Crèche et école

Passion ou lubie ? Ce qui s’épanouit | ce qui s’évanouit

« Je veux devenir TikToker, jockey, comédien, présentatrice de JT, skateuse, patineur artistique, acrobate, clown, dresseur d’otarie… ». O.K. O.K. O.K. On respire et on voit avec Laurence Dussein, conseillère d’orientation du SIEP de Libramont, comment donner une voie à tout ça.

Ce dossier est entièrement consacré à l’orientation qui joue la carte de la passion qu’on traite dans ces pages sous tous les aspects. Comment cette idée est-elle perçue aujourd’hui dans le monde de l’orientation ?
Laurence Dussein :
« Ça fait écho à une citation : ‘Choisis de faire ce que tu aimes et tu n’auras plus jamais à travailler le reste de ta vie’. Ce qui est un peu vexant pour les personnes qui travaillent avec passion, mais passons. De manière générale, ce que vous appelez la passion est le plus souvent encouragé. Même s’il y a plusieurs écueils. Le côté obsessionnel, par exemple. Je ne parlerai pas de passion. Je la démythifierais et parlerais plutôt de ‘métier motivation’. Attention à ce qu’elle ne devienne pas un mot magique qui pourrait devenir source de pression. Aujourd’hui, les enfants, les jeunes sont exposés à plein de possibilités. Le véritable objectif, pour moi, c’est d’abord de se rencontrer dans ses valeurs, ses motivations. »

En effet, les sollicitations sont immenses aujourd’hui chez les gamin·es, d’où la difficulté pour les parents de démêler la lubie passagère de la vraie passion qui va permettre de poser des choix d’orientation. Comment s’y prendre ?
L. D. :
« C’est un équilibre difficile. Le rôle du parent, c’est d’accompagner, sans diriger. Comprendre les goûts de son enfant, s’y intéresser. L’aider à aller plus loin dans ses aspirations. ‘Tu rêves de devenir YouTuber ? Pourquoi exactement ? À partir de là, vous allez l’aider à s’impliquer à son échelle. On distingue la lubie de la passion en poussant son enfant à expérimenter. En mesurant l’implication qu’il peut y mettre. Et c’est là qu’entre en jeu la notion de compétence. Par exemple, votre fille est obsédée par les animaux. Qu’est-ce qui l’anime exactement ? Pour le savoir, on tire sur un bout de ficelle et on voit jusqu’où elle est prête à aller. Voir ce qui s’épanouit ou voir ce qui s’évanouit ! L’idée, c’est qu’à toute petite échelle, l’ado démontre à ses parents et – plus important encore - se prouve que le choix est bon. Ça passe par plein de choses, comme financer ses loisirs, par exemple, ou effecteur des petits boulots qui s’en approchent, pas juste tout se faire offrir par papa-maman et tout obtenir clé sur porte. L’implication se mesure par une série d’éléments que vous sentez votre enfant prêt à intégrer. »

Une fois plus assuré·e, comment on professionnalise son choix ?
L. D. :
« Professionnaliser un intérêt, ça veut dire : être prêt·e à acquérir des compétences. Je veux travailler dans le cinéma, je rêve de réaliser un film. Je fais comment ? Je me renseigne d’abord sur la façon de le faire et sur l’acquisition des compétences techniques qu’il me faut pour y parvenir. C’est se dire aussi qu’il est possible de créer son métier. On part à la pêche aux infos. On lit. On rencontre du monde. On va voir. On teste la réalité de terrain. On écoute des podcasts qui traitent du sujet. On habite à Virton et on se sent loin du milieu ? Il y a forcément un réalisateur dans le coin, prêt à vous aiguiller. Pousser l’enfant à agir, c’est aussi une manière de le conforter dans son choix. Lui permettre d’aller au-delà des paillettes. Il ou elle veut jouer, raconter, viser un métier précis ? Alors il faut pousser les portes. »Passer du rêve à la réalité, génial, encore faut-il trouver la bonne info, est-ce que l’ensemble du pays est logé à la même enseigne ? Les infos sont-elles suffisamment accessibles ?
L. D. :
« Forcément, en tant que SIEP, je vais mettre notre asbl en avant. Chez nous, on collabore avec les CPMS, les enseignant·es. De plus en plus à l’avenir, d’ailleurs, puisque le Pacte d’excellence va dans cette direction. Tant mieux, parce qu’aujourd’hui encore, on se retrouve avec des familles qui ne savent pas qu’il est possible de se renseigner sur l’orientation. Pour pallier cela, on intervient dans les écoles. On fait des animations sur les choix d’orientation, sur les choix des options, sur les aides… On encourage et de plus en plus. On sent que les écoles vont dans cette direction. À savoir : proposer des stages, des interviews, des journées d’observation.
De là à dire que tout le monde est logé à la même enseigne dans le pays… Au niveau de l’accès à l’information, oui. Mais les réalités ne sont pas les mêmes. Pour reprendre le cas Virton, la difficulté, c’est de résoudre la question des déplacements, du logement, de financer tout ce qui est périphérique aux études. C’est davantage un problème de moyens. »

