Grossesse
PRETS POUR LE JOUR J ?
Une césarienne annoncée à l’avance ne se vit pas comme une césarienne pratiquée en urgence. Quoi qu’il en soit, sages-femmes, gynécologues, anesthésistes, pédiatres… font le maximum pour que l’accouchement reste un bel événement dans le cœur de la maman (et du papa aussi).
À partir de sa pratique, Rita De Bock, sage-femme et ancienne responsable de la salle de naissances de la maternité Delta (CHIREC) à Bruxelles, nous livre quelques éléments bons à garder en tête ou dans un coin de sa tête (un accouchement reste un événement imprévisible), sans s’angoisser inutilement.
Le débriefing a du bon, toujours
Contrairement à ce qu’on pourrait penser, la césarienne n’est pas une intervention banale, mais un acte chirurgical lourd. Une incision dans la paroi abdominale, ce n’est pas rien… Si la césarienne est pratiquée, c’est d’abord pour des raisons médicales, pour la santé de la maman ou/et du bébé. Actuellement, en Belgique, une naissance sur cinq se fait par césarienne, avec des différences importantes entre les hôpitaux.
Certaines femmes, bien préparées au fait qu’elles vont donner naissance par césarienne, voient cette intervention comme une mise au monde sécurisante de leur bébé. D’autres se sentent coupables, déçues, tristes de ne pas pouvoir accoucher naturellement. Beaucoup ont peur de l’opération. Toutes doivent faire le deuil de leur projet de naissance rêvé. Si, pour vous, une césarienne est programmée, n’hésitez pas à poser vos questions aux médecins et sages-femmes, à partager vos inquiétudes et vos ressentis. À visiter la salle de césarienne aussi (c’est prévu dans certains hôpitaux). Après l’intervention (programmée ou pratiquée en urgence), un débriefing avec l’équipe soignante est toujours précieux : « Pour remonter le fil des événements », insiste Rita De Bock, autrement dit pour bien comprendre ce qui s’est passé, pour que vos questions ne restent pas sans réponses, pour que la césarienne fasse vraiment sens pour vous. On le répète, vivre une césarienne peut être une situation stressante pour un couple, aussi préparé soit-il. Et ce n’est pas parce que tout finit super bien qu’on n’a pas besoin après coup d’explications. Parfois, c’est grâce à une aide psychologique qu’on trouve finalement l’apaisement…
La femme, actrice de son accouchement
Si, dans un passé pas si lointain, on assimilait la césarienne à une mise au monde passive du bébé, aujourd’hui, dans beaucoup d’hôpitaux, les équipes soignantes veillent à ce que les femmes soient le plus possible actrices de leur accouchement.
Il est rare que la maman soit sous anesthésie générale, et donc complètement endormie. La plupart du temps, l’anesthésie pratiquée (péridurale ou rachidienne) lui permet de vivre pleinement la naissance. Avec le papa à ses côtés, le plus souvent. Dès qu’il naît, le bébé est accueilli comme s’il avait vu le jour en salle de naissances. Il est déposé sur le torse nu de sa maman ; avec ses mains libres, elle peut le prendre. Quelquefois même, c’est en salle de césarienne qu’il va téter pour la première fois. Parfois, le papa coupe le cordon. Pendant que des soins sont prodigués à la maman, il peut prendre le relais du contact peau à peau avec son bébé.
L’accouchement par césarienne est un champ en pleine évolution. De nouvelles pratiques voient le jour, dans certains hôpitaux et avec certains médecins. Elles visent à permettre à la maman de participer à la sortie du bébé de son utérus. Voir le ventre maternel incisé est impressionnant : une discussion préalable avec les parents s’impose. Le contrôle « asepsie » est aussi primordial. D’énormes progrès sont réalisés par ailleurs. Ainsi, la qualité de l’anesthésie a un effet bénéfique sur le confort de la maman : après l’opération, elle peut plus vite se lever, se nourrir… Sa douleur physique dans les heures et les jours qui suivent la césarienne (avec cette cicatrice qui tire…) est aussi mieux prise en compte. Et soulagée par des antidouleurs appropriés.
On l’a évoqué, le maximum est fait pour que, dans les deux heures qui suivent la césarienne, le bébé soit mis au sein. Comme lors de tout accouchement… Sachez-le, la césarienne n’est pas une contre-indication si la maman a le projet d’allaiter son bébé. Seule difficulté : qu’elle trouve, au cours des premiers temps, une position qui n’est pas trop inconfortable pour elle et qui la préserve de la douleur. Mais les sages-femmes sont là pour l’accompagner au mieux dans son nouveau rôle.
ZOOM
Quand l’accouchement est difficile…
Lorsqu’on apprend que l’accouchement présentera des risques, on s’y prépare comme on peut, en s’informant et, parfois, en imaginant le pire.
« Mais lorsque l’accouchement se passe difficilement et dans la surprise pour tous, la tête n’est pas prête à assimiler ce que le corps vit comme par effraction, explique la psychologue clinicienne Reine Vander Linden. Non seulement il faut faire le deuil du film qu’on s’est fait de la manière dont on rêve d’accueillir son bébé, mais il faut aussi digérer toutes les images traumatiques qui s’imposent à soi : visages crispés ou inquiets des professionnels, agitation de tous, idées de mort, "sensation de partir", impression que ce qui arrive est de sa faute, douleurs, vision du sang, impression d’arrachement de son bébé…
La brutalité avec laquelle ces images font effraction dans la tête ne permet pas de les métaboliser. Elles reviennent en boucle sans qu’on ne puisse les effacer. Elles envahissent l’espace qu’on voudrait protéger autour de son bébé. Elles entraînent de la colère, de la déception, de la tristesse, de la dépression, parfois de la honte. Et ce, malgré des moments où, après tout ce stress, on se sent bien avec son petit dans les bras. Le conjoint n’échappe pas aux effets de ces images traumatiques.
L’entourage pousse souvent à "oublier", à tourner la page : "Regarde, tout va bien, le bébé est en forme, n’y pense plus." Soi-même, on veut sortir ça de sa tête, regarder devant soi et ne pas encombrer son bébé, son partenaire avec ces sombres rappels du passé. Pourtant, partager cet événement avec d’autres – son partenaire, sa mère, un professionnel… – permettra de s’en construire le récit et d’en reprendre un peu le contrôle. Son impact émotionnel se diluera petit à petit parce que, justement, on en parlera à autrui. »
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