Développement de l'enfant

Oui, il peut s'endormir seul...

La difficulté du bébé à s'endormir et se rendormir seul est une préoccupation parentale

La difficulté de l’enfant à s’endormir – et se rendormir – seul est une des préoccupations des parents d’un petit bébé. Si c’est la vôtre, elle peut vous occuper totalement depuis le début ou seulement par moments. Elle s’exprime de mille façons dans les familles.

« Vers 4 mois et demi, Léon a eu une phase où il n’arrivait pas à s’endormir sans nous à ses côtés durant la journée, et il pleurait, pleurait, raconte ainsi Yolande. On voyait qu’il était fatigué mais il résistait, comme s’il ne voulait pas lâcher prise. » « Isalys, à 4 mois, s’endort plus facilement, mais elle est plus difficile pendant la nuit, reconnaît pour sa part Bruno. Elle a du mal à garder sa tutte en bouche. On doit tout le temps aller la lui remettre. J’y vais, la maman y va, la grand-mère, le grand-père quand ils sont là… C’est chacun son tour. Et c’est épuisant. »

L’organisation du sommeil change

« À 4 mois, un bébé n’est encore qu’au début de la construction de sa chronobiologie, c’est-à-dire le fonctionnement de tout le corps sur 24 heures avec l’alternance jour-nuit. Des horaires de plus en plus réguliers de repas et de sommeil s’installent », résume la pédiatre française Marie Thirion, auteure de plusieurs best-sellers consacrés aux bébés dont Le sommeil, le rêve et l’enfant (coécrit avec Marie-Josèphe Challamel et paru aux Éditions Albin Michel). À partir de là, il y a deux erreurs à éviter : « La première est de demander à un bébé de se réguler trop tôt, avant ses 6 à 8 mois : tant qu’il n’a pas acquis les rythmes circadiens, tant que son corps ne fonctionne pas sur 24 heures, il ne le peut pas. La seconde est de trop dépasser l’âge des 8-9 mois pour lui donner les bases de sommeil qu’on attend de lui. Je dis "attend" parce que le sommeil des bébés est une affaire éminemment culturelle. Dans de nombreuses sociétés, il est admis que les bébés ne dorment pas seuls et mangent plusieurs fois par nuit jusqu’à 9, 12, voire 24 mois ! »
Votrçe bébé grandit. Il différencie de mieux en mieux le jour de la nuit. Depuis sa naissance, des petits trucs l’y aident. Comme le faire dormir à la lumière du jour : vous laissez ouverts les rideaux pour les siestes en journée et n’allumez pas de lampes puissantes la nuit. Comme l’installer dans une ambiance calme et feutrée dès le début de la soirée et éviter tout ce qui pourrait l’exciter (télé allumée, musique tonitruante…). Comme créer des habitudes d’endormissement : lui laisser un doudou (mais ce n’est pas obligatoire, certains bébés s’en passent), lui souhaiter une douce nuit, lui chanter une berceuse…

Vers 4 mois, les cycles de sommeil s’inversent, c’est-à-dire que les bébés s’endorment « comme les grands » en sommeil lent et non plus en sommeil paradoxal. D’où, parfois, une adaptation un peu difficile à l’endormissement

Vers 4 mois, les cycles de sommeil s’inversent, c’est-à-dire que les bébés s’endorment « comme les grands » en sommeil lent et non plus en sommeil paradoxal. D’où, parfois, une adaptation un peu difficile à l’endormissement. Vous déposez votre petit dans son lit quand il fait mine de s’endormir. Vous vous éloignez pour voir s’il peut trouver le sommeil seul. Avec la différenciation jour-nuit, vient l’allongement des plages de sommeil de nuit. Votre bébé devient capable de dormir jusqu’à neuf heures d’affilée, un temps entrecoupé parfois d’un ou de deux repas.
Il y a la théorie. Et il y a votre réalité. Surtout que le sommeil est extrêmement variable d’un bébé à l’autre. Il y a des bébés qui dorment des nuits complètes depuis leurs 3 semaines et d’autres qui multiplient les éveils nocturnes. De même, les siestes – trois à quatre fois par jour vers 4 mois – s’organisent de façon irrégulière sur les matinées et les après-midi, et sont de durée très variable.

