Développement de l'enfant

D’un côté, il y a la tendresse, le partage, les sourires saouls d’avoir fait le plein de lait. De l’autre, il y a le tire-lait en journée et la fatigue de gérer quasi seule les nuits. « La nouveauté de l’allaitement après sept mois, c’est sa petite main qui me caresse le cou et la joue… j’adore », résume Marie, maman de quatre enfants.
Allaiter aujourd’hui, ce n’est plus comme à la naissance. C’est moins de contraintes et plus de plaisir. Moins de contraintes car, à 7 mois, un bébé ne tète plus toutes les deux ou trois heures. Les crevasses et mastites deviennent rares. La production de lait se rode, elle s’est adaptée à votre rythme de vie et de tétées. À moins d’un sevrage brutal qui provoquerait un engorgement, rien ne devrait perturber cette douce routine.
Plus de plaisir à allaiter aussi car les gestes sont fluides, les mamans profitent de cette facilité, de cette liberté. Elles n’ont pas besoin de prévoir tout un kit de biberons et de lait en poudre lors de chaque sortie. Une écharpe ou cape d’allaitement pour les plus pudiques, un bavoir pour les régurgiteurs et les voilà partis. « Allaiter, c’est vraiment facile pour moi. Comme je porte le voile, je m’en sers pour cacher le haut de ma poitrine lorsque je donne le sein à mon bébé. J’ai ainsi pu allaiter dans un parc en toute discrétion. On était dans un coin calme et les passants n’ont rien vu. Il y a juste une maman qui a deviné ce qui se passait, elle est passée tout près de nous et m’a fait un clin d’œil et un grand sourire », raconte Fatou.
Le tire-lait, c’est pas obligé
Sept mois après leur accouchement, les mamans ont souvent repris le boulot. Les tétées sont alors associées au réveil du matin, aux joyeuses retrouvailles de fin de journée et aux plaisirs des week-ends ou jours de congé. Elles deviennent des moments privilégiés, une manière de faire le plein l’un de l’autre. Les mamans savourent d’autant plus que, pour garder ces tétées après la reprise du boulot, elles doivent s’organiser ! Soit en réduisant ou aménageant leur temps de travail, soit en récoltant leur lait en journée pour offrir un petit stock à la crèche ou à l’accueillante de leur enfant. « Moi, j’ai pu reprendre le travail à mi-temps, grâce à un congé parental, pour continuer l’allaitement de mon chewing-gum pendant quelques mois, témoigne Gwendoline. Il va des demi-jours à la crèche et y mange une panade à 11 heures. Je l’allaite lorsqu’on se retrouve vers 13 heures. Je ne dois même pas tirer mon lait. J’avoue, je suis vernie. J’ai surtout de la chance qu’on puisse se le permettre financièrement. »

« Le sevrage est une étape, comme la grossesse, comme l’accouchement… c’est un passage obligé »
« J’ai congé tous les vendredis, renchérit une autre maman, Charlotte va à la crèche quatre jours par semaine. Je tire mon lait tous les midis quand je bosse. Ce n’est pas très drôle mais je me dis que c’est pour son bien et que ça ne durera plus longtemps. En fin de semaine, je l’allaite quasi à la demande. Et je vois la différence dans ma production de lait. Le lundi, après trois jours de tétées à gogo, j’ai les seins qui tirent et je récolte beaucoup de lait. Ça diminue progressivement jusqu’au jeudi. Le vendredi, j’allaite souvent ma fille pour relancer la production pendant le week-end. »
Chaque maman trouve la solution qui lui convient. Et sans tire-lait ni congé, il y a toujours moyen de passer à un allaitement mixte, qui alterne l’allaitement « à la source » quand maman et bébé sont ensemble et les biberons préparés quand maman est loin. C’est le choix de Florence : « J’allaite encore Hugo trois fois en vingt-quatre heures : le matin, le soir et une fois la nuit s’il se réveille, confie-t-elle. En journée, il boit du lait artificiel s’il en a besoin. Mais je pense à supprimer la tétée du matin car elle dure une plombe et on n’a pas beaucoup de temps. Je dois conduire ma grande à l’école, le petit à la crèche avant le boulot, je cours beaucoup. Du coup, je suis stressée et je n’en profite pas. »
Progressivement, les mamans qui le souhaitent peuvent diminuer les tétées jusqu’au sevrage. Mais rien ne presse. Le lait maternel reste bon, riche et complet pour les bébés. L’Organisation mondiale de la Santé conseille même de poursuivre l’allaitement, en combinaison avec une alimentation complémentaire, jusqu'aux 2 ans de l’enfant et au-delà aussi longtemps que la mère et l'enfant le désirent.
