Développement de l'enfant

Splash, sa petite main plonge dans la purée

Splash, sa petite main plonge dans la purée

Dans quelle ambiance les repas de votre bébé se déroulent-ils ? Ils ne se confondent sans doute pas encore avec ceux de toute la famille. Votre bébé réclame votre disponibilité totale. Il prend des initiatives (avec sa cuillère ou son repas même), observe ce qui se passe autour de lui, chipote (un peu ou beaucoup), se montre distrait…

« Depuis un petit mois déjà, Samy aime mettre sa main dans sa purée. Il a besoin de toucher ce qu’il mange. En fait, il découvre par le toucher. Notre attitude à nous varie surtout en fonction du temps dont on dispose. Si on doit se dépêcher, on évite qu’il ne se salisse et donc on le freine dans son élan. Par contre, si on a du temps, on lui retrousse les manches et on le laisse explorer. Samy ne fait pas (encore) de bêtises pour nous embêter, même s’il fait des choses qui ne sont pas toujours adéquates, témoigne Caroline, sa maman. Dès qu’il aperçoit son bol ou son biberon, il s’excite comme s’il n’avait pas mangé depuis des jours ! Pour composer ses menus, on puise souvent dans le panier bio qu’on reçoit et dans les restes. Samy est un bon mangeur. S’il ne mange pas à un repas, je ne stresse pas car il n’est pas maigrichon, je me dis seulement que je devrai un peu avancer l’heure de son repas suivant. »
Comme le petit Samy, certains enfants ont besoin de toucher la nourriture avec les mains, de sentir avec les doigts la texture et la température des aliments. D’autres se satisfont de sentir la cuillère entrer dans leur bouche. D’autres encore ressentent la nécessité de mettre la main dans la bouche en même temps que la nourriture. Avec certains bébés, le repas se termine en champ de bataille. Alors que le bavoir d’autres recueille à peine une ou deux taches.
Quel que soit le style de votre bébé, il vous faut de la patience. Et aussi du détachement. « Le parent prépare le repas de son enfant, il lui donne à manger, mais il faut vraiment qu’il lui passe le relais : c’est l’enfant qui sait s’il a faim, s’il aime ce qui lui est présenté, si, pour une raison ou une autre, il a moins d’appétit ou s’il a assez mangé », insiste Catherine Ghion, infirmière qui a travaillé dans une collectivité de jeunes enfants. Lui passer le relais, c’est installer les conditions de son autonomie alimentaire, c’est lui faire confiance dans sa capacité à réguler sa faim et sa satiété. Le forcer à manger n’a, dès lors, pas de sens. Qu’il finisse son bol ou son biberon ne devrait pas être un but en soi ! « Il y a quelque chose de l’ordre de la pulsion de vie dans l’acte de manger. En donnant à manger à son bébé, le parent est facilement renvoyé à son vécu archaïque, à la façon dont lui-même a été nourri étant petit. Avec, comme effet, qu’il peut être angoissé par son bébé s’il ne mange pas et avoir des attitudes inadéquates à son égard. En même temps, le fait que le parent ait du plaisir à voir son enfant bien manger est positif pour ce dernier. Mais il ne faudrait pas que ce plaisir se transforme en pression sur l’enfant. »

Pour ne pas se perdre parmi tous les avis…

La diététique infantile est une science éminemment colorée de culturel. Sinon, comment expliquer que des règles différentes ont cours chez nos voisins français et chez nous ? Si entre parents d’un tout jeune enfant, vous discutez de panades et de purées, vos conversations virent parfois à la caricature : « Tu lui donnes déjà un jaune d’œuf ? – Oui, ma pédiatre m’a dit qu’il n’y avait pas de problème ! – Mon pédiatre à moi m’a dit que ce n’était pas bon, qu’il fallait attendre un peu… » Alors, un conseil : ne vous laissez pas déstabiliser par les avis multiples, voire contradictoires, que vous entendez. Prenez un référent en qui vous avez confiance – votre pédiatre, l’équipe de la consultation ONE… – et tenez-vous en à ses recommandations.

Ne vous laissez pas déstabiliser par les avis multiples, voire contradictoires, que vous entendez. Prenez un référent en qui vous avez confiance – votre pédiatre, l’équipe de la consultation ONE… – et tenez-vous en à ses recommandations

Les repas de votre bébé continuent d’être ce qu’ils étaient à ses 6-7 mois. Jusqu’à ses 12 mois, comptez quatre à cinq repas par jour : trois repas de lait (lait maternel ou lait de suite ou 2e âge, enrichi en fer), un repas de légumes (moitié légumes, moitié pommes de terre, ou deux tiers légumes, un tiers pommes de terre si votre bébé est un gros mangeur, le tout avec un petit peu d’huile ou de beurre frais) accompagné de l’équivalent de deux cuillères à café de viande, volaille, poisson ou œuf, et un repas de fruits. Vous pouvez aussi lui présenter des féculents avec du gluten ou du pain écrasé dans du lait. Pas de produits laitiers pour l’heure. Et évitez les croûtes de pain. Dans quelque temps, votre bébé aimera porter en bouche des petits dés de pain, puis mâchouiller une croûte. « La plupart des bébés sont conformistes : ils aiment ce qu’ils connaissent. Il est intéressant de leur faire découvrir le plus d’aliments possible parce que l’équilibre est dans la diversité », souligne Catherine Ghion. Aujourd’hui, vous êtes sans doute au clair avec les quantités dont votre bébé a besoin. Et, si cela vous aide, vous vous rassurez avec ses courbes de croissance auprès du médecin.