Être capable de s’endormir seul… progressivement

« À 4 mois, ce qui est important, c’est que le bébé commence parfois à s’endormir sans l’aide de l’adulte, explique Marie Thirion. Au moins pour quelques siestes ou au moins un ou deux soirs de temps en temps. Ce n’est pas une obligation absolue, en particulier quand la maman allaite : beaucoup de bébés, à cet âge, s’endorment encore blottis dans les bras maternels, en tétant. Ce qui compte, c’est que, petit à petit, l’enfant s’aperçoive qu’il peut s’endormir sans tout cela, après avoir eu tout cela. »
« Quand un bébé dort avec une sucette et ne se réveille pas pour la réclamer, il n’y a pas de raison de l’interdire, poursuit la pédiatre. Le problème avec la sucette, c’est qu’elle tombe pendant les phases de sommeil paradoxal ! Il vaudrait mieux que l’enfant trouve – s’il en a besoin – un "petit quelque chose" qu’il puisse lui-même récupérer quand il le perd. »
Votre bébé se réveille-t-il désormais chaque matin plus ou moins à la même heure ? Cela rythme vos journées à tous. C’est parfois gênant… les week-ends, si c’est à 6 heures du matin ! En fin de journée, quand vous, le papa, rentrez du boulot, votre bébé est-il déjà parti pour sa nuit ? Déception : vous ne le voyez pas. Il ne vous reste plus alors qu’à attendre le week-end pour jouer avec lui… tôt le matin !

AUTANT SAVOIR

Les bébés ne fonctionnent pas en tout ou rien

On attend trop souvent que les enfants fonctionnent en tout ou rien. « Or, ce n’est pas la réalité : ils ne sont pas sur des trajectoires linéaires, insiste Marie Thirion. Ils s’endorment seuls, puis ont du mal à s’endormir seuls. Ils passent du jour au lendemain de six à cinq ou quatre repas par jour, puis reviennent à six repas. Il y a des moments où ils avancent et des moments où ils reculent. Des jours qui sont faciles et d’autres qui le sont beaucoup moins. » Ceci est vrai pour tout le monde, mais c’est encore plus vrai avec les tout-petits.
« Le bébé de 4 mois capable de s’endormir seul peut le faire trois fois sur une semaine, puis la semaine suivante cinq fois, une semaine plus tard encore ne plus le faire du tout et avoir besoin de l’aide de son parent, poursuit la pédiatre française. À cet âge, il est facilement ramené en arrière dès qu’il est malade ou qu’il ne retrouve pas son lit habituel par exemple. Petit à petit aussi, le bébé ne va plus s’endormir au sein ou en tétant un biberon. Mais, là encore, il n’y a pas de trajectoire linéaire.
L’important, c’est que l’enfant finisse par comprendre qu’il peut s’endormir et se rendormir sans être dépendant d’un adulte ou d’un objet. C’est une découverte qu’il fait très progressivement. Mais, plus il la fait tôt, déjà à certaines heures de la journée, moins l’apprentissage ultérieur devrait poser problème. »

LES PARENTS EN PARLENT…

Régression soudaine
« Le berceau de Robin est au pied de notre lit – il n’y a pas de place dans notre chambre pour installer un lit side-car. À 4 mois et demi, il tète encore une fois la nuit. Mais il a soudain régressé dans son sommeil, il s’est mis à se réveiller plusieurs fois en pleine nuit. J’ai pioché des idées dans le livre de Marie Thirion sur le sommeil des enfants. Il fallait qu’il parvienne à se rendormir seul. Je pressais alors le papa : "Va dire à Robin qu’il peut se rendormir seul, qu’il en est capable." Et il y allait. En trois nuits, cela a été réglé ! Robin est, au fond, un bon dormeur. Peut-être que notre tempérament, plutôt apaisant, à son papa et à moi, l’aide… »
Angélique, maman de Robin

Les pleurs ont leurs raisons
« Si Fany est un peu compliquée pour faire dodo, je lui donne l’attention dont elle a besoin, mais sans en faire trop ! Je fais par exemple des allers-retours de plus en plus espacés entre sa chambre et là où nous sommes. Fany sait quand elle a besoin de dormir. Elle est raisonnable. Mais si elle pleure beaucoup, si ses pleurs ne sont pas habituels, c’est qu’il y a une raison particulière : elle a peut-être de la fièvre ou je ne sais quoi d’autre. Je la prends alors dans les bras et me promène un peu avec elle dans la chambre. Cela m’arrive aussi de revenir avec elle au salon, même si le papa n’est pas trop d’accord. Faire cela, c’est l’exciter de nouveau, dit-il. Et c’est vrai, nous sommes alors souvent repartis pour un tour ! »
Aurélie, maman de Fany