Crèche et école

Murielle, maman de Romain,14 ans : « Juste le minimum »
Qui peut le plus peut le moins, voilà qui résume bien mon garçon. Pour lui, les règles sont claires : « Un peu plus de 50 % et je passe. Tranquille ». Dès lors, pourquoi se battre pour avoir plus ? Ce n’est pas de la paresse, il vise juste le minimum pour être dans les clous. C’est rageant parce qu’il est plutôt brillant. Il se gâche. C’est un mauvais pari puisqu’il se repose sur ses acquis. Donc, d’année en année, les notes ne suivent plus. Un de ses professeurs lui a dit récemment que s’il continuait comme ça, il finirait par doubler. Croyez-vous que ça puisse servir d’électrochoc ? Bien sûr que non… »
► Qu’est-ce que vous pouvez faire ?
Philippe Orban, professeur de langues, coordinateur du 1er degré et coordinateur régional du Brabant wallon chez Échec à l’échec
14 ans, je connais bien, c’est pile l’âge de mes élèves. En effet, comme Romain, ils se disent : « 50-60 %, génial, je passe au niveau suivant ». Ils sont contents. Mais c’est un pari risqué. La dégringolade n’est jamais loin. Ils doivent s’octroyer une marge de sécurité supplémentaire. Ce qu’il faut répéter aux élèves, c’est d’être mentalement prêts à travailler, sinon ils finissent par se casser la figure. Étudier, ça ne se fait pas comme ça. Souvent plus chez les garçons que chez les filles, d’ailleurs. Le rôle du parent va donc consister à être vigilant et réinsuffler un peu d’envie.
La loi du moindre effort
► Sans culpabiliser les parents, le problème aussi, c’est que beaucoup d’entre eux se satisfont du 50 %. Ce qui participe beaucoup à la loi du moindre effort. Il ne faut pas s’arrêter qu’aux quotas. Essayez toujours de voir au-delà des résultats et expliquez-le à vos enfants. « Bon, c’est bien, tu as la moyenne partout, mais tu es tout juste en maths. Il va falloir faire gaffe ». Faites leur prendre conscience en expliquant que la plupart des élèves qui font le pari de viser juste la moyenne finissent tôt ou tard avec des notes insuffisantes.
► Tout l’enjeu consiste, non pas à les mettre au travail, mais à juste les faire travailler un peu plus. Rappelez-leur que l’intelligence, ça s’entretient au quotidien. Utilisez des images, peut-être ? Un footballeur qui fait cent jongles, par exemple, n’arrive pas à un tel résultat sans entraînement. C’est quoi l’entraînement pour un môme ? Travailler dans sa chambre pendant des heures ? Non. C’est écouter la radio en néerlandais, relire ses cours, parler de ce que l’on a appris en famille. C’est comme ça qu’on se muscle.
Dix minutes seulement
► Je dis toujours à mes élèves d’ouvrir le journal de classe quand ils rentrent. Dix minutes, pas plus. L’objectif consiste à se remémorer la journée. « Ah oui, c’est vrai, en maths, on a vu ça. En anglais, j’ai appris à structurer les phrases de cette façon ». C’est une manière de faire le point. Mais aussi d’imprimer toutes les infos acquises durant la journée. Le mieux, c’est encore de raconter ce qu’il s’est passé pendant l’école à ses parents. On s’assied ensemble pendant que le souper se prépare. Et on déroule. Je le répète encore une fois : dix minutes, c’est tout. Vos petits se libèrent l’esprit. Mieux encore, pratiquez ce petit exercice au quotidien, ancrez-le petit à petit et laissez ou poussez (au choix) votre enfant à faire un peu de ce sport. Voici les clés d’une soirée réussie et d’une nuit apaisée. Il s’agit juste d’une petite gymnastique à mettre en place. Ce n’est vraiment pas grand-chose.
Rien de mieux pour motiver votre enfant que d’opter pour des activités hybrides. Votre petit est dans le cas de Romain, partisan du moindre effort ? Inutile de le coller dans un stage de remise à niveau pendant les prochaines vacances, ça ne changerait en rien sa vision du travail. Bousculez ses limites avec des stages qui mixent les activités, du type sport et informatique. L’idée est que votre enfant mêle aspect ludique et pédagogique. Un esprit sain dans un corps sain. N’oubliez pas que vos enfants ont besoin de se dépenser pour apprendre. On ne cessera de le répéter : aérez-les, c’est in-dis-pen-sable.
Yves-Marie Vilain-Lepage
Zoom
Le mot qui fait peur : la réorientation
Ouuuuuh, le vilain spectre de la réorientation qui plane au-dessus de chaque carrière scolaire. Il fiche la frousse aux parents et il terrorise les élèves. Pour Philippe Orban, la question se joue à un autre niveau. « On réoriente trop tôt chez nous. Sous prétexte du projet de l’élève. Ce qui est insensé. À 12-13 ans, le seul objectif, c’est de passer dans la classe supérieure. On dirige alors l’élève vers une option plus technique. Sur dix élèves réorientés, seul un est vraiment maître de son choix ».
Il existe un recours qui permet de contester la décision du conseil de classe. Une façon de reformuler le vœu de l’enfant. Quoi qu’il en soit, avant de décider brutalement quoi que ce soit, veillez à bien vous informer sur les orientations possibles, ainsi que sur les envies et les choix de votre petit en l’interrogeant sur ses goûts ou ses aspirations.