
Il y a ceux qui veulent tout arrêter, ceux qui ne savent pas du tout ce qu’ils vont faire plus tard, ceux encore qui se tâtent entre un type d’études et un autre, puis ceux qui veulent travailler tout de suite, ou se former à une profession dès le secondaire. Alors que les uns tracent leur voie, d’autres ont fait carrière après une filière professionnelle ou sans avoir obtenu le diplôme de secondaire. Portraits.
À 12 ans, Pierre-Laurent le sait. Il veut se former à l’horlogerie. Issu d’une « bonne famille » des hauteurs namuroises, il décide de s’inscrire en 1re secondaire à l’IATA, l’institut d’enseignement proposant des formations artistiques, artisanales, scientifiques, techniques et professionnelles. « C’était mal vu à l’époque. Mais on est allés visiter l’école avec mes parents. Les enseignants nous ont mis en confiance sur les débouchés. Mes parents ont vite été rassurés, et ont soutenu mon choix », se souvient l’artisan.
C’est de l’extérieur du cercle familial que viennent l’incompréhension et les moqueries. « Ce sont plus les amis de mes parents qui leur déconseillaient de me laisser faire l’IATA, au lieu du collège. Et aux scouts, c’est clair que j’avais un parcours différent des autres. Ils étaient tous dans l’un des deux collèges réputés de la région. Et c’était l’âge où on subit des moqueries dès qu’on fait quelque chose de différent. Je me prenais des piques. Mais j’avais assez confiance en moi pour que ça ne me touche pas. Et j’avais le soutien de mes parents donc je n’en ai pas vraiment souffert. »
De l’or dans les doigts
À l’IATA, Pierre-Laurent se plaît beaucoup. Et ses résultats s’en ressentent. Il suit parallèlement des cours particuliers de français, de maths et d’anglais les mercredis après-midi, pour compenser le manque de cours de base. Il suit aussi des cours de français et de maths sur les temps de midi à l’école, avec un professeur, comme le lui ont conseillé ses parents. Il décroche le CESS (certificat d’enseignement secondaire supérieur) au terme de sa 7e professionnelle.
« Dès 17- 18 ans, la tendance s’est inversée. Les copains trouvaient de plus en plus sympa que j’ai fait autre chose. Aujourd’hui, certains me confient même qu’ils s’ennuient dans leur bureau ou déchantent de leur métier ou de leur salaire, alors qu’ils ont fait tant d’années d’études. Moi, j’ai fait un choix de cœur. La passion n’est pas la même », confie-t-il.
Pierre-Laurent Martin s’est ensuite tourné vers la joaillerie. Après un an et demi de travail au service d’un maître-artisan, dans le quartier des diamantaires à Anvers, il se lance. Désormais, il vit confortablement de sa passion, travaillant les métaux et les pierres précieuses. Un épanouissement qui n’est pas venu d’un claquement de doigts. « Quand on bosse, qu’on est passionné et qu’on parvient à sortir du lot, ça va. Mais le but est difficile. Il faut avoir les reins solides et le moral. J’ai aussi eu la chance de pouvoir vivre chez mes parents au début de ma carrière, jusqu’à mes 20 ans », raconte-il. « Certains essaient et n’y arrivent pas. Être indépendant, ça demande de la discipline, le respect de soi et de ses clients. Je n’ai jamais l’assurance de qui va m’appeler demain. Mais ça arrive. Parce que je travaille sérieusement et que le bouche à oreille fonctionne bien », confie le créateur de bijoux. Un beau pied-de-nez à ceux qui doutaient de son choix initial.
Il a lancé sa boîte, sans diplôme
Kévin devait bisser sa rhéto. Il ne l’a pas fait. Il a commencé les petits boulots dans l’HoReCa, puis comme vendeur dans un magasin de vêtements, puis chez un fournisseur d’énergie wallon. À 25 ans, il lance son projet, en parallèle : une ferme à domicile. « J’ai mis les choses en place : j’ai rencontré les producteurs locaux, pour trouver des fournisseurs, puis j’ai créé mon site internet », explique-t-il.
Et très vite les choses s’accélèrent. Les commandes se succèdent. « C’est vite devenu ingérable », confie le jeune entrepreneur. Kévin doit quitter son travail pour se consacrer pleinement à son projet. Il suit alors une formation accélérée de gestion et en création d’entreprise à l’IFAPME.
Aujourd’hui, Kévin livre plus de 400 produits de bouche locaux dans toute la province de Liège. Il gère en moyenne une centaine de commandes par mois. « C’est une période heureuse pour moi. Mais j’ai trimé plus que les autres. Quand on n’a pas le CESS, on doit faire deux fois plus ses preuves qu’un autre ». Mais sans ce diplôme de secondaire, il est parvenu à lancer sa boîte, et à en vivre.
S. G.
Témoignages : ils tracent leur voie
Créer de ma main
Je ne savais pas trop. L’art m’intéressait, mais comme tout le monde, et je n’ai pas les compétences, je ne sais pas tracer à la main. Je suis allé aux portes ouvertes de Saint-Luc pour le graphisme mais je n’ai peut-être pas le talent qu’il faut. Au Salon des études, j’ai trouvé une formation en gestion environnementale et architecture de jardin. C’est original et ça peut avoir de l’avenir. En plus je vais apprendre beaucoup de choses et ce qui m’intéressait dans l’art c’est la conception. Que par ma main il y ait quelque chose qui soit bâti, créé, ça peut être chouette. Là, je suis quasi sûr de moi.
Martin, 17 ans, 6e latin
Évoluer sur le terrain
« J’ai arrêté l’école en 5e année parce que je voulais apprendre mon métier. J’ai toujours aimé le secteur de l’automobile. Je me suis toujours vu là-dedans. Quand j’ai commencé, j’ai directement accroché. J’avais envie d’approfondir mes connaissances, et en même temps être suivi en formation dans une entreprise qui me permet d’évoluer encore plus sur le terrain. »
Benoît, 19 ans, apprenti carrossier en 3e année à l’IFAPME
Commencer le métier maintenant
« Je préférais commencer le métier maintenant, et déjà me lancer, que d’attendre. Avoir de la pratique… »
Alisson, 15 ans, apprentie esthéticienne
On apprend mieux sur le tas
« Je préfère apprendre à travailler que d’aller à l’école. On apprend mieux je trouve aussi : on est direct sur le tas, dans un restaurant, à apprendre. »
Maximilien, 19 ans, 2e année en restauration à l’IFAPME