Développement de l'enfant

Elle est É-NOR-ME, la responsabilité que vous avez à l’égard de votre bébé, tout vulnérable et complètement dépendant de vous : vous n’en avez jamais eu de semblable ! Cette responsabilité, vous la perceviez peut-être déjà avant sa naissance. Mais là, vous vous surprenez à la mettre en parallèle avec celle que vos propres parents ont eue à votre égard. Voilà un nouveau terrain d’échanges possibles entre vous et la génération du dessus…
Ça tiraille en vous : par exemple, votre propre mère est toute proche, toute présente, toute disponible, mais elle ne l’est pas exactement comme vous le souhaiteriez. Ou elle vous inonde de conseils, alors que vous, vous avez plutôt envie de lui parler de ce que vous vivez et ressentez, et qu’elle vous écoute, tout simplement.
« C’est génial de devenir parent, mais ce n’est pas facile tout le temps. Et c’est plus simple de dire ce qu’on ressent en vrai (par exemple, que je suis fatiguée) à ses parents ou à ses beaux-parents qu’à n’importe qui d’autre », note Stéphanie. Paroles de jeune maman inattendues ? « Les mamans et les papas satisfaits des liens avec leurs propres parents sont ceux qui peuvent leur parler des émotions bizarres, nouvelles, surprenantes, difficiles, fortes qui les submergent depuis qu’ils sont parents et ont conscience de l’incroyable responsabilité qui est la leur. C’est ça qui les soutient le plus, observe Reine Vander Linden, psychologue en périnatalité. Si vous êtes en confiance avec votre mère, vous allez pouvoir lui dire "Oh là là, ce bébé m’épuise", vous allez vous donner le droit de vous plaindre auprès d’elle et de lui exprimer, si nécessaire, quelque chose de négatif de votre situation. Bien sûr, vous pouvez aussi vous confier à vos copines s’il y a une grande confiance entre vous. Mais, si elles ont elles-mêmes un bébé, elles vont peut-être reprendre vos paroles à leur compte : "Moi aussi, je suis épuisée", alors que vous n’avez peut-être pas spécialement envie d’entendre un "Moi aussi" et que vous voulez juste entendre "Je te comprends, c’est tellement vrai ce que tu dis". Vous avez besoin d’une attitude de compassion, et les copines ne vont pas l’avoir de la même façon qu’une personne de la génération précédente. »
Revoir le lien à ses propres parents ?
Parents et grands-parents : plus proches ou plus lointains, maintenant que le bébé est là ? « La femme qui a accouché a souvent le rêve de transformer le lien à ses propres parents, explique Reine Vander Linden. Elle se dit : "Peut-être que cela va me rapprocher de ma mère" ou "Peut-être que cela va enfin me permettre de mettre de la distance entre nous". Tout se passe comme si l’enfant lui donnait une permission de revoir ce lien… » Parfois, belle surprise : le lien prend une coloration plus positive. Parfois, c’est la déception : quand les mauvaises relations restent… mauvaises malgré l’arrivée du bébé.
Le fait de savoir que vous pouvez compter sur vos parents, c’est « une bulle de sécurité », « une chance de fou »…
Le fait de savoir que vous pouvez compter sur vos parents, c’est « une bulle de sécurité », « une chance de fou », disent des parents. « "Est-ce que je fais bien ?" J’ai besoin des conseils de ma maman. Elle m’apaise. J’ai aussi beaucoup de soutien de ma sœur. Quand elle voit que je me pose des questions, elle me rassure : "Mais regarde : elle rigole tout le temps, Léa, elle n’a pas d’angoisse, vous êtes bien ensemble" », raconte Jeanne. Quand on vit des doutes ou des peurs, le regard bienveillant et positif des proches est précieux : c’est comme si on changeait d’yeux… Bien sûr, il y a aussi les grands-parents (beaux-parents) qui « font des choses qui énervent » ou qui « se sentent le devoir de tout commenter ».
La « juste » distance, c’est quoi ?
Les grands-parents intrusifs, voilà un sujet omniprésent dans les discussions de jeunes parents. Un sujet complexe. Vous, la maman, ressentez la nécessité d’expérimenter votre nouveau rôle de mère avec votre bébé. En même temps – et c’est ça qui est compliqué –, vous recherchez les conseils de votre propre maman (elle a tous ces gestes en elle, elle les a faits tant de fois), mais vous ne voulez pas les recevoir avant de les demander. Vous ne voulez pas qu’elle réponde à des questions que vous ne vous posez pas encore.
