Vie pratique

Paroles de grands-parents : la distance

Les temps de vacances - comme celles de Pâques - permettent parfois de retrouver ces complicités précieuses qui manquent tant quand enfants, et dans la foulée petits-enfants, se sont expatriés. Comme grands-parents, on en avait rêvé de l’arrivée de ces petits bouts. Comme d’une seconde jeunesse. Comme de retrouvailles avec le temps et les joies de l’enfance. Comme un trésor de moments, de récits, de valeurs parfois, à transmettre et partager. Et puis, bardaf, voilà que nos enfants, comme de plus en plus de jeunes à l’heure de la mondialisation, ont joué à saute-frontières. Il a fallu encaisser l’idée de les voir partir, eux et leur (future) marmaille. Et puis, chacun a développé ses trucs pour vivre au mieux ces relations entre lesquelles se sont immiscés les kilomètres.

► Marie, retraitée 2.0, 64 ans

La question de la distance ? C’est celle qu’on veut bien mettre entre ses petits-enfants et soi ! Certains sont très près géographiquement, d’autres vivent à l’étranger, mais je me sens proche de tous de la même façon.
J’essaye d’être la plus disponible possible… en fonction aussi de mes propres activités ! Par contre, quand on partage des choses, que ce soit en vrai ou sur Skype, c’est à fond. Et c’est ce qui compte le plus pour moi. 

Jean-Pierre, papy chauffeur, 65 ans
L’automobile est une de mes grandes passions. J’ai plusieurs voitures de collection et j’en fais profiter les petits. Alors, 5 ou 500 kilomètres, c’est finalement pas très différent pour moi. Faire cinq heures de route pour voir mes petits-enfants les plus éloignés ? Oui, oui et re-oui ! J’ai la chance d’être pensionné, et donc d’avoir du temps pour profiter d’eux.

Marie, puéricultrice retraitée, un cœur d’ado, 65 ans
Ma fille aînée est allée s’installer dans le sud de la France où elle a trouvé une opportunité professionnelle. Elle a deux enfants dont l’aînée avec laquelle je suis devenue grand-mère. J’ai eu la chance de la garder tous les jours. Cela a créé un lien fort. Au moment du grand départ, elle avait 5 ans : j’étais contente que mes enfants fassent leur vie et ce bonheur a pris le pas sur le stress et la tristesse. Mais j’ai eu le cœur serré, un vrai chagrin d’ado ! Puis, la vie continue. On se parle au téléphone, on s’envoie des photos. On reste proche malgré tout car, comme je l’ai dit à ma petite-fille, on a un fil invisible entre nous.

Viviane, médecin, 59 ans, cinq petits-enfants
Je vois relativement peu mes trois petits-enfants, du côté de ma fille. Mais nous sommes proches malgré l’éloignement. Nous avons toujours des trucs à nous raconter. Ce sont aussi les enfants de ma fille aînée, avec qui j’ai des liens plus forts qu’avec ceux de mon fils et… ma belle-fille. Ma fille me téléphone quasi tous les jours et donc j’en sais plus sur ses enfants à elle qui vit à 360 km que sur ceux de mon fils qui habite dans un village proche !

Margaret, Anglaise en Belgique, franglaise
Mon fils est parti en Angleterre en 1997 pour suivre ses études universitaires. Et voilà qu'il s'y est marié à 23 ans avec… une jeune Anglaise. Depuis, ils ont deux enfants de 9 et 4 ans. Nous n’allons sans doute pas être des grands-parents très proches, au jour le jour, pour nos petits-enfants, mais ce que nous souhaitons, mon mari et moi, c'est que nos enfants et les cousins continuent à se voir. C'est ainsi que nous organisons une semaine de vacances « franglaise » tous les deux, trois ans, tant que tout le monde le veut bien. Cette année, nous partons en Haute-Savoie - ce n'est jamais plus qu'une semaine - et tout le monde doit comprendre/parler l'autre langue.
Les enfants de notre fille aînée, qui habite en Belgique, doivent essayer de comprendre leurs cousins anglais qui, eux, ne parlent pas le français (ce dont je suis un peu triste). Inversement, Annick et Tom doivent essayer de comprendre le français. Il ne faut pas nécessairement qu'ils parlent l'autre langue, mais j'espère que ces vacances les encourageront à comprendre et connaître l'autre.

