Loisirs et culture

Le livre jeunesse, comme le Ligueur, aborde souvent des thèmes liés à la vie quotidienne des familles. Et parmi ceux-ci, la mort. Sous toutes ses formes. Voici trois manières d’en parler, parmi d’autres.

À partir de 5 ans
Ceci est d’abord une histoire de supers. Vous savez, les super-mamans, super-chats, super-pouvoirs, super-câlins… Mais on a beau naviguer dans un univers de super-héros, on est parfois rattrapé par la réalité et son lot de mystères. Adultes comme enfants peuvent se sentir désemparés face à la mort. Diouke, le chat de la famille, est mort. La maman pleure tout son saoul. À cause du chagrin lié à la perte de l’animal adoré… ou de l’impossibilité d’en parler à son fils ? Comme certains adultes confrontés à la mort, elle se lance dans des explications alambiquées, genre il est parti au ciel. Son fils lui fait comprendre que travestir la réalité n’est pas la meilleure manière de l’affronter.
La narration d’Émilie Boré se dédouble astucieusement : une écriture cursive pour l’histoire racontée et perçue par l’enfant, les majuscules dans des phylactères pour les dialogues mère-fils. Les illustrations de Vincent Di Silvestro jouent des codes expressifs de la bande dessinée, doublés d’un graphisme fort inscrivant les personnages colorés dans des décors aux traits noirs et aux éclats de blancs judicieusement disposés.
Un bémol à cette histoire : solutions et consolations viennent de l’enfant qui prend sur lui le désarroi de ses parents. Une parentalisation de l’enfant qui se rencontre dans la vraie vie, mais que nos expert·es dénoncent régulièrement. Cela fait d’Il est où Diouke ? un bon point de départ pour aborder un sujet difficile.
- Il est où Diouke ?, d’Émilie Boré et Vincent Di Silvestro (La joie de lire).

De 3 à 6 ans
On sait que les enfants font plus que jouer quand ils jouent. Ils approchent et comprennent le monde d’une autre manière. C’est ce que propose cet album : jouer à être mort, rester allongé·e, ne pas bouger, se taire. « On fait comme si ». On joue la réalité pour mieux l’apprivoiser. Lire permet ici de jouer à.
La Belge Catherine Pineur joue à fond la carte de la dédramatisation : couleur rose fluo bien éloignée du deuil, personnages animaliers, en l’occurrence trois amis canards, petit format oblong qui peut évoquer l’horizontalité de la mort… Les dialogues, spontanés, sont sans tabou, sans filtre dans le bec des trois volatiles. Il ne s’agit pas d’édulcorer le propos. L’humour et la joie de vivre animent aussi cette petite merveille, tellement juste.
- T’es pas mort !, de Catherine Pineur (Pastel/L’école des loisirs).

À partir de 6 ans
De ses nombreux voyages au Népal pour la Fondation Thang, le Néerlandais Mark Janssen a ramené une autre manière d’apprivoiser la mort. La mamie de Babou est décédée. Bien que celle-ci ait préparé son petit-fils à cette éventualité, Babou passe par toute une gamme de vécus : insomnie, incompréhension, colère, tristesse… Un plongeon dans le lac glacé de Pokhara et ses balades au milieu des siens et de la nature l’apaisent peu à peu. Avec le temps, il ressent comme une présence, celle de l’absente, qui l’avait prévenu qu’elle resterait « tout près de toi ». Entouré de poissons, d’oiseaux, de singes, de temples, d’étoiles, il entretient le souvenir de l’aïeule à travers une myriade de détails et les partage avec son grand-père, lui aussi endeuillé.
Le texte, sobre et bien traduit, se déroule au bas de double-pages d’autant plus grandes que l’album a un format vertical allongé. Les crayonnés noirs, gris et blancs multiplient les références à la culture népalaise et amplifient la délicatesse du propos.
- Tout près de toi, de Mark Janssen (Kaléidoscope).
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