Alors, quelle juste distance entre vous et la génération du dessus ? Quelle juste place pour les grands-parents ? La réponse est difficile, car cette juste distance ou cette juste place est, en fait, variable selon les personnes : « C’est une affaire de représentation dans la tête, insiste Reine Vander Linden : quelle image je me fais de ce que ma mère peut m’apporter dans cette nouvelle situation qui est la mienne, celle d’être moi-même maman ? » Certaines femmes attendent trois coups de fil par jour de leur mère et elles la trouveront à sa juste place. D’autres n’ont pas besoin d’une telle proximité, alors que leur relation à la génération du dessus est tout aussi bonne.
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L’aîné a le droit d’éprouver de la colère
Que se passe-t-il côté fratrie ? Et qui dit fratrie dit situations et colorations variées. En effet, l’aîné peut être un gars de 20 ans qui doit accueillir le nouveau bébé du couple composé par son père et sa belle-mère, comme un enfant de 17 mois dans une famille dite classique. Ce ne sont alors pas tout à fait les mêmes questions qui se posent. « Parce qu’un parent s’inquiète moins de la jalousie éventuelle d’un aîné de 20 ans que de celle d’un aîné de 17 mois, observe la psychologue Reine Vander Linden. Par contre, il peut être anxieux au sujet de la tolérance que peut avoir le grand frère ou la grande sœur (quel que soit son âge) issu(e) d’une précédente union conjugale à l’égard du bébé qui scelle sa nouvelle relation. Cette anxiété, si elle surgit, n’appartient pas à l’enfant, mais au parent. Il est important de la repérer comme telle, parce que l’enfant ne peut pas être porteur du malaise ou de la culpabilité du parent qui s’est remis dans une nouvelle histoire et qui, dans sa tête, ne l’assume peut-être pas complètement. »
Et la psychologue de poursuivre : « L’arrivée d’un nouveau bébé suscite toujours une excitation positive chez un aîné. Le temps passant, des émotions plus compliquées peuvent se déployer. Des pointes de jalousie ou d’agressivité à l’égard du bébé peuvent se manifester. Parce que le bébé reste dans la maison de papa ou de maman alors que lui n’y est pas à temps plein, par exemple. Cette jalousie et cette agressivité font partie de la condition de frère et de sœur. On connaît tous l’histoire de Caïn et Abel. Il suffit souvent de dire à un enfant qu’il a le droit – et qu’il a bien raison – d’éprouver de la colère contre le nouvel "intrus" pour que celle-ci disparaisse. En faire tout un fromage va, au contraire, le titiller et il se dira, à juste titre, qu’il est bien intéressant de l’exprimer. »
LES PARENTS EN PARLENT…
Retour dans le passé
« Devenir parent, ça change la relation à ses propres parents. Rien de radical, ça se fait petit à petit. Au début, devenir parent implique surtout de combler les besoins de son bébé. Alors, on se projette dans le passé quand on était petit. Et les questions viennent naturellement : "Dis, maman, comment tu faisais avec moi quand j’étais bébé ?" La première fois que j’ai laissé Achille chez mes parents, il avait 1 mois et demi. Ça m’a fait du bien d’avoir une soirée pour moi. Ce n’était pas stressant parce que je savais qu’il était en de bonnes mains. »
Hélène, maman d’Achille
Un confort fou
« On parle tout le temps des grands-parents intrusifs mais mes parents ne le sont pas du tout. Les conseils qu’ils me donnent sont plus que bienvenus. Je leur confie Zoé les yeux fermés. J’ai l’impression de leur faire un cadeau quand je la leur laisse. Or, ce sont eux qui me font un cadeau en la prenant. Quand je pense aux parents seuls, aux couples étrangers sans famille ici, je réalise que j’ai un confort fou. Ma maman me dit par exemple : "Si tu veux, je peux venir lundi ou mardi", avant de vite se reprendre : "Si tu veux, je peux venir lundi et mardi". Et moi, j’accepte. »
Claire, maman de Zoé
QUESTION À 10 CENTS
Chez vous, les petits noms donnés aux grands-parents ont-ils fait l’objet de longues discussions, de rudes conflits, de soirées de franche complicité ou ont-ils surgi de façon évidente ?
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