Loisirs et culture

Pour cette première rubrique de 2021, nous avons décidé de mettre en vedette trois héroïnes, trois filles pleines d’audace et d’enthousiasme, à l’image de pas mal de femmes qui se sont mobilisées en 2020. Vive le girl power en littérature jeunesse !
Notre fille
En 2000, année où il reçoit le prix Hans Christian Andersen d'illustration (sorte de Nobel de la littérature jeunesse) d'illustration pour l'ensemble de son œuvre, paraît en français Mon papa d’Anthony Browne, suivi en 2005 de Ma maman et en 2007 de Mon frère.
Prix Bernard Versele en 2004, Mon papa détonne positivement parmi les albums consacrés aux pères. Bourré d’humour tant visuel que sur le fond, il contribue à créer un ancrage positif et tendre autour du lien père/enfant. Dans cette exploration des relations familiales, manquait à la large bibliographie d’Anthony Browne le regard que des parents peuvent porter sur leur fille. Avec Notre fille, la quadrilogie est complète. Et l’on retrouve ici la patte graphique de l’auteur-illustrateur britannique : au milieu de couleurs pleines de vie, on découvre dès la couverture la bouille incroyable, traversée d’un large sourire, avec un nez mutin, de cette gamine animée par la joie de vivre.
Gardienne de but en robe à fleurs, nageuse au maillot assorti, travailleuse comme une abeille, elle peut aussi se rebeller, se bagarrer, hurler à tout rompre, puis se réconcilier, se calmer et chanter. Comme tout enfant. Chaque page est un croquis, un portrait consacré à une de ses caractéristiques. Faisant fi de ce qui pourrait apparaître comme des qualités et des défauts, l’album se termine sur une déclaration d’amour absolu et plein de fierté de ces parents pour… leur fille.
Notre fille, d’Anthony Browne (Kaléidoscope). De 3 à 6 ans.
Le jour où je suis devenue grande sœur
Voilà un moment fort dans la vie d’une famille : l’arrivée d’un bébé. Martina Aranda donne la parole à la sœur aînée, Leonor, 5 ans et demi. Comme dans un journal, elle nous raconte son attente, son impatience, son enthousiasme. Elle se lance dans une myriade de préparatifs pour accueillir le nouveau venu, Max, « futur roi des monstres » (allusion au génial Max et les Maximonstres, de Maurice Sendak).
Dessinées sur fond blanc crème, d’un trait fin à l’encre avec quelques touches délicates d’aquarelles, les scènes se concentrent sur l’action sans décor autour. Positive, attentive, Leonor crée un cocon de bonheur pour son petit frère. À sa suite, on se dit que la vie pourrait être simple et paisible avec un brin de bienveillance et de douceur.
Le jour où je suis devenue grande sœur, de Martina Aranda (Pastel/L’école des loisirs). À partir de 5 ans.
Lotta sait tout faire
Ce livre est signé par deux immenses dames de la littérature jeunesse : l’illustratrice italienne Béatrice Alemagna et l’autrice suédoise Astrid Lindgren (1907-2002), plusieurs fois nominée pour le prix Nobel. Son personnage Fifi Brindacier, rendu célèbre par la télévision, est considéré en Suède comme une icône féministe. Libre et indépendante, voire frondeuse, la jeune héroïne bouscule les rapports de pouvoir entre adultes et enfants, filles et garçons, ce qui fut parfois mal vu.
Lotta, 5 ans à peine, dont il est ici question, pourrait être sa sœur cadette. Apparue dans Lotta la filoute, elle est rousse et porte des couettes comme son aînée. Dans Lotta sait tout faire, composé de trois courts récits parfaits quand on commence à lire avec aisance, Lotta fait preuve d’inventivité face aux contrariétés de la vie, notamment quand la fête de Pâques, puis celle de Noël risquent d’être gâchées, mais aussi de solidarité pour leur vieille voisine. Un regret pour un si bel ouvrage : les quelques erreurs de frappe ou de traduction.
Lotta sait tout faire, d’Astrid Lindgren et Béatrice Alemagna (Versant Sud). À partir de 6 ans.
Michel Torrekens