Crèche et école

Les piliers de la motivation scolaire

Motivation. Dix lettres qui, ensemble, forment un mot quasi magique. Indispensable aux apprentissages et à la réussite scolaire. Mais que recouvre exactement ce terme et quelles résonances prend-il quand on l’invoque dans les couloirs de l’école ?

Attelons-nous directement à la tâche : définir la motivation scolaire. Un de nos interlocuteurs nous prévient, il existe plus de mille définitions du mot motivation. Alors, nous en donner une, comme ça, clé sur porte, c’est mission impossible. Au fil des échanges, trois éléments communs ressortent : le sens, la compétence, la contrôlabilité.

Un trio sacré

La motivation convoque des questions de sens. Si l’élève juge la tâche utile et intéressante, il y puise sa motivation. « Quand l’enfant comprend l’utilité de ce qui lui est demandé, ça donne du relief à la matière », confirme Lorraine Lasserre, coach scolaire. Lucas, 9 ans, rechigne à apprendre ses tables de multiplication. Mais si ses parents tissent des ponts entre ce savoir et son quotidien, tout s’éclaire. Tout à coup, ce n’est plus une table de trois figée dans un cahier de mathématiques, mais une compétence vivante à mobiliser qui permet de savoir combien de boules de glace à 3€ il va pouvoir s’acheter avec un billet de dix.
Deuxième pilier de la motivation : la compétence. Ou plutôt la perception qu’a l’élève de sa compétence. Plus l’élève se sent capable d’effectuer une tâche, plus il sera motivé pour l’accomplir. Dans le cas inverse, il peut jouer les prolongations par manque de confiance. Comme Marguerite, 13 ans, qui bloque sur son devoir de néerlandais. Son vocabulaire ne lui permet pas de s’acquitter de sa tâche, elle se sent nulle. À ce niveau aussi, le parent peut intervenir et questionner : qu’est-ce qui pourrait t’aider ? Identifies-tu une ressource (un cours de remédiation, un dictionnaire, un camarade de classe) à ta portée ?

« Il y a une méprise courante : penser que la motivation est l’impulsion de départ qui mène à l’action. C’est l’inverse, c’est par l’action qu’on se motive »
Valentine Anciaux

Psychoeducation.be

Troisième pilier : la contrôlabilité. Un enfant sera d’autant plus motivé à s’engager, s’il sent qu’il a prise sur le cours des choses. Que ses réussites et ses échecs dépendent de lui. Le cours de philo d’Adam, 19 ans, est hyper brouillon. Il ne cerne pas ce qu’on attend de lui et ne voit pas comment se préparer pour l’examen. Ce sentiment de perte de contrôle est source de démotivation. Ici encore, le parent peut questionner le jeune : « Que peux-tu faire pour y voir plus clair ? » ; « L’enseignant·e se montre-t-il/elle disponible aux questions ? » ; « Peux-tu solliciter l’aide d’ami·es ? » ; « Peux-tu déjà avancer sur certaines parties ? ».
Sens, compétence, contrôle. Ces trois piliers indispensables figurent dans la définition proposée par Roland Viau. Selon le chercheur canadien en pédagogie, la motivation scolaire est « un état dynamique qui a ses origines dans les perceptions qu’un élève a de lui-même et de son environnement et qui a pour conséquence qu’il choisit de s’engager à accomplir l’activité pédagogique qu’on lui propose et de persévérer dans son accomplissement, et ce, dans le but d’apprendre ».
Gaëtan Gabriel, accrocheur scolaire à la Fédération Wallonie-Bruxelles, ajoute un quatrième pilier à la motivation, celui de l’affectif. « L’élève éprouve toute une série de besoins. Des besoins de sécurité, de bien-être, d’appartenance, d’authenticité. La satisfaction de ces besoins va aussi avoir un impact sur son niveau de motivation à fréquenter l’école, être actif/active en classe, fournir un travail à la maison, s’impliquer de manière générale ». Selon lui, cette dimension ne doit pas être négligée.

