Développement de l'enfant

Bébé pleure la nuit, je fais quoi ?

La scène n’a rien d’exceptionnel. Votre petit bout a 6 mois, 9 mois, 1 an ou un peu plus, et ses nuits - par conséquent, les vôtres aussi – (re)deviennent difficiles. Faut-il laisser pleurer son bébé la nuit ? La question est complexe.

Pour beaucoup de parents, les pleurs de leur bébé - son principal moyen de communication - sont insupportables. C’est surtout vrai les premiers mois de la vie. C’est encore vrai après. « Les parents ont besoin d’avoir une cause valable aux pleurs de leur bébé, cela les rassure énormément. Et, souvent, quand ils ne comprennent pas l’origine de ces pleurs, ils paniquent et c’est forcément grave », observe Emmanuelle Kadz, pédiatre aux Hôpitaux Iris Sud (site Etterbeek-Ixelles), à Bruxelles.

Alors, beaucoup de parents s’interrogent : laisser pleurer ou pas le bébé la nuit ? « Impossible de répondre à cette question sans considérer l’âge de l’enfant et le contexte. Je n’aurai pas la même réponse avec un enfant de 0 à 3 mois et un autre de 9 à 15 mois. Il est clair aussi qu’une maladie ou un brusque changement de rythme doivent être pris en compte », assure Emmanuelle Kadz.

Une histoire n’est pas l’autre

Prenons les pleurs dans les tout premiers mois de la vie. « Il n’y a aucune vertu éducative à laisser pleurer un enfant de moins de 3 mois. Si ses parents peuvent apaiser ses pleurs en le prenant dans les bras, qu’ils le fassent ! », illustre la pédiatre. Pour un si petit bébé, savoir que chaque fois qu’il appelle à l’aide, il reçoit une réponse appropriée, ça construit sa sécurité - il sent qu’il peut compter sur ses parents - et ça l’amène progressivement à être autonome, à se calmer par lui-même. Materner, rassurer, réconforter sont précieux. Les neurosciences, entre autres, nous l’ont appris.

De même, il ne sert à rien de laisser hurler un bébé des heures dans son lit, qu’il soit tout-petit ou plus grand. Autre « évidence » : certains bébés sont plus difficiles que d’autres, et là (mais pas que), « on fait ce qu’on peut comme parent », rassure Emmanuelle Kadz. Une histoire n’est pas l’autre. Ainsi, certains parents ne laissent pas pleurer leur bébé de peur qu’il ne réveille les éventuels frères et sœurs ou les voisins. À noter, enfin : le sommeil des enfants est une affaire éminemment culturelle. Dans de nombreux pays à travers le monde, les enfants ne dorment pas seuls jusqu’à 5-6 ans et les parents interviennent chaque fois qu’ils pleurent.

Le réflexe biberon ?

Alors, quand un bébé de 6 mois, 9 mois ou 1 an se réveille et pleure plusieurs fois par nuit et plusieurs nuits d’affilée, comment réagir ? Tout dépend de ce qu’on supporte en tant que parent, pourrions-nous dire en résumé. Voyons cela de près.

Un des réflexes des parents est de proposer un biberon à l’enfant. « Les parents croient que l’enfant le boit parce qu’il en a besoin pour ‘survivre’ et qu’il a faim. Or, la plupart du temps, c’est faux. Souvent, ce biberon est donné parce que les parents sont fatigués, qu’ils n’en peuvent plus et qu’effectivement, donner un biberon, c’est facile ! », soutient Emmanuelle Kadz.

Et la pédiatre de développer : « Lorsque des parents m’expliquent que, la nuit, leur (grand) bébé reçoit encore un biberon, je leur demande si cela leur convient. S’ils répondent oui, pas de souci ! Qui suis-je pour leur enlever ce plaisir ? Du moment que l’enfant dort en sécurité, sur le dos. Plus globalement, si les parents sont heureux d’avoir, la nuit, des moments privilégiés avec leur bébé, qu’ils le vivent bien et que l’enfant finit par être autonome pour trouver et retrouver le sommeil, je n’y vois aucun inconvénient. Mais, trop de parents se transforment en esclaves de leur enfant et fracassent leurs nuits - et leur couple - sous prétexte qu’ils veulent lui offrir le meilleur et parce qu’ils vivent chacun de ses pleurs, chacune de ses frustrations comme insoutenables. Ces parents se retrouvent épuisés, et parce qu’ils sont épuisés, ils tolèrent de moins en moins de choses avec le temps. Ce n’est pas pour rien qu’on parle tant de burn-out parental. Ce qui importe, c’est vraiment que la triade papa-maman-bébé aille bien ».

