Développement de l'enfant

Comment tuer ce monstre gluant qui hante les rêves de mon enfant ?

Tout le monde rêve et c’est normal. Pareil pour les cauchemars… N’empêche, quand ça arrive à un de nos petits bouts, on se sent parfois désemparé. On voudrait bien les écrabouiller, ces gros monstres imaginaires, et les transformer en pâté pour sauver notre petit de leurs vilaines griffes !

Nous nous étions réhabitués aux nuits complètes et voilà que Théo, 4 ans, se réveille  au milieu de la nuit. Cela nous perturbe allègrement, mais est-ce vraiment nécessaire de venir, chaque fois, à la rescousse du bambin ? « Pas toujours. On a parfois tendance à confondre les cauchemars avec les terreurs nocturnes, et c’est très différent », répond Geneviève François, pédiatre à Saint-Luc.
« Les terreurs nocturnes se passent en début de nuit, à la fin du premier ou du second cycle de sommeil profond, et juste avant d’entrer dans une phase de sommeil paradoxal. Concrètement, l’enfant peut pleurer, crier, s’agiter, avoir les yeux horrifiés, s’asseoir, transpirer… Il a un aspect bizarre, comme un somnambule agité. Son corps bouge, mais son cerveau dort. C’est assez paniquant pour les parents, car ils parviennent difficilement à le consoler. Et au matin, il ne se souvient pas de cet épisode agité de la nuit. Ces terreurs nocturnes sont très fréquentes et pas graves du tout. »
Un bon indice pour reconnaître les terreurs nocturnes, c’est de regarder l’heure. Elles se déroulent au début de la nuit, souvent entre minuit et 1 heure du matin si l’enfant s’est endormi vers 19-20 heures.
Que faire face à ces terreurs ? « Il n’est pas nécessaire d’intervenir puisque l’enfant n’est pas éveillé, nous conseille Geneviève François. Le mieux, c’est de l’apaiser, de remettre sa musique, de le recoucher, de lui faire une petite caresse ou de lui dire deux mots pour l’apaiser. Le réveiller fractionnerait son sommeil, c’est donc à éviter. L’intervention du parent doit être la plus brève possible. »
Il arrive que l’enfant se rendorme tout seul après quelques secondes d’agitation sans rien demander de plus, à la grande surprise des parents.

La boîte à cauchemars

Le cauchemar est aussi une parasomnie, c’est-à-dire quelque chose de bizarre qui se passe pendant le sommeil. C’est un mauvais rêve qui réveille l’enfant tout en remplissant sa mission d’exutoire. C’est-à-dire qu’il est perturbateur et bienfaiteur à la fois. Il permet de ressortir de la violence, des émotions ou des conflits de la journée.
Deux indices permettent de reconnaître le cauchemar : l’heure et l’état d’éveil de l’enfant. Les cauchemars interviennent assez tard dans la nuit, souvent après 4 heures du matin. L’enfant peut pleurer mais, à la différence des terreurs nocturnes, il est bien éveillé et peut raconter son rêve, il peut aussi être consolé. Tenter de raisonner un enfant n’est pas nécessaire et pas forcément utile en pleine nuit.
« Les parents sont parfois trop rationnels. Plutôt que de tenter de convaincre leur enfant que les monstres n’existent pas, ils pourraient jouer du mauvais rêve et dire : ‘Oh, je viens de voir un monstre s’enfuir par la porte quand je suis entré dans ta chambre’, propose Geneviève François. Le parent peut aussi expliquer à son enfant que le rêve et le cauchemar sont utiles. On ne les choisit pas, ils sont parfois bizarres ou comiques parce que des gens qui ne se connaissent pas se retrouvent ensemble dans un lieu inhabituel. Mais même si les cauchemars nous bousculent, ce n’est pas très grave. »
En pleine nuit, entre les peurs et les larmes, le plus efficace reste certainement de prendre votre enfant dans vos bras, de l’écouter, le laisser raconter, expliquer, décrire ou mimer son mauvais rêve. Ça l’aidera certainement à s’endormir plus sereinement.
Si le cauchemar laisse des traces dans les jours qui suivent, « on peut proposer à son enfant de le dessiner pour qu’il l’extériorise, indique Geneviève François. Mais ce n’est pas toujours facile pour les petits à l’âge des gribouillis. Une autre solution que je propose parfois, c’est la boîte qu’on met dans la chambre de l’enfant pour absorber les mauvais rêves. La nuit, il peut y mettre les cauchemars qui l’embête. »

