Crèche et école

L’école est un levier unique pour faire bouger les choses. Voyons comment les parents se servent de la caisse de résonance scolaire pour changer le monde. Ou tout du moins, le monde proche.
On ne le dit jamais assez, l’école est un véritable carrefour de la mobilisation citoyenne. Il s’en est joué des combats depuis l’école. Des combats importants. Des parents qui se mobilisent contre l’expulsion d’un petit copain ou d’une famille sans papier. Des enjeux environnementaux. Des considérations sur l’alimentation. Des collectes. Des manifestations. Des grognes.
Tout part de l’école
Nicolas est l’un de ces papas qui a porté plusieurs combats avec d’autres parents via l’école. Dans son école en Région bruxelloise, tout est très hiérarchisé « Nous constituons des groupes autour de l’AP pour valider nos combats. Nous sommes, par exemple, parmi les premiers dans le pays à avoir posé des capteurs d’air dans notre école. Les taux de pollution exorbitants nous ont alertés et nous avons réussi à mobiliser la commune. Puis, très vite, notre combat a été validé par la présence médiatique de la ministre de la Mobilité de l’époque, Elke Van den Brandt, ce qui en a encouragé d’autres à nous rejoindre. Nous avons illustré cette pratique qui est reprise depuis par plein de collectifs de parents et permet soit d’éviter de trop concentrer la mobilité et donc polluer aux abords des écoles, soit de bloquer tout court la circulation ».
Des groupes qui réfléchissent et s’organisent pour repenser la mobilité active à l’école, c’est un des exemples de mobilisation potentielle.
Une vitalité démocratique
D’autres organisent de grandes manifestations, sportives le plus souvent, pour reverser des dons à des associations. Certaines écoles, comme celle de Nathalie*, fédèrent tous les établissements d’une commune pour se soulever contre des pratiques qui leur semblent absurdes ou pour organiser une action solidaire pour les familles sans papier avoisinantes.
« Notre école, dans la région liégeoise, est très active sur toutes les questions liées à la citoyenneté. On a une sorte de petit savoir-faire. D’abord, on fait du bruit. Ensuite, on mobilise les associations concernées par nos combats et, s’il le faut, on va jusqu’à sonner à la porte de porte-voix comme le Délégué général aux Droits de l’Enfant. Il faut attirer l’attention et, là, les choses bougent vite. »
Si nous avons rencontré des équipes éducatives plutôt convaincues du bien-fondé de ces actions portées par les parents, d’autres s’en méfient. Ainsi, Margareth*, directrice d’un établissement en Région bruxelloise, appelle à la plus grande prudence.
« Je suis convaincue que l’école a pour vertu d’éduquer à la citoyenneté, moins d’être porteuse de combats. D’abord, ça nous met souvent en porte-à-faux vis-à-vis des autorités. C’est nous qui devons gérer ces tensions, pas les parents. Ensuite, c’est souvent sujet à des dérives idéologiques. Et donc à des tensions qui peuvent aller loin, et ça peut aller vite. »
Pour Christophe, préfet des études dans le Brabant wallon, il devrait y avoir de vraies concertations citoyennes à l’école. « On devrait créer un espace de rencontre pour toutes ces questions qui sont presque de l’ordre de l’instruction civique. On réunit un ou deux parents du comité, quelques délégué·es des élèves, une heure par mois. Pas plus. Mais on s’y tient. Une heure pour aborder toutes les problématiques qui ont comme point commun le vivre ensemble. Ça éviterait des assemblées générales barbantes ou vides. Et ça maintiendrait une véritable vitalité démocratique ».
* Prénoms modifié
ZOOM
L’émancipation collective passe par l’école ?
Nicolas Duvivier de la Fapeo a rendu récemment son rapport consacré à l’émancipation collective des parents d’élèves en 2024. Il interroge de façon très technique et pointue la façon dont les parents d’élèves peuvent étendre « leur domaine de responsabilité dans l’espace institutionnel scolaire ». De l’impuissance structurelle à la déresponsabilisation institutionnelle, tout est passé en revue et truffé de références prestigieuses, des Stiegler père et fille à Frédéric Lepage.
L’idée est de ramener un peu plus d’Éducation Permanente en réfléchissant à des outils démocratiques adaptés et tournés vers l’émancipation. Vaste programme participatif que l’on suit évidemment de près. Tout ce que l’on sait pour l’heure, c’est que l’analyse se termine en citant Jacques Brel : « La pire forme d’absurdité est d’accepter le monde tel qu’il est et de ne pas lutter pour un monde tel qu’il devrait être », raccord avec ce dossier qui vous invite, parents, à plus d’union.
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