Loisirs et culture

Les indétrônables livres jeunesse qui ont marqué l’histoire

Quatre professionnel·les de la littérature jeunesse nous donne leurs grands classiques

La littérature jeunesse compte chaque année des milliers de nouveaux titres. Dans cette abondance, des livres se démarquent. Par leur faculté à parler aux enfants d’hier comme à ceux d’aujourd’hui. Par leur aptitude à traverser l’histoire sans prendre une ride. Parce qu’ils ont marqué les esprits, tout simplement.

Luc Battieuw (bibliothécaire, directeur honoraire du centre de littérature jeunesse de Bruxelles et fondateur de la fondation Battieuw-Schmidt), Hélène Désirant (artiste, conteuse et coordinatrice du prix Bernard Versele à la Ligue des familles), Laurence Leffèbvre (bibliothécaire et responsable du centre de littérature jeunesse à la bibliothèque provinciale de La Louvière) et Laurence Bertels (journaliste culture à La Libre Belgique) sont ce qu’on appelle des pointures en littérature jeunesse. Ces spécialistes dévoilent leur sélection de livres qui ont marqué l’histoire de la littérature jeunesse et expliquent pourquoi.

► De 0 à 3 ans

  • Loup, Olivier Douzou (Rouergue) : « Cet album rassemble toutes les qualités d’un album pour les tout-petits. Il joue sur la peur de l’enfant, recourt au fameux ‘Loup, y es-tu ?’ et se démarque aussi par ses illustrations très colorées. » L. L.
  • Et pit et pat à quatre pattes, Jeanne Ashbé (Pastel) : « Jeanne Ashbé est une auteure incontournable de la petite enfance. Elle décrit si bien l’univers des tout-petits à partir de leur point de vue. Comme dans cette histoire où tout est présenté de la perspective du petit à quatre pattes. » L. B.
  • À ce soir, Jeanne Ashbé (Pastel) : « Jeanne Ashbé a le don de parler de la petite enfance. J’épingle ce livre pour la thématique de la séparation qu’il aborde, qui reste un passage important, mais tous ses cartonnés sont bons ! » La. B.
  • La toute petite dame, Byron Barton (l’École des loisirs) : « Pour la musique des mots qui s’en dégage. Parce qu’il parle de compassion aussi en accordant une place à la bêtise et à la colère. L’enfant s’identifie facilement à cette toute petite dame pourtant très grande dans ce livre. » H. D.

► De 3 à 6 ans

  • Max et les maximonstres, Maurice Sendak (l’École des loisirs) : « C’est un album qui a autorisé beaucoup de choses. Il montre très bien la manière dont cette colère est intériorisée et s’exprime chez cet enfant. » L. L.
  • C’est moi le plus fort, Mario Ramos (l’École des loisirs) : « L’humour de Mario Ramos est remarquablement mis en scène dans cet album intelligent qui propose une vraie réflexion sur notre monde. Ce loup à l’ego démesuré va faire une rencontre fortuite et apprendre qu’il y a toujours plus fort que soi. » L. B.
    « Les illus sont magnifiques et à la hauteur de l’humour de l’auteur. À partir de la figure emblématique du loup, il y parle de rivalité et de cour de récré. » La. B.
  • Je te tiens, Benoît Jacques (Benoît Jacques Books) : « À partir du grand classique Je te tiens par la barbichette, il revisite le duo du tout petit et du trop grand. Il raconte la violence du grand, mais aussi la possibilité du petit de se défendre. Au-delà de l’histoire, je l’aime aussi pour son graphisme extraordinaire et son humour décapant. » H. D.

► De 6 à 9 ans

  • Pétronille et ses 120 petits, Claude Ponti (l’École des loisirs) : « Je retiens ce livre pour l’inventivité qu’il dégage, aussi bien dans le texte que dans l’illustration. Il nous parle aussi de tendresse. Il y a un dessin où on voit la maman souris au centre d’une fleur à 120 pétales qui porte chacun le nom de chaque souriceau. » L. L.
  • Les trois brigands, Tomi Ungerer (l’École des loisirs) : « Ce titre qui s’est décliné en différentes versions reste un must. On l’apprécie pour son humour mordant, mais aussi la réflexion qu’il sous-tend sur le rapport à l’argent et la redistribution de la richesse. » L. B.
  • Mon ami Jim, Kitty Crowther (l’École des loisirs) : « Un livre sur la tolérance, le racisme, qui nous emmène loin et qui est graphiquement magnifique. » La. B.
  • La sorcière grince-dents, Tina Meroto et Maurizio A.C. Quarello (Oqo) : « Impossible d’y échapper à cet univers. Les lecteurs et lectrices qui aiment se faire peur s’y retrouvent autant que celles et ceux qui ont besoin d’une issue positive, car le livre nous parle aussi de la force du petit. » H. D.