La motivation ne se décrète pas

À ce stade de la réflexion, un constat s’impose : vous aurez beau dire à votre enfant « travaille, c’est important », s’il ne perçoit pas de sens dans ce qui lui est demandé, ne se sent pas compétent pour le faire, estime ne pas avoir de prise sur la situation ou souffre d’un besoin insatisfait, sa motivation sera en berne.
Aldo, élève de 3e secondaire, en fait les frais. Au désespoir de sa mère, il ne s’y met pas. Elle doit tout le temps être sur son dos. Pourtant, elle est convaincue qu’il a les capacités pour réussir son année.
« Rien ne sert de prêcher le travail, il faut comprendre pourquoi le fait de ne pas travailler prend sens pour lui », suggère Gaëtan Gabriel. L’accrocheur rencontre Aldo et constate que sa méthode de travail est bonne. Au niveau des apprentissages, pas de lacunes non plus. En discutant avec l’adolescent, le professionnel constate qu’il ne se sent pas en sécurité dans cette grande école. L’institution est élitiste, cultive la compétition, les enseignant·es sont peu accessibles quand Aldo a besoin d’un cadre plus sécurisant pour déployer son potentiel.
Les exemples cités par nos experts sont encourageants. Ils démontrent que rien n’est irréversible. Que si on est à l’écoute de son enfant, on peut cerner ce qui cause la démotivation. C’est aussi par le dialogue qu’on peut le questionner pour voir comment agir positivement sur son contexte.

BON À SAVOIR

Motivation intrinsèque ou extrinsèque

  • Intrinsèque : la matière suscite de l’intérêt chez l’élève, elle lui procure du plaisir et de la satisfaction.
  • Extrinsèque : cette motivation est guidée par des objectifs stratégiques comme obtenir une récompense, éviter une sanction ou encore coller aux attentes parentales.

Trois types d’engagement

  • L’engagement affectif : l’élève est intéressé et son attrait nourrit son investissement.
  • L’engagement comportemental : l’élève se conforme aux attentes du milieu et fait preuve d’une bonne conduite.
  • L’engagement cognitif : l’élève a la volonté d’apprendre. Il déploie des efforts mentaux et met en place des stratégies (gestion du temps, répétition, mémorisation) pour y parvenir.

Cercle vertueux ou vicieux

POUR ALLER + LOIN

Au commencement, la motivation naturelle

Jean-Luc Aubert est l’auteur de Comment motiver son enfant à l’école ? (Odile Jacob). Il y explique comment la motivation surgit naturellement chez l’enfant qui cherche à gagner en autonomie. Reste aux parents à embrayer pour cultiver sa soif d’apprendre.

Dès son plus jeune âge, l’enfant active ses sens. Il teste, explore, expérimente. C’est ce qu’on appelle « la pulsion épistémophilique », explique Jean-Luc Aubert. « Cette pulsion surgit spontanément dès la naissance et jusqu’aux 6 ans de l’enfant. Comme toutes les pulsions, elle correspond à un besoin. Dans ce cas-ci, gagner en autonomie ».
Cette quête d’autonomie opère d’abord sur le plan moteur. Puis, vers l’âge de 3-4 ans, embraye sur l’autonomie intellectuelle. C’est la fameuse phase des pourquoi et des comment. L’enfant cherche à mieux appréhender les choses qui l’entourent. Sa curiosité est intarissable. Tous les parents en font l’expérience avec les « Pourquoi il pleut ? », « Comment la voiture avance ? », « Pourquoi l’herbe pousse ? », « Comment la vache fabrique du lait ? ». La source des questions ne tarit pas et quand l’enfant ne questionne pas, il joue, il invente, il crée.

Une flamme à entretenir

Pour Jean-Luc Aubert, pas de doute, la curiosité naturelle est le moteur de la motivation. Tous les enfants en sont dotés. Comment la cultiver ? C’est là qu’intervient le parent. « Quand cette pulsion se manifeste, c’est important que le parent accompagne cette soif de savoir et réponde positivement aux sollicitations, explique Jean-Luc Aubert. Les réponses du parent procurent du plaisir à l’enfant. Plaisir de la découverte qu’il va spontanément chercher à renouveler ».
Rassurez-vous, vous ne devez pas avoir réponse à tout. Le simple fait de prêter attention à ses questionnements, d’y répondre dans la mesure du possible suffit, ajoute Jean-Luc Aubert.
À l’inverse, l’enfant qui n’a pas l’occasion de poser des questions ou à qui on ne prête pas une oreille attentive va progressivement perdre sa curiosité naturelle. Piégé dans cette carence, il éteint sa flamme censée entretenir sa motivation. Pour Jean-Luc Aubert, cette lacune peut être compensée par la suite, mais c’est toujours plus compliqué d’inverser le cours des choses si on a laissé s’éteindre la petite flamme. Bref, celle-ci doit s’entretenir dans l’écoute et le dialogue.

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