Société

« Les bourses, on en ressort avec plus d’énergie collective »

Les bourses à la Ligue des familles, c’est un rendez-vous saisonnier. Pour les volontaires, elles représentent également une impressionnante dépense d’énergie et de bonne volonté. Rencontre avec Patricia Kervyn, une des chevilles ouvrières du groupe local de Mont-Saint-Guibert.

Signe de la mobilisation autour des bourses de la Ligue des familles : la difficulté de trouver un moment dans un agenda surchargé à quelques jours de l’événement, sans compter que derrière chaque bourse, il y a un collectif et qu’il faut qu’une de ses membres accepte d’en être la porte-parole. Finalement, nous trouvons une date, un lundi soir, à Thorembais-Saint-Trond où Patricia Kervyn a déménagé il y a trois ans. Ce qui ne l’a pas empêché de poursuivre son engagement à Mont-Saint-Guibert, par fidélité à son groupe d’amies. Une équipe soudée.

Le club des cinq

La Ligue des familles, Patricia Kervyn la croise il y a une vingtaine d’années. « À l’époque, j’étais sans travail et une maman de l’école m’a proposé de les aider, se souvient-elle. Au début, je me limitais à donner un coup de main pour les bourses, puis je me suis investie davantage dans le comité. Pour les bourses, nous sommes un groupe de cinq femmes, qui travaillons toutes par ailleurs ».
À Mont-Saint-Guibert, le relais local de la Ligue des familles s’investit sur trois activités : deux bourses et un marché aux jouets qui se déroule le même jour et dans le même bâtiment que les Petits Déjeuners Oxfam ainsi qu’un spectacle pour enfants. Ce groupe de cinq femmes se charge de l’organisation des bourses, et une quarantaine de volontaires viennent s’ajouter pour la manifestation, « parfois pour deux heures seulement, souvent pour davantage. Sans ces aides bénévoles, on serait incapable de mettre en place la bourse ».

Le groupe est notre moteur parce qu’il y a beaucoup de respect, de compréhension de ce que chacune peut donner

Dans ce collectif, chacune joue un rôle précis, sans hiérarchie. « Pas de présidente, pas de trésorière... Ça, c’est une Ligue à l’ancienne. Chacune investit en fonction de ses affinités du temps dont elle dispose. Le groupe est notre moteur parce qu’il y a beaucoup de respect, de bienveillance, de compréhension de ce que chacune peut donner, face aux limites des unes et des autres. C’est parfois plus riche que dans une entreprise où il y a une notion d’obligation. Ici pas. D’ailleurs, si je reste dans ce comité alors que je n’habite plus l’entité, c’est par amitié pour ce groupe. Cela devient des histoires de vie et on est respectivement un soutien moral l’une pour l’autre, y compris dans des circonstances privées. On se retrouve aussi en dehors de la Ligue pour rencontrer nos familles respectives, nos enfants… Tout cela est rassembleur ».

Un marathon de cinq jours

La bourse d’automne se déroule en octobre, mais l’organisation démarre déjà fin août. « C’est une mécanique bien rôdée. Chacune sait ce qu’elle doit faire et quand. Début septembre, on lance la communication via le Ligueur, des sites internet, le journal communal, etc. On établit un rétroplanning. Les gens envoient leurs demandes. On répond aux mails de nos cent cinquante déposantes et quelques déposants en leur renseignant une plateforme où ils indiquent chaque vêtement et un rendez-vous pour le dépôt, lesquels ont lieu le mercredi et le jeudi. Ensuite, on trie, vérifie que les pièces soient propres, à la mode et en bon état, on les étiquette, on les range. C’est le gros du travail. Le vendredi, a lieu la prévente qui est une sorte de cadeau offert à ceux et celles qui nous aident. La vente se déroule le week-end à la Maison des Loisirs de la commune qui nous fait le cadeau d’une location sur les quatre activités annuelles. Sans oublier le rangement et la reprise des invendus et de l’argent ».
C’est ainsi que 120 dépôts environ sont enregistrés, ce qui représente approximativement 4 000 pièces dont 40% en moyenne sont vendues chaque année. Certaines années et de façon systématique dans certaines bourses, les invendus ou une part de ceux-ci sont laissés pour des organismes comme la Croix-Rouge, Fedasil ou d’autres. Le comité de Mont-Saint-Guibert offre également des bons d’achat aux familles en difficulté à faire valoir sur la bourse.
Outre les événements mentionnés précédemment, Patricia Kervyn a également participé à quelques journées collectives de la Ligue des familles, dont une à Namur « Très chouette journée, se remémore-t-elle, où se retrouvaient les représentant·es de différentes bourses. Une rencontre concrète, proche du terrain et de nos réalités, sans considérations théoriques inutiles, où l’on a pu échanger de bons plans. Suite à cela, on a organisé un marché pour les ados. Au final, si c’est cinq jours de marathon, comme nous les appelons, on en ressort avec plus d’énergie collective, positive ».

