Vie pratique

L’ARCHIVE DU LIGUEUR
Au début des années 2000, Henry Landroit signe une rubrique dans les pages du Ligueur. C’est le langage qui y tient la vedette. On y parle ponctuation, substantif, préfixe, étymologie, mais aussi phénomène de mode. À plusieurs reprises, cette chronique, intitulée « au bout de la langue » deviendra une tribune pour dénoncer le côté envahissant de l’anglais. Car, oui, Henry Landroit était (et est toujours d’ailleurs) un défenseur revendiqué de la langue de Voltaire. Dans cette rubrique, dès que l’idiome de Shakespeare s’invitait dans notre quotidien avec l’outrecuidance qui le caractérise, le chroniqueur sortait sa verve bien aiguisée pour bouter l’Anglois hors de nos bouches et de nos imprimés.
En ce mois de mai 2000, deux événements viennent renforcer Henry Landroit dans ses convictions. Tout d’abord, pour le plus grand malheur de celui-ci, le début des années 2000 coïncide avec l’explosion du web, du langage HTML, des SMS, des GSM. Bref, autant d’acronymes qui puisent leurs initiales dans des mots anglais. « Le nouvel internaute mobile, se plaint Henry Landroit, ne communiquera plus bientôt que par des mots hybrides dont le sens lui échappera complètement ».
Comme pour narguer la plume du Ligueur, voilà qu’une initiative politique est lancée pour sensibiliser les Belges au numérique. Il s’agit d’une campagne itinérante qui sillonnera les différentes communes. Nom de l’opération : « Roadshow 2000 » ! Aaaargh ! De qui se moque-t-on ? « N’y a-t-il donc aucun francophone dans les cabinets ministériels capable de proposer réseau, toile, navigation et spectacle qui initieraient tout aussi bien les amateurs que tous ces termes anglais ou faussement anglais ? ». Et Henry Langlois d’appeler à une prise de conscience au risque de voir « notre langue continuer de filer imperceptiblement mais sûrement à l’anglaise ! ».
Quelques jours plus tard, c’est le concours eurovision de la chanson qui s’expose à l’ire de notre chroniqueur. Il a appris que, lors de ce « machin inconsistant », beaucoup d’interprètes ne chantaient pas dans leur langue maternelle, mais bien en anglais. Pour se faire comprendre du plus grand nombre. Récolter plus de points. Et vendre plus de disques… « Nouvelle emprise injustifiée » de l’anglais, peste Henry Landroit, qui estime que si les paroles sont importantes dans le cadre de ce concours, les organisateurs et organisatrices n’ont qu’à utiliser les technologies actuelles pour sous-titrer les performances.
Aujourd’hui, Henry Landroit tient un carnet sur la toile. Cette défense du français s’y manifeste parfois comme tout récemment où il a annoncé, qu’en termes de programmation, la RTBF allait inverser la vapeur dans la proportion des titres intégrés dans les listes de diffusion. Désormais ce sera 90% de titres en français et 8% de titres en anglais (le reste se répartissant les 2%). « Je suppose que je n’y suis pas pour rien », écrit l’auteur. Et pour cause… D’un avis comme celui-là, l’opérateur public ne pouvait s’en fiche, surtout un 1er avril.
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