Développement de l'enfant

Depuis que votre poussin a fait sa rentrée « chez les grands », sous vos yeux incrédules, la métamorphose s’est opérée : votre bébé est devenu·e un·e ado ! Modus operandi pour éviter de se faire éjecter du game…
La rentrée en secondaire bouscule de nombreuses habitudes et se télescope généralement avec l’entrée dans l’adolescence. Caramba ! Le changement sur votre enfant peut être déroutant. L’enjeu de la période est néanmoins essentiel : réussir à garder le lien. « Il faut se souvenir que le plus important, c’est la relation, soutient Patrick Gros, coach scolaire et parental (académie des HP). Il y a tellement de pièges dans lesquels peuvent tomber les parents par rapport à la scolarité qu’ils peuvent l’oublier ».
Alors comment éviter de dégringoler du statut de l’être adulé à celui de vieux c** en un claquement de doigts ? On vous livre la base.
► Je joue les back up
Ne pensez pas que votre enfant peut se débrouiller seul. « Il faut rester conscient qu’au niveau du travail, c’est un gros changement, explique Gabrielle de Patoul, psychologue spécialisée en neuropsychologie, qui travaille dans plusieurs écoles. À 12 ans, ils/elles n’ont pas encore la maturité pour être autonomes. L’enfant ado a encore besoin de ses parents, notamment au niveau organisationnel. Il ne faut pas faire ses devoirs avec lui, mais lui montrer qu’on est derrière ».
C’est le cas notamment en vérifiant la bonne tenue du journal de classe : « C’est très différent des primaires (ndlr : où la titulaire dit ce qu’il faut écrire dedans), beaucoup d’élèves ont besoin d’un coup de pouce à ce niveau-là ». L’idée est de vérifier que les devoirs et leçons y soient bien notés et que ses cours soient en ordre.
Mais aussi que la méthodologie soit la bonne : « Certains enfants ont appris en primaire qu’en relisant leur feuille deux minutes, c’était bon, explique Patrick Gros. En secondaire, la matière grandit et se diversifie et l’interro a parfois lieu un ou deux mois plus tard. Certains se disent qu’en relisant leur feuille vingt minutes, soit dix fois plus longtemps, ça marchera. C’est logique, mais la méthode a ses limites. D’autres vérifient juste s’ils comprennent la matière sans la retenir. Ce qu’il faut, c’est s’entraîner à une vraie restitution : savoir formuler, être structuré et complet dans ce qu’on explique ». Or, le meilleur moyen, c’est de transmettre. Demandez alors à votre enfant de vous expliquer la matière comme si vous étiez un élève.
► Je suis présent, pas omniprésent
Les parents faisant appel aux services d’un·e coach scolaire font généralement partie de deux extrêmes : d’un côté, ceux qui s’en foutent et ne se mêlent pas des affaires scolaires ; à l’opposé, ceux sans cesse sur le dos de leur enfant. « Les deux comportements sont nocifs », affirme Patrick Gros.
Le problème du parent omniprésent vient de la nature des échanges. « Leurs seules interactions ne concernent plus que l’école : ‘Tu as fait tes devoirs ?’, ‘Tu connais ta leçon ?’, ‘Combien as-tu eu à l’interro de maths ?’. Ce qui devient insupportable et peut sérieusement entacher la relation ».
Tandis que le parent qui laisse toute l’autonomie la laisse souvent de façon conditionnelle. « Jusqu’à ce qu’il y ait un problème, comme un premier bulletin, mentionne Patrick Gros. La réaction est souvent forte et le message envoyé est le suivant : ‘Je te fiche la paix quand tout va bien’. Mais le corolaire, c’est qu’ensuite, si le parent est présent, c’est une forme de remontrance ». Ce qui peut amener l’élève à refuser de parler de l’école et faire semblant que tout va bien.
N’oubliez pas que l’école est un endroit où l’on apprend, on a donc droit à l’erreur. « Ce n’est pas compliqué de remonter une pète ! Le bon équilibre, c’est votre relation : si votre enfant peut tout vous dire, vous êtes dans le bon ».
► Je retire la casquette de super héros
Exit l’adulte qui sait mieux et qui a tout compris. « On peut admettre que soi-même, on a eu des problèmes au même âge, explique Patrick Gros. Pourtant, ce ne sont pas des choses que les parents disent. Ils loupent la case du problème partagé. L’enfant vit alors dans un monde où il est difficile de parler d’une faiblesse ‘qu’il ne devrait pas avoir’ ».
Rappelez-vous que vous faites partie de la même équipe que votre enfant. « Si on est tout le temps sur le dos de son enfant ou qu’on impose l’image d’un amour conditionnel, on ajoute une dose de stress supplémentaire au lieu d’alléger son fardeau. Beaucoup de parents oublient ce qu’étaient l’école et être ado… ».