Aux familles bientôt dans cette réalité, quelles portes pourrait-on leur indiquer à franchir pour bien se renseigner ?
L. D. :
« Encore une fois, le SIEP garantit une neutralité. Nous avons différents services liés autant à l’éducation qu’à l’emploi. Je précise que c’est un accès à l’info complètement gratuit. L’occasion de mettre les parents en garde : attention aux offres payantes en tous genres qui proposent un coaching. Soyez critiques et profitez d’abord de tout ce dont vous disposez à portée de main. Un organisme comme le nôtre existe par son envergure ‘Salon’. On essaie de toucher les personnes par différents moyens. On est là pour répondre aux craintes tout à fait légitimes des parents et des enfants. Nous avons une série de ressources numériques sur metier.siep.be pour d’abord inspirer. Ce n’est pas un catalogue, mais un outil qui permet d’avancer petit pas par petit pas. Une façon de structurer son choix. De manière générale, les différents centres d’information jeunesse répondent de façon tout à fait pertinente aux questions que se posent parents et enfants. »

Vous parliez d’aides. Là encore, l’info n’est pas toujours à la portée des parents…
L. D. :
« Oui, ils ne toquent pas forcément à la bonne porte et il faut bien se renseigner pour obtenir la bonne info. Le portail aides-etudes.cfwb.be est très complet. Il répertorie tous les types d’aides qui existent, tant pour le soutien, l’accompagnement que pour l’aide matérielle ou l’obtention des allocations d’études, voire même l’aide à la réussite ou l’aide aux besoins spécifiques pour les familles avec un enfant en situation de handicap. Les CPAS ainsi que les centres d’info jeunesse peuvent vous aider à trouver la bonne info. »

ZOOM

« C’est pas un vrai métier »

Règle n° 1 ? L’orientation ne doit jamais être un conflit. Votre enfant s’engage dans une voie qui ne vous convient pas pour une raison ou pour une autre. Pourquoi ne pas essayer d’aller au-delà des divergences pour comprendre ce que ça provoque chez vous ? On peut être étonné quand on creuse, nous disent les expert·es interrogé·es pour les besoins de ce dossier.
Plutôt que de se braquer, essayer le plus possible d’étirer le scénario, comme on vient de le voir. Qu’est-ce qui peut être testé, est-ce que le métier existe, est-ce qu’une des formations pour y accéder est validée par la FWB ? Vous mettez quelques filtres et voyez si ça vous rassure. Le plus important consiste à questionner ses craintes, pour les dépasser.
Parfois, c’est aussi dans l’histoire du parent, votre propre histoire, donc, qu’on retrouve des éléments de réponses aux inquiétudes. Un compromis, une voie que vous avez tentés et qui n’ont pas marché ? D’ailleurs, c’est ce qui se passe le plus souvent : le parent craint l’échec. Hélas, on ne peut jamais l’éviter à ses enfants. Ils peuvent trébucher. Tomber. Ils apprendront toujours. C’est ce qui façonne leur expérience et leur permettra de rebondir.

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