Développement de l'enfant

Difficultés à l’école : à quoi sert un centre PMS ?

Face aux troubles de l’apprentissage, aux problèmes de comportement ou d’éducation, les demandes à l’adresse des centres psycho-médico-sociaux (PMS) sont en augmentation. Mais que peuvent faire ces structures méconnues pour les enfants et à quelles conditions ?

Il y a dix ou vingt ans, les professionnel·le·s des centres PMS ne recevaient que peu de demandes de parents pour intervenir dans les classes pour des questions individuelles. Aujourd’hui, la donne a nettement changé. « Les directions des centres PMS observent une médicalisation plus importante des difficultés liées aux troubles de l’apprentissage et à l’éducation de l’enfant », note Sophie De Kuyssche, secrétaire générale de la FCPL (Fédération des centres PMS libres). Elle explique ce recours à des spécialistes de santé ou du paramédical par plusieurs raisons.

« Ces vingt dernières années, les recherches en neurosciences ont beaucoup évolué et pointé des troubles d’apprentissage que l’on connaît mieux. L’enfant qui apprend est dans un continuum, l’enjeu pour l’enseignant·e sera de discerner ce qui relève d’une difficulté ‘classique’ ou d’un réel trouble de l’apprentissage. Dans le doute, de nombreuses demandes sont adressées à nos services. Et puis, l’enfant fait l’objet d’une plus grande attention qu’auparavant, il en résulte une plus grande préoccupation des enseignant·e·s également. Ils peuvent se montrer davantage inquiets quant à l’évolution d’un enfant et solliciter un avis. »

Nathalie Steimes, directrice du centre PMS libre de Huy, confirme la tendance à la hausse des demandes. « Nous travaillons principalement avec l’enseignement fondamental et nous sommes de plus en plus interpellés. Les demandes viennent pour un tiers des parents et pour deux tiers des enseignant·e·s ». Elles tournent principalement sur les difficultés scolaires, en vue d’objectiver si le problème peut être résolu directement en classe ou, au contraire, être abordé par un·e spécialiste.

Pour ce type de demande, l’année se structure idéalement comme suit : « En début d’année scolaire, les équipes observent les classes, se concertent avec les enseignant·e·s. L’idéal étant que les difficultés soient repérées à la fin du premier trimestre pour mettre en place des bilans, des observations plus fines ou des processus d’intégration lors du deuxième trimestre. »

De la théorie à la (bonne) pratique

Prenons deux scénarios. Dans le premier, le mois de juin tire à sa fin, Lucie, 9 ans, termine sa 4e année de primaire. Dans le dernier bulletin, l’enseignant a écrit ceci : « Pour moi, Lucie devrait doubler ». Pour les parents, c’est un coup dur. Que faire de cet avis en fin d’année scolaire lorsque l’école et le centre PMS ferment leurs portes ? L’enseignant mentionne aussi la possibilité de recourir à l’intégration (l’enfant est inscrit dans le spécialisé, mais suit partiellement ou totalement les cours dans l’ordinaire) comme alternative si les parents souhaitent que leur fille poursuive son cursus.

Deuxième scénario. Le point de départ, un mot qui figure dans le journal de classe d’un garçon de 9 ans. « Quentin a des problèmes de concentration, il doit faire des efforts ». Et si ses parents comptaient mettre ce message dans un coin de leur tête, c’était sans compter sur les rappels de l’institutrice lorsqu’elle les croise dans la cour de récréation. Si bien que, de guerre lasse, ils décident de pousser la porte d’une neuropsychiatre. Après quelques mois de consultation, la spécialiste communique un retour enthousiaste et souhaite se mettre en relation avec l’enseignante pour partager quelques pratiques qui pourraient aider Quentin en classe. Mais la demande faite à l’institutrice en question reste lettre morte.

Ces deux scénarios expriment un même besoin de soutien et d’interface tant dans le chef des parents que des enseignant·e·s. Bonne nouvelle : les centres PMS peuvent répondre à ces besoins. Mais, à certaines conditions.

