pour les heures prestées, un chiffre à retenir : 475. C’est le seuil qu’on ne peut pas dépasser sur l’année. Si cette limite est dépassée, quelles sont les conséquences ? Eh bien, le/la jeune perd tout simplement le bénéfice des cotisations sociales avantageuses et prend alors le statut de travailleur/travailleuse salarié·e classique. Et en devenant un·e travailleur/travailleuse ordinaire, il y a le risque de devoir s’affilier à sa propre mutuelle.
Ce n’est pas tout, celles et ceux qui sont âgé·es de plus de 18 ans risquent de perdre leurs allocations familiales. En clair, ce plafond de 475 heures doit être tenu à l’œil pour ne pas avoir de mauvaises surprises. Notons que ces heures peuvent toutefois être cumulées avec 190 heures de travail associatif.
Comme en Belgique, rien n’est simple, la règle des 475 heures s’agrémente d’une petite spécificité pour la région de Bruxelles-Capitale. En plus d’un plafond annuel, il y a un plafond par trimestre fixé à 240 heures (sauf durant l’été). Si celui-ci n’est pas respecté, il met en péril les allocations familiales.
Pour faciliter la vie des jobistes étudiant·es, il existe un site (studentatwork.be) qui leur permet de consulter le nombre d’heures qu’il leur reste pour bénéficier d’un taux de cotisations sociales réduit. Au-delà de son côté très utilitaire, ce site regorge aussi d’infos relatives au travail des étudiant·es.
Des revenus à ne pas dépasser
Autre ligne rouge qui demande réflexion lorsqu’on veut la franchir, celle des revenus. Là, il s’agit de consulter le petit tableau ci-dessous. Ce sont les montants que les jobistes étudiant·es ne doivent pas dépasser au risque de générer de mauvaises surprises fiscales. Pour elles ou eux, mais aussi pour leurs parents.
Si un premier palier est franchi, le/la jeune n’est plus considéré·e comme fiscalement à charge de ses parents, et donc ceux-ci risquent de payer plus d’impôts. Si un deuxième palier est dépassé, l’étudiant·e jobiste devra payer des impôts.
Au niveau des montants de référence, il s’agit d’être vigilant·e lorsque des contributions alimentaires sont versées pour l’enfant. Celles-ci peuvent être prises en compte dans le calcul et, au bout du compte, tirer vers le bas les plafonds à ne pas dépasser.
- Seuil à ne pas dépasser pour rester à charge des parents (bruts)
Étudiant·e à charge d’un couple marié ou de cohabitants légaux : 7 272,50€
Étudiant·e à charge d’une personne isolée : 9 210€
Étudiant·e porteur/porteuse d’un handicap à 66% à charge d’une personne isolée : 10 910€ - Seuil à ne pas dépasser pour ne pas payer d’impôts
Tou·tes étudiant·es jobistes : 13 242,86€
Pour aller plus loin, outre studentatwork.be, il est conseillé d’aller aussi consulter actionjob.be, un site développé par Infor Jeunes. Le réseau affirme recevoir chaque année plusieurs milliers de demandes d’informations en lien avec le job étudiant.
« Cela en fait la deuxième thématique la plus prisée chez les 15-26 ans, déclare Pierre Targnion. La grande majorité des questions que se posent les jeunes sont liées à la législation (la limite d’heures, l’impact sur l’impôt, sur les allocations familiales) ». Cela méritait définitivement un sujet dans le Ligueur.
VÉCU
Les bienfaits du job étudiant
« Pour moi, le job étudiant, c’est une vraie expérience sociale ». Voilà l’expertise de Pierre Targnion, porte-parole d’Infor Jeunes. « De façon très pragmatique, c’est aussi une ligne qui s’ajoute au C.V. lorsqu’on se lance dans le monde du travail. C’est aussi une façon, peut-être, de se faire connaître, de se donner les arguments pour aller décrocher un autre job étudiant peut-être plus intéressant ».
Chez Federgon, Arnaud Le Grelle est aussi convaincu de l’impact positif pour les jeunes qui se lancent dans l’aventure. « Je conseille toujours de sortir de sa zone de confort pour développer de nouvelles compétences, pourquoi pas linguistiques ? C’est un gros point qu’on peut valoriser dans un C.V. Dans ce cadre, il ne faut pas hésiter à franchir la frontière linguistique, il y a de l’emploi à pourvoir en Flandre ».
POUR ALLER + LOIN
Actions Job Étudiant
Il s’agit d’un service proposé par Infor Jeunes. « Cela se déroule partout en Wallonie, explique Pierre Targnon. Ce sont des ateliers où on aide concrètement les jeunes à s’outiller d’un point de vue juridique en apprenant les bons plans pour postuler ». On y apprend aussi à rédiger un bon C.V., à écrire une lettre de motivation efficace, à préparer un entretien d’embauche.
Élisabeth Derouaux, de l’antenne d’Infor Jeunes de Marche-en-Famenne, renchérit. « En poussant la porte d'Infor Jeunes, les étudiant·es pourront trouver réponse à leurs questions (contrat, allocations familiales, impôts, barèmes...) et recevoir une brochure intitulée Tout savoir sur le job étudiant. La plupart des centres proposent aussi un accompagnement pour rédiger les C.V. Et tout cela est gratuit, ouvert à tou·tes ». Message bien reçu.
CONTACTS
- CLS (contrôle des lois sociales) : 02/235 55 60 ou info.cls@emploi.belgique.be
- Infor Jeunes : 081/98 08 16 ou formulaire à remplir sur actionjob.be