Il faut que les parents épuisés, qui sentent une détresse dans les pleurs de leur petit, puissent se permettre de le laisser pleurer après s’être assurés que tout va bien et après l’avoir rassuré, en lui disant qu’ils sont là, tout près, et qu’il est temps de dormir. En même temps, si l’enfant se réveille à 5h du mat’, il est tout à fait possible qu’il ait déjà faim. Si c’est le cas, il ne poursuivra sa nuit jusqu’à une heure plus raisonnable que si on le nourrit. Affaire de bon sens ! « Ce qui m’interpelle, répète Emmanuelle Kadz, c’est le bébé qui s’est endormi vers 19h, se réveille à minuit, puis à 3h et qui, à chaque fois, reçoit 200 millilitres de lait, alors que sa courbe de poids va déjà bien au-delà de la normale ».

À chaque parent son seuil de tolérance

Oui, un cas n’est pas l’autre. « Mon discours contient toujours cette idée : on fait ce qu’on peut en tant que parent, dans le contexte qui est le sien. En fait, il y a peu de science dans le domaine de la parentalité. Ce qui vaut pour les uns ne vaut pas forcément pour les autres. Il s’agit surtout de bon sens », explique la pédiatre.

Ainsi, chaque parent a son seuil de tolérance par rapport aux pleurs de son enfant. « Si vous reconnaissez que votre seuil est bas, essayez peut-être de le revoir peu à peu à la hausse. Apprenez que les pleurs de votre bébé ne renvoient pas automatiquement à quelque chose de grave. Sachez qu’il est normal de ne pas tout comprendre de son enfant, cela fait partie des charmes de l’aventure parentale. Et, surtout, parlez de tout cela au sein de votre couple, entre parents. Parce que si l’un lutte pour que l’enfant soit autonome pour son sommeil et que l’autre casse de tels efforts, cela ne marchera pas. C’est vraiment un temps où il faut faire équipe. Ce qui est sûr aussi, c’est qu’à partir du moment où les nuits chahutées de votre bébé commencent à vous pourrir la vie, il faut agir. Il faut en parler avec des professionnels et essayer de trouver une solution ».

La règle des 5-10-15 minutes

La pédiatre française Marie Thirion, auteure avec Marie-Josèphe Challamel du best-seller Le sommeil, le rêve et l’enfant (Albin Michel), écrit, dans le chapitre consacré à l’itinéraire-sommeil des 6 à 8 premiers mois de la vie : « C’est dans cette période (ndlr : au-delà de 6 mois) où les rythmes profonds s’organisent et où le bébé participe mieux à son environnement qu’il apprendra le plus facilement à dormir seul, dans son lit, sans ses parents. Au-delà, l’apprentissage serait plus problématique ».

Emmanuelle Kadz est « d’accord à 1 000 % ». D’où l’intérêt du petit rituel du soir : éviter trop de stimulations, parler au bébé (« Tu vas aller au bain, puis tu vas aller au lit, tu vas faire dodo et, demain, on se retrouve… Je t’aime »), lui offrir un moment-tendresse (des câlins, une berceuse, avec le doudou qui sécurise). Il s’agit ensuite d’endormir l’enfant dans les mêmes conditions que celles dans lesquelles il risque de se réveiller en pleine nuit. « Important aussi : féliciter l’enfant. Quand il a dormi six heures d’affilée, le lendemain, on le bénit : ‘Tu as été top’. Cela va lui donner de la confiance ».

Si, malgré ce rituel d’endormissement, l’enfant qui a environ 12 mois ou plus s’est habitué à se réveiller plusieurs fois pendant la nuit et à pleurer, on applique la règle des 5-10-15 minutes, inspirée des conseils de la pédiatre Marie Thirion. C’est-à-dire aller rassurer l’enfant dans son lit (éventuellement en posant une main sur lui) sans le prendre dans les bras, en espaçant de plus en plus ses interventions. « C’est une vieille règle, mais elle me parle parce qu’elle a fait ses preuves », dit Emmanuelle Kadz.

Le bon sommeil du bébé et celui de ses parents, ce sont les fondements du bien-être de chacun. « J’ai vu des couples au bord du gouffre parce que leur bébé ne faisait plus ses nuits. Dès qu’il s’est remis à bien dormir, ça leur a changé la vie ».

 

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