Grossesse

Ne pas avoir son nouveau-né près de soi parce qu’ayant vu le jour prématurément, ayant eu une naissance bousculée ou étant malade, il est hospitalisé dans une unité néonatale est une expérience douloureuse. C’est peut-être votre histoire… La joie du retour à la maison est suspendue. Votre bébé a besoin de soins. Votre quotidien de maman, de papa est fait de préoccupations pour lui, pour sa santé, son bien-être, son futur.
Comment traverser au mieux cette période chargée de stress et d’attente ? Voici des pistes grâce aux regards croisés de la néonatologue Dominique Grossman, chef du Pôle Mère-Enfant au CHIREC (site Delta, à Bruxelles), et de Reine Vander Linden, psychologue en périnatalité.
Bébé en peau à peau, dès que possible
Avec le transfert du bébé dans une unité néonatale, la séparation mère-enfant est réelle. « Elle constitue un stress pour le bébé et un stress pour la maman », observe la néonatologue Dominique Grossman. C’est déboussolant… « Les mamans ne savent pas bien quoi faire pour leur enfant. En néonatologie, on propose le plus vite possible aux parents de faire du peau à peau avec leur bébé. En général, dans l’heure qui suit l’accouchement, si l’état du bébé le permet. Par exemple, s’il s’agit d’un bébé de 34 semaines et que l’accouchement s’est bien passé, on le laisse un moment sur la maman. Si le peau à peau n’est pas possible avec la maman, on le propose au papa. » Les soignants aiment que les bébés soient en peau à peau sur le torse nu d’un de leurs parents « parce que c’est un endroit où ils sont bien, où ils ont chaud, où ils pleurent moins ».
« "Est-ce que mon bébé sera formé ?", s’inquiètent souvent les futurs parents d’un enfant prématuré. Alors, oui, il sera formé, mais il n’aura pas les compétences d’un enfant né à terme. Cela sera donc beaucoup plus compliqué d’entrer en relation avec lui », dit encore Dominique Grossman. Le peau à peau aide à la construction de la relation parent-bébé. Tant de petites choses comptent… Si le bébé mis en peau à peau ouvre les yeux (et ouvrir les yeux, pour un bébé prématuré, demande beaucoup d’énergie), le parent peut en profiter pour avoir un contact visuel avec lui.
« La relation se tisse effectivement au milieu d’une série d’obstacles, enchaîne la psychologue Reine Vander Linden. Il y a la fragilité de l’enfant, il y a la culpabilité des parents. Déjà, pour beaucoup de parents, s’occuper d’un nouveau-né né à terme et en bonne santé, ce n’est pas facile. Alors, a fortiori quand il est tout mini, fragile, pesant à peine 800 grammes… On a peur de lui faire mal, de bouger ses sondes, de tirer ses tuyaux… Il y a aussi le décalage entre les images qu’on s’était faites de son bébé pendant la grossesse (tout beau, tout rose) et le bébé réel – avec ses mimiques de malaise et de douleur : c’est le choc, et un long chemin est nécessaire pour réajuster ces images dans sa tête. Il y a les inquiétudes concernant le futur et d’éventuels handicaps, les questions du genre "Est-ce que je peux m’attacher à mon bébé ?"… Bref, des barrières protectrices se créent, parfois à l’insu des parents eux-mêmes, parce qu’ils ont peur d’être confrontés à la réalité de ce bébé avec ses vulnérabilités. Alors, c’est important qu’ils soient guidés pour qu’ils puissent entrer en relation avec lui, à des moments où, sur le plan physiologique, ses paramètres sont stabilisés. » Car il faut bien comprendre qu’un bébé prématuré ou malade n’est en état d’entrer en relation que si ses paramètres physiologiques sont stabilisés. Or, ceux-ci peuvent vite se modifier. Il faut tomber aux bons moments ! C’est entre autres pour cette raison que les longues périodes de présence auprès de son bébé sont bénéfiques : parce qu’on peut mieux capter de tels instants…
Aujourd’hui, on sait aussi combien le bébé séjournant en néonatologie a besoin d’entendre la voix maternelle et la voix paternelle pour grandir et se développer.
ZOOM
Le « colostrum médicament »
Si la maman avait l’intention d’allaiter son enfant, l’équipe soignante la soutient dans son projet. Rappel du docteur Dominique Grossman : « Le lait maternel est ce qu’il y a de mieux pour le bébé, surtout quand il est prématuré. »
Le bébé né très prématurément ou malade ne peut pas encore téter. À côté du peau à peau, tirer son lait est quelque chose de concret que la maman peut faire pour lui. Elle exprime son lait manuellement ou avec un tire-lait électrique : « On sait que c’est difficile de tirer son lait… et de tirer son lait longtemps. Mais c’est la seule façon d’avoir suffisamment de lait pour plus tard. » Au début, on n’obtient que quelques gouttes de colostrum qu’on va donner à l’enfant. « C’est un produit précieux : dans certaines unités néonatales, on parle de "colostrum médicament". »
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De façon générale, plus que jamais, les parents sont fortement impliqués dans les soins à leur bébé, avec le soutien de l’équipe soignante bien sûr. Ce sont eux les premiers soignants de l’enfant.