Santé et bien-être

Depuis quelques mois, la maman de Cloé se rend régulièrement à la clinique pour se soigner, mais après chaque séance de traitement, elle est malade. Est-ce qu'on la soigne vraiment ? Difficile de comprendre tout ça quand on est enfant.
La maman de Cloé est, en effet, atteinte d'un cancer du sein. Il a été suspecté lors d'une visite chez le médecin de famille et diagnostiqué quelques jours plus tard. Les choses se sont alors précipitées : intervention chirurgicale, chimiothérapie et son cortège de souffrances.
Pour cette maman de trois enfants, l'annonce de la maladie a bien évidemment été difficile à accepter. Elle ne voulait pas inquiéter ses enfants ni son entourage. Elle leur a donc peu parlé de ce qui lui arrivait. Et Cloé, 11 ans, a respecté ce silence : elle n'a pas posé de questions. Elle savait que sa maman avait un cancer, mais qu'il ne fallait pas en parler. Elle est donc restée avec ses interrogations, ses peurs et ses angoisses.
Pourquoi maman va-t-elle plus mal alors qu'on la soigne ? Est-elle bien soignée ? Et si cela empirait, que vais-je devenir ? Pourquoi perd-elle ses cheveux ? Vont-ils repousser ? Toutes ces questions sans réponse ont augmenté son angoisse.
« Ce dont on ne peut parler, c'est aussi ce qu'on ne peut apaiser et, si on ne les apaise pas, les blessures continuent à s'ulcérer », conclut le psychanalyste américain Bruno Bettelheim. Cloé avait intégré qu'il ne fallait pas parler, cela semblait trop difficile pour les grandes personnes. Et puis, les cheveux de maman ont repoussé et elle a semblé guérie.
Laisser la place aux questions
Mais, quelque temps plus tard, il a fallu recommencer un traitement. Cette fois, le papa et la maman en ont parlé clairement à leurs enfants. Ils ont organisé les semaines de traitement ensemble, mis en place un calendrier, fait des projets. Il y a la semaine difficile où maman n'est vraiment pas bien, puis celle où il vaut mieux qu'elle n'attrape pas les virus de saison et enfin la bonne semaine, celle où on peut prévoir des activités ensemble - une balade, une excursion… - vivre presque normalement.
Cloé a, cette fois-ci, posé beaucoup de questions à sa maman. Elles ont parlé de la maladie, du traitement, de la suite. Cloé a pu ainsi aborder sa plus grande angoisse : que sa maman ne guérisse pas. Bien sûr, celle-ci n’a pas pu lui promettre de guérir, mais elle lui a expliqué que son papa était toujours là et qu'elle pouvait compter sur lui. Elle lui a rappelé qu'elle avait une marraine et un parrain avec lesquels elle pouvait aussi discuter : ses parents les ont choisis pour être près d'elle dans les moments difficiles.
Les maladies graves, les accidents, les deuils, mais aussi les problèmes professionnels ne sont pas des événements qui ne touchent qu’une seule personne dans la famille. Au sein de celle-ci, chacun vit l'événement de sa propre place, avec son âge, avec ses capacités et ses compétences, avec sa personnalité. Chacun a des questions et voudrait avoir des réponses qui le rassurent. Celles que se pose Cloé ne sont pas les mêmes que celles de ses deux grands frères. Elle a 11 ans et est à l'aube de grands changements dans son corps de petite fille.
La maladie de sa maman, qui touche profondément son corps de femme, voilà bien une source d'angoisse que ses grands frères n'imaginent pas. Et puis, elle n'est pas encore bien grande et reste dépendante de ses parents. Son plus grand frère qui suit des études supérieures peut plus facilement concevoir que, bientôt, il pourra tirer son plan tout seul. Par contre, lui a accès à une information médicale qui ne le rassure pas toujours…
Mireille Pauluis
EN BREF
Il n’est pas utile de donner aux enfants tous les détails, toutes les informations concernant la maladie et son traitement. Ce qui importe, c'est que les enfants sachent qu'ils peuvent poser aux adultes toutes les questions qui les tracassent, que le sujet n'est pas tabou. Ils ne les poseront pas nécessairement à l'adulte malade ou accidenté, mais à la personne qu'ils sentiront suffisamment forte pour leur répondre.
Ne pas parler aux enfants de ce qui est difficile ne les protège pas, bien au contraire. Les choses non dites, les secrets lourds sont source d'angoisse. Ce sont des monstres qui encombrent l'esprit des enfants. Mais trop dire ne les protège pas non plus. Ils n'ont pas à être les confidents de leurs parents…
EN SAVOIR +
- La Fondation contre le cancer (tél. : 02/736 99 99) propose différentes formes d’aide aux malades du cancer et à leurs proches : ligne d’assistance téléphonique, entretiens psychologiques individuels et en famille, ateliers pour enfants…
- Des livres pour aborder cette maladie avec des enfants : Alice au pays du cancer de Martine Hennuy et Sophie Buyse, illustrations de Lisbeth Renardy (Alice Jeunesse) - Grand arbre est malade de Nathalie Slosse, illustrations de Rocio Del Moral (Abimo) - Le jardin d’Aurélien de Brigitte Mercier-Schuermans (coédition Frison-Roche et Nauwelaerts).