► De 9 à 12 ans

  • Harry Potter à l’école des sorciers, J.K. Rowling (Gallimard jeunesse) : « Ce premier livre de J.K. Rowling a marqué un tournant, il a amené des tas d’enfants à la lecture. On y retrouve tous les grands codes : l’enfant adopté qui ne connaît pas ses parents, le roman initiatique, l’univers d’un collège, la quête identitaire. Il faut aussi saluer la qualité de l’écriture et l’univers qu’elle a créé. » L. L.
  • Oh, boy, Marie-Aude Murail (l’École des loisirs) : « À la fois drôle, coquin, attachant et intelligent, ce roman parvient à traiter de sujets graves, comme le suicide ou l’homosexualité, avec beaucoup de légèreté. Une vraie bouffée d’air frais ! » L. B.
  • Lettres d’amour de 0 à 10, Susie Morgenstern (l’École des loisirs) : « C’est un roman incontournable sur la solitude d’un petit garçon élevé par sa grand-mère. Il aborde aussi le thème des secrets de famille à partir d’une lettre écrite par son grand-père. » La. B. 
  • Moi et rien, Kitty Crowther (Pastel) : « Ce livre parle de l’absence et de la mort. Ce rien n’est pas rien, c’est ce qui donne au personnage de la force, tant il a nourri son imaginaire autour. La portée des mots est très symbolique, c’est pour ça qu’il faut quand même un certain âge pour en prendre la mesure. » H. D.

► De 12 à 15 ans

  • Tobie Lolness, Timothée de Fombelle (Gallimard jeunesse) : « Ce roman parle du rapport qu’entretient l’homme avec la nature à partir d’un être minuscule qui cohabite dans un chêne avec le règne animal. C’est un vrai régal à lire, il y a de l’aventure, un récit animalier, on le dévore sans même s’en apercevoir. » L. L.
  • Jésus Betz, Fred Bernard et François Roca (Seuil jeunesse) : « C’est la première fois que j’ai pu, en tant que bibliothécaire, proposer un album à des adolescents. Le livre aborde, tout en pudeur, la thématique du handicap et de l’acceptation à partir de l’histoire d’un homme tronc qui tombe amoureux d’une acrobate muette. » L. B.
  • Soldat Peaceful, Michaël Morpurgo (Folio junior) : « Le récit s’ouvre avec un jeune homme qui lutte pour ne pas dormir, parce qu’au petit matin, sa vie va basculer. Un récit où l’histoire individuelle se trame avec celle de la Première Guerre mondiale dont on parle peu. » La. B.
  • Le rapetissement de Treehorn, Florence Parry Heide et Edward Gorey (Attila) : « L’histoire est improbable et pourtant, on y croit. On rentre dans cette fiction d’un petit garçon qui rapetisse. Le monde des adultes n’y prête pas attention, trop absorbé par sa propre vie. Le tout porté par un univers en noir et blanc tout en finesse. » H. D.

► De 15 à 18 ans

  • Les longueurs, Claire Castillon (Gallimard jeunesse) : « C’est un roman qui parle de l’emprise d’un entraîneur sportif sur une adolescente. Émotionnellement, on n’en sort pas indemne. L’écriture est admirable, tout en nuance et en finesse. Il parlera aussi bien aux ados qu’aux adultes. » L. L.
  • À la croisée des mondes, Philippe Pullman (Gallimard) : « Ce livre a marqué mon adolescence et mon imaginaire. Il soulève beaucoup de questions. Au carrefour d’une œuvre philosophique et d’un roman d’aventure, cette trilogie envoûte et porte de très belles valeurs humanistes. » L. B.
  • Alma, Timothée de Fombelle (Gallimard jeunesse) : « Timothée de Fombelle est un peu l’Alexandre Dumas de notre époque. On est emporté dans son récit et l’histoire d’amour que raconte cette trilogie sur l’esclavage est aussi magnifique que le personnage d’Alma. » La. B.
  • Une anthologie, Edward Gorey (Le tripode) : « C’est un choix plus subversif, car ce livre nous parle de la mort avec sarcasme. L’auteur y livre ses pensées noires et sombres sans tabou. C’est rare de trouver du sombre dans la littérature jeunesse. » H. D.