Pour diminuer les cauchemars

« Il faut revaloriser le moment de se coucher, se dire bonsoir, se raconter sa journée. Privilégier un rituel avant d’aller dormir. Ça peut prendre une demi-heure, mais à long terme, c’est très bénéfique pour réduire le nombre de cauchemars et de terreurs nocturnes », nous confie la pédiatre.
Certains parents racontent une histoire à leur bambin, d’autres mettent de la musique, chantent quelques chansons ou prennent le temps de se câliner, à chaque famille de trouver le rituel qui lui convient : « Moi, je raconte aux enfants l’histoire du petit train du sommeil. Le soir, il faut boucler la valise de sa journée avant le voyage. Raconter ses joies, ses peines de la journée avant de prendre le train du sommeil, ça peut être un rituel de fin de journée. »
Autre conseil de la pédiatre, prenez l’habitude de coucher vos enfants en respectant des horaires réguliers en semaine et le week-end. Un enfant de 3-5 ans devrait aller dormir vers 19h30 (20h au plus tard). Surtout s’il se lève tôt. Voilà une bonne habitude à prendre dès à présent, car les troubles du sommeil peuvent aussi avoir des répercussions la journée, et donc à l’école. Un enfant fatigué par une mauvaise nuit sera plus nerveux, parfois irritable et peut même avoir des difficultés à se concentrer.
Si les cauchemars se prolongent ou se répètent, il peut être utile de suivre une thérapie psychologique. Ça ne doit pas être systématique pour tous les enfants, mais c’est une piste à ne pas négliger. La relaxation ou des thérapies comportementales donneraient de bons résultats. Par contre, il faut éviter tout médicament, surtout si vous n’avez pas consulté de médecin. Certains médicaments suppriment les rêves et les cauchemars, mais à la fin du traitement, les cauchemars reviennent en fanfare.



E. W.

À partir de quand cauchemarde-t-on ?

  • On ne peut pas dire à quel âge exactement le nourrisson commence à rêver, ni à quoi il rêve... mais, dans sa première année, les rêves correspondent à une activité cérébrale intense.
  • Vers 1 an, les cauchemars existent déjà. Même s’il ne parle pas encore, l’enfant peut se réveiller paniqué, montrer du doigt un coin de la pièce…
  • De 3 à 6 ans, c’est la période où les cauchemars interpellent le plus les parents. Près d’un enfant sur cinq fait des cauchemars la nuit.
  • C’est entre 6 et 10 ans que les enfants font en général le plus de cauchemars, même si, en grandissant, ils apprennent à les apprivoiser.

À LIRE

Quelques livres pour aider son enfant à s’endormir :

  • Émilie n’arrive pas à s’endormir, A. Duner, Éd. Chantecler.
  • T’choupi ne veut pas se coucher, Th. Courtin, Nathan.
  • Petit ours brun n’a pas sommeil, M. Aubinais et D. Bour, Bayard Presse.
  • Noé n’a pas sommeil, Cl. Clément, Bayard Jeunesse

Cododo : une solution contre les cauchemars ?

Les adeptes du cododo ou du lit familial se demandent peut-être s’il est efficace contre les troubles du sommeil. Lors d’une terreur nocturne, ce n’est pas la peine de prendre votre enfant dans votre lit, puisqu’il dort. Mieux vaut le laisser dormir dans son lit, plutôt que le réveiller en le déplaçant.
Si l’enfant fait des cauchemars, par contre, essayez de le remettre dans son lit dans un premier temps. « En général, je conseille de ne pas commencer la nuit dans le lit des parents. Mais en fin de nuit, c’est tout à fait différent. S’il est 6h du matin, on peut prendre le temps de se câliner et commencer la journée par un moment tut doux ». Le week-end, par exemple, ça fait parfois le plus grand bien. Mais ça ne doit pas être systématique, au risque de perturber le sommeil… des parents !

Des parents en parlent

« Clovis s’est une fois réveillé en pleine nuit. Il pleurait, avait très peur parce qu’un horrible monstre était venu dans sa chambre pour manger ses pieds. Il était terrorisé et ne voulait plus se rendormir dans sa chambre. Cette nuit-là, on l’a pris dans notre lit. Et le lendemain, on lui a offert une peluche dinosaure ‘mangeuse de cauchemars’. Depuis, il passe des nuits paisibles. Pourvu que ça continue. »
Pirro, papa de Clovis, 4 ans

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