Développement de l'enfant

Les petits aussi appréhendent, chacun à leur manière, le monde. Il en va ainsi de Théo et d’Adèle, qui sont cousins et ont à peu près le même âge. Deux modèles pour le moins différents. Dès leur naissance, leurs parents ont été familiarisés avec leur façon, bien particulière, d’appréhender, d’explorer, de toucher le monde.
Voir avec les yeux
Théo est un observateur. Tout bébé déjà, on le voyait scruter le monde autour de lui de ses yeux grands ouverts. Ceux-ci semblaient avaler les informations, manger le monde, se nourrir de tout ce qui se présentait à eux. Lorsqu’il était porté en kangourou, il tentait toujours de se tourner vers l’extérieur, de capter ce que le monde pouvait lui offrir à voir.
Maintenant qu’il a 18 mois, il poursuit sur sa lancée. Il reste curieux par ses yeux. Il regarde longuement l’image bariolée qui se trouve dans l’abribus. Il tourne très lentement les pages de ses livres d’images, savourant chaque détail des illustrations. Il semble ne pas se lasser d’observer l’oiseau venu se poser dans le jardin; et là, il a la compétence, surprenante à son âge, de rester immobile un long moment. Il est absorbé, trop facilement d’ailleurs, par les images que diffuse la télé…
Voir avec les mains
Adèle ressemble fort peu à son cousin. C’est une petite fille fonceuse, qui va de l’avant, bouge quasi en permanence, se déplace vers l’objet qui l’intéresse pour le toucher, le mettre en bouche, le manipuler. Elle ne se satisfait pas de ce que ses yeux lui disent et elle a un besoin intense d’un contact physique avec le monde. Les pages du livre sont tournées rapidement et Adèle préfère les mimiques et chatouilles qui accompagnent la lecture aux images qui s’offrent à elle.
Apercevant un chat dans le parc, elle ne peut s’empêcher de le poursuivre, tentant à plusieurs reprises de s’en rapprocher, pour finir frustrée par un animal bien plus leste qu’elle. Et la toile, accrochée au mur dans le salon de sa mamie, elle ne se contente pas de la regarder. Intriguée par les couleurs et les effets d’ombres et lumières, elle grimpe sur le canapé puis sur son dossier, de manière à pouvoir confronter ses petits doigts à la réalité de cet objet étrange pour elle…
Des compétences singulières
Bizarrement, les compétences visuelles que Théo développe ne convainquent pas son papa. Celui-ci le souhaiterait bien plus tonique et mobile. Il voudrait que son fils fasse ses découvertes au travers d’explorations plus audacieuses. Il n’a de cesse de dire à son enfant de suivre sa petite cousine, de prendre exemple sur elle, d’oser comme elle le fait. C’est, pourtant, par les yeux que Théo préfère toucher au monde, qu’il le découvre et le laisse pénétrer en lui.
De l’autre côté, c’est la maman d’Adèle qui ressent une sorte de frustration. Elle rêverait d’une petiote bien plus douce, bien plus posée, ayant la capacité de déployer les trésors d’observation qu’elle connaît chez Théo. Mais c’est au travers de ses mains et de son corps qu’Adèle perçoit l’univers qui l’entoure ; c’est ainsi qu’il prend sens pour elle.
Geneviève Salengros
EN BREF
À chaque jeune enfant ses modalités de contact avec le monde, à chacun son style d’être et d’agir. À nous parents, de découvrir les compétences singulières et les besoins particuliers de chaque enfant et de l’accompagner sur le chemin de la découverte du monde.