Développement de l'enfant

Arrêter l’école et travailler, un choix professionnel

15 ans, un âge complexe. Pas encore adultes, les ados ne sont pourtant plus tout à fait enfants. Beaucoup de questions les traversent, renversant au passage les parents. Certains décrochent de l’école et veulent travailler. Que leur répondre, comment les aider ? L’enseignement en alternance peut être une solution. Mais pas à n’importe quelles conditions.

Souvent catégorisé comme le mouton noir de l’enseignement qualifiant ou comme la dernière possibilité pour les jeunes d’avoir un diplôme, l’enseignement en alternance ne jouit pas d’une bonne réputation. Cependant, il peut constituer une excellente réponse pour les ados qui ne se retrouvent pas dans l’enseignement traditionnel.

L’alternance, kesako

L’alternance est un type d’enseignement qui a pour but de permettre aux jeunes de suivre à la fois une formation scolaire générale et une pratique professionnelle. Ainsi, dès l’âge de 15 ans, après avoir passé son CE1D, l’ado peut commencer à travailler et gagner sa vie légalement. Il passera trois jours par semaine à l’école et deux ou trois jours en entreprise. À la fin de chaque mois, il obtiendra un petit salaire, fluctuant entre 270 € et 500 € (les salaires ayant été calculés de façon à ce que les parents continuent de recevoir leurs allocations familiales).

L’alternance dépend à la fois de la Fédération Wallonie-Bruxelles (FWB) et des Régions wallonne et bruxelloise. En FWB, elle est dispensée par des centres d’éducation et de formation en alternance (CEFA). En Régions, ce sont l’Institut wallon de formation en alternance et des indépendants et petites et moyennes entreprises (IFAPME) et le Service formation des petites et moyennes entreprises (SFPME) qui l’orchestrent. En 2016, sur la tranche d’âge de 15 à 25 ans, 14 336 élèves faisaient de l’alternance en Belgique francophone.

Plus de 200 métiers

Que ce soit pour travailler dans la jardinerie, le bâtiment, le bois, la restauration, la coiffure, etc., l’offre de formations proposées par l’alternance est immense : elle dépasse les 200 métiers.

Pour chaque filière, un « accompagnateur » est désigné pour suivre l’ado, vérifier s’il est bien encadré, formé et traité. De leur côté, les entreprises ont l’obligation de former à la pédagogie les tuteurs qui enseignent le métier. La formation dure deux à trois ans et, si tout se passe bien, le stagiaire peut même être engagé dès l’obtention de son diplôme. Depuis que ce système existe, plus de 80 % des jeunes qui ont suivi et réussi l’enseignement ou la formation en alternance trouvent - ou créent - un emploi dans les six mois après la sortie de l’école.

Des exemples contraires

Si l’alternance peut constituer une magnifique opportunité et une très bonne solution pour certains jeunes, elle ne convient pas à tout le monde. Ces deux récits en témoignent.

Bashid Rastergar est patron d’un garage à Saint-Guidon. Il a l’habitude d’employer des stagiaires en formation en alternance à partir de 16 ans. Cinq d’entre eux ont d’ailleurs été embauchés dans l’entreprise. Il nous raconte l’histoire de Nicolas, ancien stagiaire qui va prochainement reprendre le management du garage.

« Nicolas est d’origine roumaine. Il y a cinq ans, il s’est timidement présenté chez nous pour poser sa candidature. J’étais d’accord pour le prendre, sans lui promettre un CDI à la fin, mais en lui donnant de vraies tâches à effectuer. Il a commencé avec un contrat d’apprentissage de trois semaines, puis s’est lancé dans un stage en alternance pendant deux ans. Une fois le stage terminé, je l’ai engagé. J’étais très content de son travail. Aujourd’hui, il souhaite se mettre en indépendant pour reprendre le management du garage. Je le soutiens dans sa démarche. Sans exagérer, en mécanique, 80 % des jeunes qui font de l’alternance sont assurés d’avoir un emploi par après. »

À l’inverse, Mickaël et Jérémie voulaient arrêter l’école. Leur maman, Dominique, témoigne : « Nous avons proposé à nos enfants de faire de l’alternance, car ils ne trouvaient pas leur voie. Ils l’ont testée dans la vente, mais ne s’y sont pas retrouvés. Ils trouvaient le niveau scolaire beaucoup trop bas. Ils ont donc arrêté pour se réorienter vers le général ».

