Société

« Non, mais tu te rends compte ! Plus de 1 000 boules par mois pour les mensualités. Comment je vais faire, moi ? ». Alors qu’il me dit ça, Gaëtan, jeune papa trentenaire, serre la main de sa gamine de 5 ans qui le regarde avec des yeux de bambi étonné. C’est que son papa n’est pas du genre à se démonter. Une force de la nature, calme et paisible. Que rien n’effraie. Mais là, c’est différent. Il a l’impression de perdre le contrôle. Et ça, ça le stresse, le met en rogne.
Combien de Gaëtan et Gaëtanne au sein de la communauté des parents voient pour l’instant les factures d’énergie flamber comme un brasero devenu dingo ? Des centaines de milliers, car même si certain·es sont encore (un peu) préservé·es de l’impact direct de l’augmentation des factures de gaz et d’électricité, ils et elles subissent, de toute façon, toutes les retombées inflationnistes liées notamment aux coûts de production.
Face à cela, donc, un sentiment d’impuissance qui nourrit ces émotions de base que sont la peur et la colère.
Nous l’avons déjà dit dans nos pages, ces émotions sont saines. Elles nous permettent de conserver un certain équilibre. Ce sont des signaux d’alerte émotionnels qu’il faut prendre en compte, nommer et canaliser. Plus que jamais, la colère, par exemple, doit être prise en considération. Il faut juste l’utiliser à bon escient. Comme levier de changement. Comme énergie nécessaire pour revendiquer, formuler des propositions. Descendre dans la rue s’il le faut. Mais gare aux populismes de gauche et de droite qui jouent avec cette colère, l’instrumentalisent, au point d’en faire des slogans pour vendre des manifs.
Isabelle Filliozat, psychothérapeute déjà lue dans le LIgueur, a cette phrase très juste : « La violence n’est pas colère, elle est l’échec de la colère ». Les parents, d’expérience, connaissent cela. Lorsque la colère n’est pas entendue, discutée, elle risque d’exploser comme une bouteille de propane sous pression.
Avis aux partis politiques, écoutez les familles, prenez en compte leurs peurs et colères, sans les minimiser ou les attiser. Lorsque le simple fait de se chauffer devient source d’angoisse, le sens des responsabilités doit d’autant plus être aiguisé.