Développement de l'enfant

Comment un enfant apprend-il à marcher ? Le ramping et le quatre pattes sont-ils nécessaires au bon développement de l’enfant ? Et pourquoi certains bouts de choux restent-ils assis, tandis que d’autres se lancent sur leurs guiboles et retombent sur leurs pattes ?
« Pling ploung, pling ploung ploung ». Assise bien droite sur le tapis, super concentrée sur son xylophone, la petite Juliette, 15 mois, épate par ses talents précoces de musicienne. Fin du morceau, elle tend les bras vers son public telle une rockstar. Non, elle ne se lèvera pas pour saluer la foule. D’ailleurs, elle ne se lève jamais. Elle ne rampe pas non plus. Elle préfère être transportée par de grands bras puissants. Parfois, elle avance sur les fesses.
Une démarche plutôt rigolote qui commence à inquiéter pédiatre et puéricultrices de la crèche. « Dans notre groupe, c’est la seule à ne pas avancer à quatre pattes, raconte Natacha, une de ses puéricultrices. Depuis qu’elle est arrivée, elle est bien stable assise et ne supporte pas d’être couchée. On a déjà eu d’autres ‘petits bouddhas’ qui restent en position zen au lieu de ramper comme leurs copains. C’est frustrant pour eux, mais ils finissent par marcher quand même », poursuit-elle, rassurante.
À quatre pattes, l’enfant acquiert une grande flexion de la tête et change son regard sur les choses. Ces mécanismes lui permettront, plus tard, de structurer son espace
King du ramping avant de s’asseoir
Ouf, un enfant peut apprendre à marcher sans forcément passer par la position quatre pattes. Mais alors, pourquoi tous ces détours avant d’atterrir sur deux pieds ? On a posé la question à Amandine Caffonnette, kinésithérapeute pédiatrique. « La motricité est préprogrammée au niveau cérébral. Si l’enfant en a l’occasion, il va explorer de par lui-même différentes positions : sur le dos, sur le côté, sur le ventre. L’enfant va rouler, ramper, puis se mettre à quatre pattes, assis, à genoux et enfin debout. Malheureusement, et on peut tout à fait les comprendre, les parents veulent parfois voir leur enfant assis avant qu’il ne connaisse le chemin pour arriver et quitter cette position. L’enfant tient assis mais reste coincé dans cette position ».
Certains avancent alors sur les fesses au lieu de ramper. Mais ce « bottom shuffling » n’aide pas l’enfant pour la suite de son développement. « En avançant sur les fesses, il n’y a pas de mouvement de balancier, ni de mouvement de bras, explique la kiné. Alors que la position quatre pattes participe à la construction de l’espace de l’enfant.
À quatre pattes, l’enfant acquiert une grande flexion de la tête et change son regard sur les choses. Ces mécanismes lui permettront, plus tard, de structurer son espace. Certaines études font même des liens entre le quatre pattes et le calcul des distances, les maths et la géométrie. Ça ne veut pas dire que ceux qui ne passent pas par le quatre pattes auront forcément des difficultés en maths, heureusement. Les connections peuvent se faire autrement dans le cerveau », poursuit Amandine Caffonnette.
Un espace dégagé et des pieds aérés
Du temps et de l’espace, voilà ce dont chaque bébé a besoin pour se mouvoir, rouler, ramper… et marcher. Du temps pour évoluer à son rythme et découvrir son environnement à partir de chaque nouvelle position. Et des endroits où s’agripper sans danger. Exit la mini-table basse en verre et la bibliothèque bancale. Des meubles stables permettent à tout petit explorateur de grimper, tirer, se hisser et prendre son pied en toute sécurité.
« Les enfants ont besoin d’un environnement ‘safe’ pour se mettre à marcher, confirme Anne-Sophie, psychomotricienne. Lors des cours pour bébés, je vois souvent des petits qui font leurs tout premiers pas au milieu des mousses et tapis de gym. Ici, ils sont encouragés et ne risquent pas de tomber de très haut. À la maison, les parents n’ont pas toujours la place ou le réflexe de les laisser gambader à leur guise ».
La kinésithérapeute pédiatrique renchérit : « Si un enfant passe trois heures par jour dans un maxi-cosy, il doit aussi profiter de trois heures dans un espace libre pour rouler et explorer. C’est ce qu’on appelle la motricité libre. Évidemment, il faut complètement interdire l’utilisation du trotteur et de tous ces sièges prémoulés qui n’aident pas du tout l’enfant dans le développement de la marche ».
Avant de marcher sur ses pieds, l’enfant doit explorer le sol, couché à plat, simplement. On évite donc de laisser trop longtemps un bébé dans un super poste d’observateur, comme sa chaise haute ou son parc. S’il a plein de choses à voir sans devoir faire l’effort de bouger, il développera peu sa motricité globale. Surtout s’il est posé devant un écran allumé.
Côté petons, on évitera les chaussures serrées et rigides pour les premiers pas. Rien de tel que les pieds nus ou des semelles souples et légères pour bien sentir le sol avec sa voûte plantaire.
Mais surtout, pour qu’un enfant se développe harmonieusement, un conseil de notre kiné amie des bébés : « Jouez ! Jouez avec vos enfants, c’est primordial ! Même si on a peu de temps. Le jeu ensemble apporte beaucoup de plaisir et facilite tellement d’apprentissages ! ».
EN BREF
À quel âge s’inquiéter d’un enfant qui ne marche pas ?
« La marche s’inscrit dans un développement global de l’enfant. Donc, on s’inquiète si l’enfant n’a pas l’air bien, s’il a un tonus bas, s’il ne regarde pas dans les yeux, qu’il pleure très peu ou au contraire énormément.
Si à 8 mois, l’enfant n’a pas un mode de déplacement, s’il ne roule pas, ne se retourne pas ou ne tente pas la position quatre pattes, alors ça vaut la peine d’en parler au pédiatre et de passer chez un kiné. L’occasion de voir pourquoi l’enfant n’a pas envie de bouger, s’il n’a pas l’une ou l’autre raideur…
Un enfant commence à marcher en général entre ses 12 et 18 mois. Si un enfant de 18 mois ne marche pas mais qu’il se déplace à quatre pattes, qu’il se met debout pour explorer, il ne faut pas s’inquiéter, ça va venir », rassure Amandine Caffonnette, kiné pédiatrique.
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