Des jouets et des petits-déjeuners

Un mois plus tard, la Ligue des familles de Mont-Saint-Guibert organise également un marché aux jouets et livres pour enfants, jeux de société, BD, déco de chambre d'enfant… Une formule brocante où il n’y a pas de dépôt préalable. Les parents peuvent louer une table pour mettre en vente leurs objets. Ce marché est organisé avec le soutien de la Province du Brabant wallon, en partenariat avec Oxfam-Magasins de Monde qui propose au même moment et dans le même lieu leurs petits-déjeuners pour un commerce équitable, respectueux de la dignité des producteurs et des productrices.
Cette mixité offre une grande convivialité et s’inscrit dans des valeurs communes autour d’une consommation qui se veut responsable. « Cela nous permet de rencontrer beaucoup de personnes du village et, comme celui-ci s’agrandit terriblement, de nouvelles familles », constate Patricia Kervyn. Cette consommation responsable, la Brabançonne la soutient depuis peu en allant cueillir ses légumes avec 450 autres mangeurs et mangeuses sur les champs de la Terre de Cense à Incourt. Ce qui est une manière d’offrir une juste rémunération à cette maraîchère qui produit local, en permaculture au sein d’une communauté en soutien à l’agriculteur (CSA).

Parents d’accueil

Alors que nous discutons dans le living, surgit une jeune fille africaine. Patricia Kervyn ne nous a pas parlé de sa famille jusqu’à présent, une famille recomposée avec cinq enfants devenus adultes « Chacun a fait sa vie en dehors de la maison, on est fier de nos enfants, on mérite notre petite médaille », sourit la jeune grand-mère de trois petites-filles. Avant d’ajouter : « Je vous présente Linka, jeune Burundaise demandeuse d’asile de 17 ans que nous accueillons depuis mars de cette année. Elle dispose d’une carte provisoire. Jusqu’à sa majorité, elle peut rester en Belgique. Après, cela dépendra de la justice ». Prise en charge par Fedasil, elle avait été accueillie par le centre d’accueil de Rixensart pour mineurs étrangers non accompagnés (MENA).
« Mon compagnon connaissait Lynca de par ses voyages au Burundi. Quelle ne fut pas notre surprise lorsqu’elle l’a contacté à son arrivée en Belgique. Au début, mon compagnon est allé régulièrement sur place pour l’aider dans son travail scolaire, détaille Patricia Kervyn. Puis, nous lui avons proposé de venir passer quelques week-ends chez nous, des fêtes. Comme la relation s’établissait positivement, et n’ayant plus d’enfant à la maison, et donc de l’espace, nous avons proposé à Lynca de venir vivre chez nous. C’est Mentor Jeunes qui nous a aidé à faire les démarches administratives auprès de Fedasil et de sa tutrice. D’habitude, Mentor Jeunes essaie de créer un lien entre le MENA et une famille d’accueil. Notre démarche a été inverse puisque le contact existait. C’est important pour nous que Lynca puisse compter sur Mentor Jeunes si elle devait partager quelque chose qu’elle aurait du mal à nous dire. Pour nous, cela a été une découverte de voir à quel point les MENA qui arrivent en Belgique sont bien soutenu·es pour l’école, les soins, le logement... Tout ce que l’on entend dans les médias, c’est toujours le pire. Aujourd’hui, nous sommes heureux d’être famille d’accueil pour le lien qui se crée entre Lynca et nous, pour les partages riches, la découverte des cultures respectives. »

EN PRATIQUE

Des bourses près de chez vous

Le principe des bourses est simple. Quelques jours avant, vous déposez vêtements, jouets, matériel de puériculture, vélos… selon le type de bourse. Un prix est fixé. Les volontaires étiquettent et disposent le tout. Après la bourse, vous récupérez les invendus ou vous en faites don à une organisation de solidarité.  

Les bourses près de chez vous : lieux et dates à retrouver ici

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