Loisirs et culture

La chasse aux œuvres d’art

La chasse aux œuvres d’art

Marre d’entendre des pieds qui traînent et des « C’est quand que c’est fini ? » lors de vos city trips en famille ? Alors devenez chasseurs et chasseuses de street art ! Méthode testée et approuvée.

En tombant sur streetartcities.com, j’ai découvert la communauté mondiale des chasseurs et chasseuses d’art urbain : 1 607 villes répertoriées - les belges sont d’ailleurs particulièrement bien cotées ! - et des fiches explicatives pour chacune des œuvres florissantes. En réalisant qu’il existait des parcours de visite dédiés, je n’ai eu qu’une envie : tester ! D’autant que l’urgence d’une échappée belle en duo avec mon ado se faisait sentir.
Nous voilà donc dans le train, direction Ostende. Pourquoi Ostende ? J’aurais pu choisir Liège, Namur, Gand ou Charleroi mais, petite faiblesse, j’ai appâté le môme en lui promettant un tour de « moto électrique » sur la digue pour terminer la balade. Douze parties de UNO plus tard (mon astuce anti-gsm), nous sommes accueillis par… une magnifique baleine bleue ! L’œuvre de l’artiste de rue anversois Dzia (comme m’a soufflé l’application « OstendCityWalks » qui propose les différents parcours de street art). Surexcitée par cette découverte, j’explique à mon fils le but de notre promenade du jour : partir à la chasse aux œuvres d’art dans les rues de la ville. Réponse laconique : « Pourquoi ? ».

The Crystal Ship

Parce qu’Ostende, grâce à son festival « The Crystal Ship », qui réunit chaque année des artistes de renommée internationale, est particulièrement bien fournie. Parce qu’à part l’estacade, ni lui, ni moi, ne connaissons cette ville qui a pourtant inspiré des peintres comme Léon Spilliaert et James Ensor. « Qui ? ». Parce que cela va nous faire une promenade originale, et maintenant, finies les questions et pédale !

Alors, oui, nous avons fait un crochet par le loueur de vélos pour un parcours dit « pédestre », mais avant de critiquer, sachez que ce fut là une riche idée : certaines œuvres sont assez éloignées les unes des autres, et certains coins ne méritent pas la carte postale. Et ce, malgré le choix du parcours « Belle Époque ». Car mis à part deux rues particulièrement ravissantes aux maisons colorées comme dans le londonien Notting Hill, le reste des environs est plutôt Triste Époque. On a donc eu le nez fin en préférant la fluidité, ce qui nous a permis de nous égarer. Chose qui est arrivée souvent, puisqu’il était impossible de fixer le gsm sur le guidon…

Notre parcours a démarré au-delà du jardin japonais… dont j’ignorais jusqu’à l’existence ! La première œuvre (qui est en réalité la seconde, car on a loupé la vraie première…) est une sorte de portrait en patchwork. Je demande au fiston ce à quoi ça lui fait penser ? « À une carte d’avions qui se sont crashés dans la mer ». Mouiii. Un coup de pédale plus loin, déjà la deuxième œuvre : « Un pigeon mort qui se fait pendre par les pieds car il a fait une grosse bêtise ». D’accoooord. Troisième œuvre : « Une famille de morts vivants ». Ces œuvres sont clairement aussi efficaces qu’un test de Rorschach… Allo, docteur ?

Le street art, c’est dark

Je commence à espérer qu’il y ait des œuvres un peu plus youplaboum. Mais… pas vraiment. Constat après quelques œuvres en sus : le street art, c’est plutôt dark. Mais pas dénué d’intérêt. Car mon fils s’est pris au jeu : il me devance systématiquement et crie « Je l’ai vue en premier » quand il repère une œuvre. À tel point qu’on en découvre d’autres qui n’étaient pas sur le parcours (dédales, on vous dit). Devant le portrait d’un chien à mémère, il me demande si ce n’est pas un peu kitsch. Tu deviendras critique d’art, mon fils. Plus loin, face au portrait d’une danseuse, dont la moustache était initialement cachée par un arbre, il ne peut s’empêcher de cacher son dégoût. Voilà l’occasion d’aborder des sujets de société contemporains…
Fin de la promenade : plus d’une heure et demie à vélo et un seul « C’est bientôt fini ? ». Objectif réussi. Car j’ai cette douce impression d’avoir vu Ostende, ses quartiers, ses habitant·es (on est tombés sur une fête de village) et ses fresques dont certaines particulièrement émouvantes… Certes, mon fils m’a avoué qu’il était content que ça se termine, « Parce qu’en fait, je trouve ça moche ». Je positive en me disant qu’au moins il ne voudra pas redécorer les murs de sa chambre à la bombe. Mais, dans le train du retour, il me cite l’air de rien l’œuvre qu’il a le plus aimée : la maison en « bruit numérique » de l’artiste espagnol Ampparito. Avant de s’interroger : « Mais c’est légal de peindre sur les maisons ? ». Tandis que le soir même, alors que je plastifie son journal de classe, il me gratifie d’un « T’es une chouette maman ».

  • Verdict : une promenade à réitérer. À Ostende ou ailleurs. Avec ou (même) sans lui.