Gedinne : la Fange de l’Abîme à la Croix-Scaille

On ne vous le cache pas, on s’est un peu pris d’affection pour le sud de la province de Namur. Cette partie de la Wallonie regorge de coins magnifiques où nature et Histoire s’entremêlent pour offrir des destinations de promenades uniques et très dépaysantes.

Pour cette nouvelle balade du Ligueur, c’est Gedinne qui a fait office de pôle d’attraction, et plus précisément la Croix-Scaille. L’endroit est exceptionnel à plus d’un titre. Sachez déjà qu’il s’agit du plus grand massif forestier du territoire de l’Ardenne méridionale. Il couvre 3 500 hectares. C’est aussi le sommet de la province de Namur, puisqu'il culmine à 503 mètres d’altitude.
Pour les familles, le point de ralliement, c’est la tour du Millénaire. On ne peut pas la rater. Haute de 60 mètres, elle surplombe le massif. Des escaliers permettent d’atteindre des plateformes d’observation. Enfin, en temps normal. Là, lors de notre visite, la tour était malheureusement fermée pour cause de rénovation. Dommage, de ses plateaux, on y voit se dérouler les reliefs ardennais à trente kilomètres à la ronde.

Du pied de la tour du Millénaire et de la ferme Jacob toute proche démarrent des promenades de distances variées. À côté des petites boucles familiales (5, 7 et 10 km), il y aussi moyen de se lancer dans une randonnée de… 130 km. Nous sommes restés modestes et avons jeté notre dévolu sur un circuit d’un peu moins de 8 kilomètres.
Le nom de la balade est énigmatique. « La Fange de l’Abîme », ça en jette, non ? On imagine des précipices, un univers de légendes sombres où vivent des lutins vénères et s’exprime la turpide de magicien·nes déchu·es. Rassurez-vous, la « Fange de l’abîme » n’est que le nom d’une réserve naturelle très particulière où on déambule sur des caillebotis comme dans les Hautes Fagnes. C’est le climax de la promenade. Avant et après, vous évoluez sur des sentiers forestiers ou des routes (très, très) peu fréquentées entre bouleaux et épicéas.
On a apprécié cette découverte qui a le gros avantage d’être encadrée par de nombreux panneaux didactiques très complets, mais qui mériteraient un beau coup de remise à neuf.

Au bout du compte, si l’itinéraire nous a séduit, il a aussi ses faiblesses. On pourra ainsi regretter la prédominance de la route asphaltée qui enlève le côté bucolique de la promenade. Le dernier tronçon, tout en pente douce vers la Tour du Millénaire, aura aussi peut-être le pouvoir de faire grincer les petites jambes fatiguées.
 Les paysages sont également parfois désarçonnants, de grandes surfaces de forêt ont été coupées pour cause de scolytes. Ces insectes pondent leurs œufs sous l’écorce d’arbres déracinés, affaiblis ou abattus. Si l’endroit est propice, ils prolifèrent et s’attaquent aux arbres en bonne santé. Leur arbre de préférence ? L’épicéa, qui est justement une des essences majeures présentes sur le site. Ces grandes étendues où la végétation reprend peu à peu ses droits ne manquent pas d’intérêt, mais chagrineront peut-être ceux et celles qui goûtent aux déambulations purement forestières.
Hormis ces réserves, la promenade offre de magnifiques panoramas et fait explorer des biotopes rares (lande tourbeuse). Elle permet aussi d’évoquer la Résistance (l’endroit a été un refuge pour l’armée secrète durant la Seconde Guerre mondiale) et de titiller la curiosité des enfants (pourront-ils répondre aux questions de l’Elfe tout le long du circuit ?).