« Est-ce qu’il s’arrêtera un jour ? »
« Mais si je continue d’allaiter mon bébé, est-ce qu’il s’arrêtera un jour de téter ? demande une jeune maman. N’est-il pas plus facile de le sevrer tant qu’il est petit ? » Christel Jouret, sage-femme et consultante en lactation IBCLC*, répond : « Le sevrage est une étape, comme la grossesse, comme l’accouchement… c’est un passage obligé. Le sevrage naturel est toujours plus simple car la mère et l’enfant sont prêts. Si ce n’est pas possible, le sevrage doit être doux et paisible. Petit à petit, la maman peut repousser les tétées, en disant par exemple : "Oui, je vais te donner le sein mais tantôt", et faire une autre activité avec le bébé qui remplace ou repousse la tétée pour que la production de lait maternel diminue progressivement. La maman doit prévoir quinze jours, trois semaines pour sevrer. Après sept mois d’allaitement, on compte entre deux et cinq tétées par jour. Donc, c’est plus facile d’arrêter à ce moment-là qu’au tout début de l’allaitement. De toute façon, il faut éviter d’engorger les seins et faire comme c’est bon pour soi. »
Et si le bébé refuse le biberon ? « Il n’est pas obligé de passer par la case biberon, ni par le lait artificiel d’ailleurs. À 7 mois, un bébé sait boire à la tasse si on l’aide », précise encore la sage-femme.
* International Board Certified Lactation Consultant.
AUTANT SAVOIR
Faites une sieste de dix minutes chaque jour
Certaines mamans allaitantes se sentent fatiguées et se demandent si c’est à cause de leur allaitement…
Christel Jouret, sage-femme : « La fatigue est davantage due au rythme de vie qu’on a avec un bébé, surtout si la maman travaille. C’est une fatigue organisationnelle. Heureusement, l’allaitement favorise la production d’hormones qui permettent de récupérer sur un laps de temps court. Mon conseil pour les mamans fatiguées, c’est de dormir dix minutes en journée sur leur bras au bureau ou dans leur voiture pour un peu récupérer. Elles peuvent aussi profiter des éventuelles tétées de la nuit. Ces tétées favorisent la production de la prolactine et d’ocytocines qui permettent une bonne récupération et de rester vigilante à son bébé. D’ailleurs, la différence entre une maman qui allaite et une maman qui n’allaite pas, c’est que le repos d’une mère allaitante est meilleur que celui d’une mère qui n’allaite pas. C’est scientifiquement prouvé. »
Que répondez-vous à une maman qui se demande si sept mois d’allaitement, c’est assez ?
C. J. : « Je lui demande si c’est assez pour son projet à elle. Il faut aussi être attentif au sevrage à la demande de la mère, lui donner des infos éclairées pour qu’elle puisse faire un choix éclairé. Mais non, sept mois, ce n’est jamais assez. Après six mois, le lait maternel est toujours conseillé en grande quantité à côté d’une alimentation diversifiée jusqu’à l’âge de 2-4 ans. »
ZOOM
Le sevrage naturel, c’est quoi ?
Plutôt rare dans nos contrées, mais de plus en plus en vogue, le sevrage naturel se fait lorsque spontanément le nombre de tétées diminue. L’enfant est moins demandeur jusqu’à l’arrêt total de l’allaitement. En moyenne, un sevrage naturel se fait entre les 2 et 5 ans de l’enfant.
LES PARENTS EN PARLENT…
Une grande victoire !
« Pour moi, sept mois d’allaitement, c’est une grande victoire face à un entourage incompréhensif et très pro-biberon. J’ai souvent dû me justifier, m’expliquer, me boucher les oreilles et, parfois, pleurer en cachette, mais j’ai tenu bon. J’essaie de préserver cette bulle d’amour autour de mon bébé et moi lors des tétées. Quelle épreuve on traverse, tous les deux ! Et même tous les trois, en fait. Car mon chéri est là, en précieux soutien. Son ex n’a pas du tout allaité ses enfants et il est trop content de ne pas devoir se lever la nuit pour préparer un biberon. Il me remercie de nourrir notre bébé et me dit que je suis belle. C’est tout simple, mais ça me fait du bien quand je doute ou que je suis fatiguée après le boulot. Et surtout, il chasse les mauvaises langues quand j’allaite. »
Anna, maman de Clovis
Besoin de conseils
« Quand Laïla est née, je ne savais pas combien de temps je l’allaiterais, mais ça me semblait naturel que je lui donne le sein. J’ai failli arrêter avant la reprise du boulot. J’avais besoin de conseils car je ne voulais pas stopper net et je ne savais pas trop comment m’organiser. Ma cousine m’a donné le numéro de la Leche League. J’ai appelé et j’ai parlé avec une nana super sympa qui a pris le temps de m’écouter et de répondre à mes questions. Après, j’ai participé à une rencontre en ligne que l'association organisait, et ça m'a aussi beaucoup aidée. »
Ikram, maman de Laïla
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