5 conseils pour que cela fonctionne 

On n’engage donc pas ses ados dans l’alternance sans les préparer un minimum. Jenifer Clavareau, experte en matière d’alternance, formation et enseignement, donne cinq recommandations :

► Le choix de l’enfant doit être réfléchi : pourquoi souhaite-t-il se réorienter ? Si c’est parce qu’il éprouve des difficultés en classe, ça n’ira pas. Il vaut dès lors mieux contacter le centre PMS et l’école pour trouver d’autres réponses. L’alternance n’est pas un choix facile. Elle implique que les jeunes évoluent dans un monde d’adultes, se familiarisent à des responsabilités plus importantes que celles auxquelles ils ont été confrontés jusque-là. Cette décision ne se prend pas à la légère. En revanche, si l’enfant est convaincu, c’est un merveilleux challenge à relever !
► Veiller à bien connaître le métier qu’il souhaite apprendre : pour cela, voici un site réalisé par la FWB : monecolemonmetier.be. Il présente des fiches-métier avec les parcours possibles après l’école.
Se mettre rapidement en quête d’une entreprise prête à former son enfant : la première personne à contacter est l’accompagnateur ou l’accompagnatrice du CEFA ou de l’IFAPME/SFPME. Une liste d’entreprises agréées sera alors fournie. Votre enfant aura pour première tâche de contacter l’entreprise et de se présenter, pratiquement comme s’il cherchait un emploi. C’est une démarche formative importante, qui permet aux élèves de mesurer rapidement les défis de l’alternance. Le CEFA, l’IFAPME ou le SFPME l’aidera dans cette étape avec des conseils, des préparations à l’entretien, une rédaction de C.V., etc.
► Vérifier les parcours (mobilité) entre la maison, l’école et l’entreprise, notamment en fonction des particularités horaires de certains métiers (construction, horeca, boulangerie).
► Prendre le temps de rencontrer l’accompagnateur, l’accompagnatrice de son enfant : lui poser des questions sur le contrat d’alternance, le plan de formation, sur les droits et les devoirs en entreprise, etc. L’accompagnateur/accompagnatrice est LA personne de référence pour l’élève, ses parents et l’entreprise, c’est le garant du bon déroulement de la formation en entreprise.

 


Alix Dehin

 

 

Trois préjugés à casser

« L’alternance, c’est pour les ratés »

En ouvrant l’école au monde socioprofessionnel, l’alternance donne du sens aux apprentissages. Dans des pays et des régions tels que l’Allemagne, la Suisse ou le Québec, cette forme d’enseignement est d’ailleurs beaucoup plus valorisée et pratiquée. En Suisse, par exemple, 64 % des jeunes choisissaient l’alternance à 15 ans en 2015. Au sein de la concession automobile BMW-Mini de Genève, sur les 120 travailleurs, 119 ont été formés par l’alternance, y compris le directeur et ses quatre directeurs adjoints. En Belgique, Pierre Marcolini, le célèbre chocolatier, s’est formé en alternance.

« Tu ne peux plus suivre d’études supérieures après »

178 options de formation disponibles dans l’enseignement qualifiant sont susceptibles d’être organisées en alternance. Elles mènent au CESS, lequel permet de suivre des études supérieures.

« Les élèves qui font l’alternance n’ont plus de temps pour les loisirs »

Certes, le jeune risque de prendre plus de temps qu’un autre pour se déplacer vers son lieu de travail. Mais on reste dans un système organisé par l’école. Le jeune ne consacre pas plus d’heures à son activité que quand il est à l’école. Il suit le rythme de l’entreprise avec les pauses légales, la pause de midi, etc.

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