Hänsel & Gretel en trio gagnant

Cette semaine, Lire, ça m’dit triple la mise avec le phénomène Hänsel & Gretel, adapté en album par David Sala chez Casterman, en jeu de société et en pièce de théâtre par la compagnie Vivre en Fol à Namur. On peut même y ajouter un goûter aux pains d’épices !

En publiant la première version de leurs Contes de l'enfance et du foyer à Berlin en 1812, dans lesquels figure Hansel et Gretel, les frères Jacob et Wilhelm Grimm auraient-ils pu imaginer que plus de deux cents ans plus tard leurs deux personnages verraient leurs noms repris coup sur coup de trois manières bien différentes ? Il faut dire que ce conte merveilleux et populaire issu d'une longue tradition orale et écrite a connu depuis de nombreuses adaptations à l’opéra, au cinéma, au théâtre, en marionnettes, en bandes dessinées et même en manga.

L’album : dans l’album qu’il vient de publier aux éditions Casterman, David Sala reprend les grands thèmes du conte : le contexte social de famine, la fratrie, la marâtre, la sorcière (qui ne fait peut-être qu’une avec la précédente), le père accablé par un sort funeste et la culpabilité, la forêt inhospitalière, l’abandon des enfants et les cailloux semés pour se retrouver (motif déjà présent dans Le Petit Poucet de Perrault publié en 1697), l’anthropophagie, la malignité de l’enfance, la maison sucrée quasi magique.

La version illustrée par David Sala est proche de celle de 1819 avec l'ajout d'un épilogue où les enfants bénéficient de l’aide d’un canard ou cygne blanc, mais laisse planer un doute quant à l’identité de la mère. De manière assez cruelle, c’est elle qui incite son mari à perdre ses enfants dans la première version des frères Grimm. Il faudra attendre la quatrième édition en 1840 pour que la mère ne soit plus l'instigatrice de l’abandon des enfants, mais leur belle-mère. Remords des frères ou volonté de politiquement correct ? Peu importe, car l’originalité et la qualité de cet album tiennent principalement dans le travail du bédéiste David Sala qui apporte sa patte graphique à cette histoire d’une cruauté sans nom. Outre son travail flamboyant à la gouache, il nimbe l’histoire d’une atmosphère particulière et d’une couleur bleu nuit métallisée du plus bel effet, sombre et pop. Le grand format de l’album permet d’accentuer des effets de dramatisation propre à l’atmosphère du récit. Par rapport à la tradition, alors que la sorcière est habituellement représentée sous les traits d’une vieille femme effrayante, il la voit lui comme une dame qui pourrait être de la haute société, à l’instar du monde nanti qui affamait les enfants du peuple à l’époque. Heureusement, tout cela a bien changé.

Le spectacle : dans le cadre du festival de poésie, Mots-aïque , qui se tient à la Maison de la Poésie de Namur du 24 au 26 novembre, retrouvons Hansel & Gretel ainsi qu’une compagnie de théâtre jeune public que le Ligueur suit de près : la cie Vivre en fol de Manon Romain et Barnabé Henri. Leur version libre Hansel et Gretel, amis du jour et de la nuit, dans laquelle apparaissent Dorothea Grimm, mécanicienne royale, bavarde et maladroite ainsi que Gus, balayeur général, qui proposent une histoire pleine de chansons, de marionnettes, de trompettes… et de boulons, est présentée ce dimanche 26 à 11h et à 14h30. Ils y ont ajouté l’histoire d’un crapaud qui rêve d’être un poète et celle d’un cache-cache entre la lune et le soleil (tout public dès 4 ans). Notons qu’il est possible de combiner ce spectacle familial avec la découverte de l’exposition Contes au carré au Delta, où les médiateur·rices vous proposent des animations et des ateliers gratuits en continu (inscriptions sur place auprès de l’équipe du Delta).

Le jeu de société : et si vous ne pouvez pas sortir, pourquoi ne pas se retrouver autour de la table familiale. Ce jeu apporte une autre manière de poursuivre sa lecture du conte. Hansel et Gretel, repris dans la sélection jeux 2023 du Ligueur, vient compléter la gamme de jeux collaboratifs de Granna en proposant une mise en scène ludique du conte. Vous allez aider nos jeunes héros allemands, égarés dans les bois, à obtenir cinq pains d'épices gourmands et appétissants, sans se faire attraper par la sorcière (Dès 7ans).