Santé et bien-être

Gare à la tique, d’attaque pour mordre vos chères têtes brunes et blondes au risque de leur refiler des infections. Vite aux abris, avec l’aide de Valérie Obsomer, chercheuse à l’UCL qui connaît bien ces arachnides acariens.
Valérie Obsomer sort de sa mallette un tube dans lequel s’ébattent des tiques de tous les âges. Certaines ont atteint l’âge adulte et ressemblent à celles que vous retrouvez parfois sur votre chien. D’autres plus petites, si petites que vous pourriez les confondre avec un mini-grain de beauté sur la peau, sont au stade de nymphes. D’autres encore, microscopiques, échappent à l’œil, ce sont les larves.
Tout ce joli petit monde (qui se développe allègrement, sans doute grâce au changement climatique et à l’augmentation du gibier) adore mordre les hommes, femmes et enfants qu’il rencontre sur son chemin. Pas de quoi en faire tout un fromage si ce n’est que 10 % de ces tiques sont porteuses d’un pathogène qui provoque la maladie de Lyme dont les symptômes peuvent être tantôt désagréables, tantôt franchement handicapants. Et c’est bien cet impact sur la santé humaine qui mobilise Valérie Obsomer.
Son intuition ? Beaucoup d’adultes et d’enfants présentent des symptômes que la médecine ne sait toujours pas identifier et qui pourraient bien être liés à la maladie de Lyme.
Son objectif ? Rassembler des données pour prouver cette hypothèse. Depuis des années, avec d’autres « chasseurs » de son genre, elle traque la tique, dresse des cartes des zones infestées en Belgique et lance une grande enquête pour approcher au mieux les symptômes ressentis après morsure (Lire les encadrés ci-dessous).
Un mot d’ordre : ne pas se faire mordre !
Rien n’est simple au pays des tiques. Comme l’animal infecté ne se reconnaît pas à sa bonne ou mauvaise mine, mieux vaut tout faire pour ne pas se faire mordre. Plus facile à dire qu’à faire ! D’autant plus que la tique qui nous occupe appartient à deux espèces différentes.
La première, l’Ixodes ricinus pour les savants, vous guette, perchée sur des herbes hautes, des fougères, des branches d’arbre basses, des souches, mais aussi tapie dans le tapis de feuilles mortes, la végétation des dunes, les prairies humides et les haies du jardin. Vous la croyez repue ? Elle se prépare à faire des réserves. Larve sur un hôte qui peut être une souris aussi bien qu’une vache, un chien, un chat ou un humain sur lequel elle a pris sa dose de sang, elle se laisse tomber sur un nouvel hôte et se transforme en nymphe. Et ainsi de suite…
La seconde, Ixodes hexagonus, se niche dans des terriers ou des nids comme ceux du hérisson, ouverts en surface dans les jardins. Elle passe également par les trois stades mais est particulièrement infectée au stade de larve.
Aucune de nos belles provinces n’échappe à la tique. Certaines régions en sont particulièrement infestées : Viroinval, Marche-en-Famenne, Arlon, Grez-Doiceau, Lille et, côté flamand, Kapellen, Peer et Zonhoven.
Comment s’en protéger ?
On peut interdire aux scouts de traverser les étendues de fougères, aux plus jeunes de fourrager dans les feuilles mortes, on peut… mais ça ne suffit pas. La tique est retorse. Elle prend souvent son temps avant de mordre, peut se déplacer pendant près d’une heure sous les vêtements avant de planter ses petits crocs dans la chair, histoire de trouver l’endroit chaud et humide qu’elle aime par-dessus tout.
Cheveux, cou, aisselles, aine, arrière du genou, dos, arrière des oreilles, nombril, entre les fesses, parties génitales… les lieux sont multiples et souvent difficilement accessibles. Difficile d’imaginer qu’après chaque sortie dans la nature, on passe au peigne fin chacun de ses gosses… et soi-même !
Les campagnes de santé publique annoncent qu’il faut enlever la tique dans les douze heures et que si vous n’avez pas une tache à l’endroit de la morsure, tout va bien. Mais cette règle est d’ordre statistique et sans vouloir propager la panique dans les foyers, le Ligueur, suivant les bons conseils de Valérie Obsomer, vous propose d’inspecter vos enfants dans les quatre heures.
Si vous avez la chance de dénicher la tique, utilisez une pince spéciale vendue en pharmacie et n’employez surtout pas d’éther ou d’eau oxygénée. C’est la seule manière d’éviter que la bête régurgite sa salive dans la blessure et contamine ainsi sa victime.
Comment savoir si la morsure est infectée ?
Tout est complexe avec la tique. Sa morsure est discrète, indolore et peut passer totalement inaperçue. Mais lorsqu’elle est infectée par le pathogène responsable de la maladie de Lyme, elle présente dans 65 % des cas une tache qui s’étend et qui est généralement (mais pas toujours !) plus claire en son centre. Cette tache s’appelle un érythème migrant (Il est possible de faire un test sanguin, mais au moment où la tache apparaît, il est souvent négatif car les anticorps ne sont pas encore présents dans le sang).
Et les 35% restant ? Ces personnes mordues ne présentent jamais de tache mais ressentent par contre des maux de dos, des pertes de mémoire, de la fatigue et autres symptômes difficiles à diagnostiquer.
Dès que la tache apparaît sur le corps de votre môme, n’hésitez pas à l’emmener chez le médecin qui, après diagnostic, lui prescrira un antibiotique à prendre durant un certain nombre de semaines. Attention : l’univers des tiques réserve plein de surprises. En effet, la tache peut, même sans traitement, disparaître comme elle est venue, pendant que les bactéries continuent à se disséminer dans le corps et causer, parfois dix ans après, d’autres maux.
M. K.
Bon à savoir
Les symptômes de la maladie de Lyme
- Fatigue : chronique, troubles du sommeil, vertiges.
- Douleurs ou raideurs : des articulations, du dos, du cou, engourdissement, picotement, sensations de brûlures, douleurs inexpliquées dans le ventre, dans le thorax, à la mâchoire et aux dents, à la plante des pieds, dans les parties génitales…
- Mental : confusion, difficulté à se concentrer, perte de libido, manque d’attention, erreurs de mots, irritabilité, anxiété, désorientation…
- Autres : suées nocturnes, fièvre, sensibilité à la lumière et aux sons, toux chronique, vision double avec flotteurs, maux de gorge fréquents, irrégularité des menstruations, problèmes d’érection…
Ces symptômes seraient deux fois plus fréquents chez les personnes diagnostiquées que chez celles mordues mais non diagnostiquées. Il n’en reste pas moins qu’ils sont suffisamment « généraux » pour pouvoir être attribués à d’autres maux que la maladie de Lyme. Emmenez votre enfant chez le pédiatre avant de vous faire un (mauvais !) film.