Société

En octobre 2022, le gouvernement fédéral avait décidé de réaliser des économies sur les crédits-temps, un dispositif permettant aux parents de diminuer temporairement leur temps de travail pour s’occuper de leurs enfants. La Ligue des familles s’était déjà fortement mobilisée pour s’opposer à cette réforme. Rien n’y a fait. Ce 1er février 2023, la réforme est finalement entrée en vigueur.
Le moins que l’on puisse dire, c’est que cette réforme porte un coup de massue énorme à l’équilibre entre travail et vie de famille des parents. Non seulement la durée du crédit-temps est rabotée, elle passe de 51 à 48 mois, y compris pour les crédits-temps en cours, mais la rémunération est revue à la baisse pour les parents qui comptent cinq ans d’ancienneté ou plus.
Pour la Ligue des familles, cette réforme constitue un recul inacceptable pour les droits des parents alors qu’ils rencontrent déjà des difficultés immenses à faire face à leurs contraintes professionnelles tout en assumant leurs responsabilités familiales. Au contraire, ils attendaient que les pouvoirs publics les soutiennent davantage.
Les congés actuels permettent à peine aux parents de tenir le coup
Ces mesures portent gravement atteinte à la conciliation entre travail et vie de famille, alors que les congés familiaux existant sont déjà largement insuffisants et que les besoins en la matière sont énormes : 70% des parents nous disent que travailler à temps plein tout en ayant des enfants est difficile (Baromètre des parents 2022, données Ipsos). Ce chiffre grimpe à 81% chez les parents de jeunes enfants (0-3 ans) !
Pour la Ligue des familles, il est illusoire de penser que les parents vont pouvoir mener de front travail et vie de famille sans aide pour s’en sortir au quotidien et sans suffisamment de moments de pause.
Une perte de 90€ par mois
Désormais chaque parent percevra la faible allocation de base, soit 537,50€/mois pour un crédit-temps à temps plein. Les compléments de rémunération dont bénéficiaient jusqu’à présent les parents ayant cinq ans d’ancienneté ou plus chez le même employeur ou l’âge de 50 ans (ou plus) sont supprimés. Au total, il s’agit d’une perte sèche de 90€ par mois en cas d’interruption du travail à temps plein.
Cette baisse constitue un recul énorme pour les droits des parents, qui étaient déjà mis en difficulté par la rémunération actuelle extrêmement faible des congés familiaux. Mais aussi pour l’égalité entre les femmes et les hommes, puisque la faible rémunération des congés familiaux induit que ce sont les femmes, qui ont la plupart du temps le plus faible revenu du couple, qui les utilisent majoritairement.
Trois mois de crédit-temps en moins
La durée du crédit-temps pour s’occuper de son enfant passe de 51 mois à 48 mois, et cette diminution s’applique aux crédits-temps en cours. Le parent qui est déjà en crédit-temps et qui, au 1er février 2023, n’a pas encore épuisé au moins trente mois de ce congé, perd trois mois de crédit-temps rémunéré. C’est énorme ! Les parents qui sont en crédit-temps depuis trente mois ou plus pourront par contre en bénéficier jusqu’au 51e mois.
Le crédit-temps encore moins accessible aux travailleuses et travailleurs précaires
La condition d’ancienneté pour pouvoir prendre un crédit-temps passe de deux à trois ans chez le même employeur. Cela revient à exclure les travailleurs – surtout des travailleuses, les femmes restant les premières concernées – en contrats précaires du droit au crédit-temps. La réforme ne tient pas compte non plus de la mobilité professionnelle des parents qui ne passent plus toute leur vie dans la même entreprise. Désormais, à chaque changement d’emploi, les parents devront attendre trois longues années – c’est énorme dans la vie d’un enfant ! – pour recourir à ce dispositif de conciliation entre travail et vie de famille.
La réforme complexifie le système des congés déjà très peu lisible
Le système des congés familiaux est complexe, entre congés parentaux, crédit-temps et interruptions de carrière, qui permettent tous de s’occuper d’un enfant, mais avec des modalités et conditions d’accès différentes. Difficile pour les parents de s’y retrouver. Notre régime de congés a grand besoin d’être simplifié. Or, cette réforme rend le système des congés encore bien plus complexe et cela a une conséquence énorme sur le non-recours à ces dispositifs : de trop nombreux parents ne sont pas au courant de leurs droits.
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