► Je donne du sens
Croire qu’il suffit d’expliquer à son enfant qu’il doit étudier pour avoir un bon métier plus tard est un leurre. « Pour motiver son enfant, il doit comprendre à quoi ça sert. Mais pas dans dix ans, ni même dans trois mois : maintenant, affirme Patrick Gros. Les parents ont un rôle important à jouer : si l’enfant comprend que s’il fait ses devoirs rapidement, il a le reste de la soirée pour lui, il va les faire ; si le parent en profite pour lui demander de l’aide ‘parce qu’il a fini’, il aura tendance à repousser… ». Terriblement humain, non ?

► Je reste vigilant face aux changements de comportement
À l’adolescence, la place de confident revient aux ami·es, c’est donc plus compliqué pour les parents de se rendre compte si cela ne se passe pas bien. Certains signes peuvent alerter. « Un enfant qui change complètement d’attitude très rapidement est inquiétant, explique Gabrielle de Patoul. C’est normal qu’un ado soit plus fatigué, plus nonchalant, mais si ce comportement est excessif, si vous ne reconnaissez plus votre enfant, qu’il se renferme sur lui-même, cela doit vous alerter ».
D’autres points d’attention peuvent apparaître. « Votre enfant semble anxieux à l’idée de ses points ou d’aller à l’école ? Est-ce qu’il vomit avant d’aller à l’école ? Est-ce qu’il fait des insomnies ? Est-ce qu’il ne mange plus ? Ce sont autant de signes qui montrent qu’un enfant doit pouvoir dire les choses ».
Si un enfant subit du harcèlement, ce type de comportements pourrait apparaître. La psychologue conseille de faire attention au téléphone : « On réalise qu’avec le harcèlement sur les réseaux sociaux, le harcèlement est devenu contagieux. Il peut toucher d’autres sphères que l’école, comme les groupes extra-scolaires ». Rappelez à votre enfant que s’il subit du harcèlement ou s’il en est témoin, il doit vous en parler, même s’il reçoit des menaces. « L’idée n’est pas que le parent s’en mêle et règle le problème, mais de collaborer avec l’école. Il faut être hyper vigilant et éviter que l’enfant ne soit encore plus harcelé par la suite ». Les captures d’écran permettent d’avoir les preuves de ce qu’on avance.
► Je régule l’usage du gsm
Il est important de mettre des règles en place (et de donner l’exemple). « Pour le sommeil, on conseille d’éviter les écrans une heure avant d’aller dormir et de ne pas avoir de téléphone dans la chambre, explique Gabrielle de Patoul. De nombreux élèves arrivent crevés à l’école parce qu’ils jouent ou parlent sur leur téléphone toute la nuit ».
Idem pendant les devoirs : on retire le gsm. Quid s’il faut poser une question aux autres élèves ? « On lui laisse poser sa question et on récupère le téléphone ». La psychologue remarque que de nombreux élèves sont connectés tout le temps : « On voit de plus en plus de jeunes avec des montres connectées. Quand le parent achète cet outil, il pousse l’enfant à l’utiliser. Il faut être conscient du risque qu’on prend ».
Le contrôle parental devient compliqué avec des ados plus indépendant·es. D’autant que certain·es parviennent à le faire sauter. « L’idéal est de responsabiliser l’enfant pour qu’il n’ait pas besoin de contrôle parental, mais cela dépend de chaque enfant ».
► Je donne mon avis sans m’énerver
Le nouveau look de votre ado vous déplaît ? Plutôt que d’ordonner d’aller se changer, faites preuve de souplesse. « L’ado se cherche, c’est normal, il faut pouvoir respecter cela, rassure la psychologue, mais vous pouvez lui rappeler certaines règles : on ne va pas à un enterrement en pantalon baggy, on ne porte pas un crop-top quand il fait -15°C dehors ».
Il est important de laisser son ado s’exprimer, néanmoins vous pouvez lui mentionner que vous ne le comprenez pas. « Si la communication est devenue trop difficile, parce que vos points de vue sont trop différents, il ne faut pas hésiter à voir un tiers. Même pour deux-trois séances ».
POUR ALLER + LOIN
Un travail d’équilibriste
Dans son dernier ouvrage, La Génération de Verre (Mardaga), Bruno Humbeeck résume bien les quatre attitudes fondamentales à adopter par le parent pour traverser la crise de la métamorphose adolescente de son enfant :
- Être disponible sans être envahissantꞏe
- Partager l’anxiété en restaurant la confiance
- Être intéresséꞏe par tout ce que vit l’adolescent sans paraître intrusifꞏve
- Être tolérantꞏe sans se révéler permissifꞏve
À LIRE
« Apprendre, ça s’apprend ». Motiver son enfant et l’aider à garder le cap aussi. Pour cela la lecture - en duo - du livret Destination collège ! Le guide pour réussir (Auzou éducation) donne de nombreux conseils, astuces et exercices qui permettent de s’organiser et de devenir autonome.
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