Mamylou et Oumpapa
Nos deux petits-enfants de 2 ans et 4 ans sont à Ankara, en Turquie, depuis un an.
Ils nous manquent énormément, mais le fait de les voir tous les quatre heureux là-bas est super important pour nous. Cela restera une expérience extraordinaire pour toute la famille : apprentissage d’une nouvelle langue, d'une autre culture...
Lors des fêtes de famille, aux anniversaires par exemple, nous pensons beaucoup aux absents. Mais grâce à Skype, aux photos, nous vivons des moments quasi instantanés et cela nous met du baume au cœur. Le meilleur moment reste tout de même les retrouvailles aux aéroports.

Robert, 65 ans, sept petits-enfants
Mes deux autres enfants vivant déjà à l'étranger, je dois avouer que ce fut pour moi assez triste d'apprendre que mon fils et sa famille partaient également. Le plus dur concernant mes petits-enfants, c'est ce manque physique de pouvoir les toucher, les embrasser, les sentir. Ce qu'on a l'impression de perdre également, et pour lequel Skype reste impuissant, c'est ce regard furtif, cette mimique, cette expression, qui ne dure qu'une fraction de seconde, mais que vous n'avez pas pu saisir et qui est à jamais perdu car ce sont des instantanés du vécu. De plus, les enfants changent vite et leurs expressions évoluent.
Soyons toutefois positifs. À l'heure de la technologie, le téléphone, Skype et internet viennent à notre secours. Par rapport au siècle passé, la démocratisation des voyages en avion nous permet des déplacements beaucoup plus aisés et l'organisation d'un séjour pour rendre visite à nos petits-enfants représente une motivation et un passe-temps indiscutables !

sadBernard, 32 ans…
Mes parents habitaient à Bruxelles, mes grands-parents paternels à Avignon. On ne le voyait que deux fois par an. Ma mère ne voulait absolument pas nous laisser seuls avec eux. La seule fois où elle l'a fait, j’avais 8 ans. J’ai tellement pleuré qu'elle est venue me chercher. Pour moi, c'était des inconnus. Ça n'avait rien de comparable avec ma vraie mamie, ma grand-mère maternelle, qui était notre voisine ! Ma grand-mère paternelle est maintenant décédée et je regrette de ne pas être allée souvent la voir.



M. T. et A. T.

LES CHIFFRES DE LA PROXIMITÉ FAMILIALE

Aux États-Unis ou en Europe du Nord-Ouest, la situation qui domine est celle d’une proximité familiale dans un rayon de 25 km, qui met les parents les plus proches à moins d’une heure et permet des contacts hebdomadaires. Dans les pays d’Europe du Sud, la règle est plutôt celle d’une proximité à l’échelle du quartier, de la rue ou de l’immeuble, qui permet des interactions quotidiennes.
(Thomas Pfirsch, Les Espaces de la parentèle en Europe)

TOUT UN ROMAN

Déjà familier des histoires parentales, avec son roman Les Papas du dimanche, François d’Epenoux campe, dans Le réveil du cœur, la relation entre un grand-père retiré de tout et son petit-fils de 6 ans, Malo, qu’il accueille chez lui le temps d’un été. Au départ, il faut bien le dire, à contrecœur. Avec, à la clé, un choc des générations qui pourrait bien être un choc des civilisations. Le petit-fils va apprivoiser l’aîné et une tendre complicité va naître, autour de valeurs de plus en plus négligées comme le vivre ensemble. L’ancien marin misanthrope va s’ouvrir au monde contemporain, au contact de ce gamin qui fait le lien entre hier et demain, ville et nature. Un beau roman plein d’humour sur la transmission qui crée des ponts entre passé (récent) et futur (à nos portes), sans oublier la part du père qui occupe la première moitié du roman.

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