Du tout lisse vers l’écrasé

Rien de nouveau, alors, dans l’assiette de votre bébé ? Du côté de la texture… peut-être ! Si les aliments sont encore mixés et ont une consistance lisse, parfois, par le fruit du hasard, il tombe sur l’un ou l’autre petit morceau. « Certains enfants aiment, surtout ceux qui ont déjà des dents, d’autres n’aiment pas et recrachent, observe Catherine Ghion. L’absorption du liquide et du tout lisse demande un mouvement de la langue arrière-avant. Avec des petits morceaux, il y a une circulation des aliments beaucoup plus désordonnée dans la bouche, un peu latérale aussi. La langue, au lieu d’aller simplement de l’arrière vers l’avant, va davantage pousser les aliments contre les faces internes des joues. Même si l’enfant n’a pas de dents, il peut aller vers une pré-mastication. L’idée, c’est d’évoluer progressivement vers des aliments qui ne sont plus complètement mixés. » Autre évolution à venir : bientôt, les aliments ne seront plus complètement mélangés. « On séparera peu à peu les goûts. Par exemple, on présentera séparément les pommes de terre et les légumes dans l’assiette. Certains bébés apprécieront et d’autres n’apprécieront pas. Ensuite, on présentera de tout petits morceaux de viande, et là encore, on observera comment l’enfant se débrouille avec cette nouveauté. » Bref, aujourd’hui, si un ou deux morceaux apparaissent dans la panade de votre bébé, ce n’est pas grave. S’il apprécie, tant mieux ! Sinon, continuez avec le tout lisse. « Il y a des bébés qui n’aiment pas les morceaux et qui mangent du tout lisse jusqu’à 18 mois, ce n’est pas un problème ! »
Le climat émotionnel des repas compte. En faire des moments de plaisir, sans stress inutile, est précieux. « Si les repas à la cuillère consomment beaucoup d’énergie, les repas de lait, sein ou biberon, constituent des oasis de douceur tendre, d’abandon confiant, de chaleur et de sécurité », rappelle Catherine Ghion. Cela n’empêche, votre « grand » bébé, de plus en plus actif, apprécie aussi de tenir seul son biberon, certes bien lourd quand il est plein.
Observez-le dans ses initiatives. Son habileté manuelle se développe. Bientôt, quand vous déposerez devant lui des petits morceaux de fruits ou de pomme de terre, il aura du plaisir à les prendre avec les doigts…

LA QUESTION

Votre bébé a-t-il assez mangé ?

Catherine Ghion, infirmière qui a travaillé dans une collectivité d'enfants

L’appétit du bébé peut être fluctuant. Ainsi, 8-9 mois est un âge où la poussée dentaire est au travail : cela peut non seulement avoir un impact sur l’appétit, mais aussi donner des sensations désagréables en bouche qui diminuent l’envie de manger. C’est aussi un âge où le bébé est un peu plus exposé aux petits virus digestifs (gastro-entérites banales…) qui peuvent le rendre vaseux, barbouillé… Il convient de respecter ses variations d’appétit.
Il est important de ne pas forcer le bébé à terminer ses rations. Mieux vaut observer ses signes de satiété. Ainsi, est-il moins rapide pour « sauter » sur sa cuillère, la bouche grande ouverte ? La repousse-t-il brusquement ? Détourne-t-il la tête quand la cuillère s’approche de sa bouche ? Repousse-t-il son assiette ? Est-il plus distrait ? Regarde-t-il ailleurs ? Si c’est le cas, alors le parent peut lui restituer le sens de ce qu’il observe : « Ah, tiens, on dirait que tu as moins faim… » L’idée est d’amener l’enfant vers l’autonomie alimentaire, en lui faisant confiance dans sa façon de réguler ses apports alimentaires.

LES PARENTS EN PARLENT…

Des petits morceaux déjà, pourquoi pas ?
« Désormais, que je sois pressée ou pas, je n’utilise plus systématiquement mon robot pour mixer les fruits et les légumes de Noé : j’écrase à la main. Bon, le résultat n’est pas nickel. Dans la précipitation, il arrive que je laisse des petits morceaux de banane ou de pomme de terre, par exemple. Je me suis rendu compte que Noé ne les recrachait pas quand il les avait en bouche, il semble apprécier cette nouvelle texture… »
Maeva, maman de Noé