Exemple : le processus d’intégration proposé par l’enseignant de Lucie. Pour pouvoir en bénéficier, plusieurs conditions auraient dû être remplies en amont. Pour faire simple, l’enseignant aurait dû alerter en janvier afin de permettre au centre PMS d’effectuer le bilan permettant d’objectiver les besoins de Lucie. Dans le cas où le bilan confirmait le besoin d’intégration de Lucie, la demande aurait dû être introduite auprès de la direction générale de l’enseignement obligatoire fin avril.

Autre condition, l’école de Lucie devrait déjà être engagée dans l’intégration et collaborer avec une école de l’enseignement spécialisé de référence. Si le dossier est approuvé par le jury, ce dernier accorde un nombre de périodes (soit d’heures) pendant lesquelles un·e professionnel·le de l’enseignement spécialisé sera dévolu·e à l’accompagnement de Lucie. Bilan PMS, identification des besoins, soumission du dossier, approbation, formalisation des rôles et fonctions de chaque partie prenante, ces démarches prennent du temps et exigent une grande coordination et collaboration.

Les aménagements raisonnables

En Belgique, depuis la rentrée scolaire 2018, tout élève qui présente des « besoins spécifiques » et fréquente l’enseignement ordinaire, fondamental ou secondaire a le droit de bénéficier d'aménagements raisonnables.

Et dans le cas du problème d’attention de Quentin ? Inquiets pour leur enfant, les parents ont pris l’initiative de solliciter une réunion avec le PMS et la direction. Lors de cette rencontre, plusieurs propositions ont été formulées par le PMS : autoriser certains déplacements, octroyer plus de temps lors d’un exercice, mettre en place un signe discret pour relancer l’attention, utiliser un time timer pour visualiser le temps qui passe, faire du renforcement positif. L’enseignante ne s’est pas montrée preneuse : elle perçoit ces aménagements comme des faveurs octroyées à Quentin.

On le voit, la mise en place d’aménagements raisonnables trouve des échos personnels en chacun d’entre nous. Cela questionne sur ce qui est bon et juste et jusqu’où proposer un traitement différencié à un élève qui présente des besoins spécifiques. Certain·e·s enseignant·e·s témoignent pourtant des effets positifs de ces aménagements quant au problème de trouble de l’attention de leurs élèves. « J'utilise avec Fanny des relances de l'attention, explique Léa, enseignante en primaire. J’ai aussi installé des balles de tennis aux pieds de sa chaise pour lui permettre de la bouger sans gêner ses camarades ».

Pareil pour Cécile, professeure d’histoire et géographie : « Cette année, j'ai deux élèves atteints de troubles de l’attention. Pour l’un, j’ai mis en place un tiers-temps supplémentaire qui s’avère très efficace. Pour l’autre, une check-list pour qu’il puisse vérifier qu’il a bien répondu à toutes les questions et l’inciter à relire attentivement ».

Le PMS peut donc émettre un avis, jouer le rôle d’interface, réaliser un bilan, renvoyer vers des professionnel·le·s pour une prise en charge, formuler des recommandations. Mais il ne propose pas de thérapie, ne dispose d’aucun pouvoir contraignant envers les parents, les enseignant·e·s ou la direction et ne peut répondre à l’ensemble des demandes qui lui sont adressées dans des délais toujours souhaitables. Le mot de la fin revient à Nathalie Steimes : « Ce qui nous semble capital pour la réussite des projets, c’est le partenariat et la collaboration entre tous les acteurs concernés ».



Clémentine Rasquin

En savoir +

► Des exemples d’aménagements raisonnables et des témoignages : tdah.be
► Sur son portail enseignement.be, la Fédération Wallonie-Bruxelles a publié des documents ressources tels qu’une typologie de besoins spécifiques et des fiches outils sur les aménagements raisonnables.
► Qu’est-ce qu’un aménagement raisonnable ? C’est une mesure concrète permettant de réduire autant que possible les effets négatifs d'un environnement inadapté sur la participation d'une personne à la vie en société. Son objectif est de permettre au jeune à besoins spécifiques d’accéder aux apprentissages au même titre que les autres. Un aménagement est considéré comme « raisonnable » quand il est réalisable facilement (sans demander trop d’investissement en temps ou en argent tant à l'élève qu'à l'enseignant·e) et judicieux, c'est-à-dire qu'il répond à des besoins réels.

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