Vie pratique

Streaming à torrent et tout fout le camp

Nos ados, cette fameuse génération Z, enterrent pour de bon cette image d’Épinal : une famille affalée sur le canapé, scotchée devant la télé. La nouvelle marotte ? Les applications de streaming qui ont le vent en poupe et surpassent de loin le tube cathodique. Mais s’ils sont autres, les pièges sont tout aussi nombreux. On en parle avec vous, parents.

Un géant de la VOD bien connu, Netflix pour ne pas le citer, de plus en plus présent dans les foyers, a bouleversé bien des habitudes en matière de consommation d’écrans. Pour ceux qui ne connaissent pas le principe : un usager ouvre un compte chez un fournisseur de contenus (films/séries/docus, etc.) à la demande, le tout visible depuis n’importe quel écran et à n’importe quel moment.
Le petit plus qui cartonne chez les ados ? Il est possible de séparer les comptes et chaque usager possède sa propre grille de programme, quasi sur-mesure. Si ça ne ressemble pas au XXIe siècle, ça… Mais, petit couac : les ados sont accros. De la série à gogo, des programmes qui s’enchaînent non-stop, des propositions issues d’algorithmes sans cesse renouvelées et toujours plus sur-mesure… autant de chausse-trappes pour notre petit gibier. Voyons comment contourner tous ces petits tracas.

L’invisibilité, voilà l’ennemi

« Le pire truc, c’est quand on prend une offre avec plusieurs écrans, car on fait le choix de moins contrôler. Sur les contenus, pas de souci, je fais confiance à mon fils. Le problème, c’est le temps passé dessus. Temps que l’on ne peut évaluer, puisque dès qu’ils sont dans leur chambre, on ne sait pas ce qu’il se passe. L’autre souci, la connexion permanente. Du coup, de la même manière que l’on m’interdisait de regarder la télé quand j’étais petit, là, je coupe le wifi. De la rentrée de l’école jusqu’au souper. Et les matins, le week-end. Et dès que je le rallume, c’est de nouveau l’inondation de streaming. »
Sonia, maman de Louison, 14 ans

L’ordinateur pour le labeur, le smartphone pour la déconne

« Des zombies. Ce sont des zombies. Je les comprends, ils ont juste une icône sur laquelle cliquer et un univers entier s’ouvre à eux. La solution paraît donc simple : interdire tout ce qui est ordi, tablette ou smartphone pour éviter le gavage. En vacances, c’est le bras de fer mais ça marche, mais quand l’école reprend ? L’ordi est un outil obligatoire pour les devoirs. Et la tentation de regarder vite fait une petite série est trop tentante quand on procrastine. L’an passé, j’ai surpris ma grande en plein visionnage alors qu’elle était censée réviser. J’ai donc scindé les usages et défini clairement les outils. L’ordi pour les devoirs, la tablette et le smartphone pour le côté plus ludique. Comme ça, pas de mauvaises surprises. Et si on ne respecte pas, je coupe à jamais. Ce qui m’embêterait bien, au passage… »
François, papa de Raoul, 12 ans, et Lola, 15 ans

On va la jouer à l’ancienne

« Alors, chez moi, c’est pire que tout. J’ai divorcé il y a quelques mois et je déteste tout ce qui est télé, écran, ordinateur, streaming, etc. Pour moi, c’est blanc bonnet et bonnet blanc. Et voilà que ma fille se connecte depuis le compte de son père… chez moi. Elle s’enferme dans sa chambre et regarde des vidéos pendant des heures. On se retrouve chacune de son côté : vive la technologie ! J’ai donc râlé auprès de mon ex et auprès de ma fille. ‘Ce qui se passe chez papa reste chez papa’. Chez maman, on va la jouer à l’ancienne : on parle, on lit, on tricote, on peint. Et si on regarde un film, c’est ensemble devant un bon vieux DVD qu’on aura loué au vidéo club. Car oui, ça existe encore et ils souffrent. Est-on obligé de laisser nos ados être envahis par toutes les nouvelles inventions technologiques ? Je pose sincèrement la question. En tout cas, j’ai décidé que non ».
Annie, maman de Paul, 9 ans, et Ludivine, 15 ans

Je suis un mauvais exemple

« Je veux bien leur dire qu’ils ne peuvent pas regarder trop longtemps des séries en streaming. Que ce n’est pas parce que tout est à volonté qu’il faut consommer sans limite. Le seul problème, c’est moi. Je suis accro. Tous les soirs, dès que j’ai une petite demi-heure de libre, je bouffe du film, du documentaire, sans parler des séries que je regarde jusqu’à pas d’heure. Et, croyez-moi, mes enfants ne manquent pas de me le rappeler. Alors, ce que l’on fait, c’est qu’on se permet un quota de temps au jour le jour. ‘Aujourd’hui, deux heures pour papa dans la journée. Une demi-heure pour Max’. Et depuis, on est toujours en dessous du temps que l’on s’était fixé. Bon, j’avoue ne pas toujours compter mes heures avec exactitude… »
Alex, papa de Max, 16 ans, et Anabelle, 18 ans



Yves-Marie Vilain-Lepage

En pratique

On trime ou on streame ?

Jadis, la télé au milieu du living-room permettait de tout contrôler. Aujourd’hui, l’invisibilité dont parle Sonia, c’est en effet l’ennemi des règles de la maison qui sont tellement contournables du coup. La tentation est grande. Le plus important ? Qu’elles existent, ces règles. Qu’elles fassent office de socle.
Pour cela, il faut qu’elles soient claires. Et que vous fassiez office d’exemple, c’est ainsi que vos grands enfants fonctionnent. Le « Pas de tablette dans ta chambre », alors que vous regardez une série le soir, peinard au lit, voilà qui brouille un peu le règlement du foyer. Dans ce cas-ci, précisez que vous, vous avez le droit et expliquez pourquoi. Tiens, mais c’est vrai, pourquoi au juste ? Parce que vous êtes l’adulte. Parce que vous travaillez dur et que vous l’avez mérité. Parce que les règles ne sont pas les mêmes pour tous. Ça, les ados peuvent l’entendre.
Et vous pouvez même profiter de ce torrent virtuel à volonté pour négocier des petits arrangements. Un peu de vaisselle contre une série. Un peu de ménage et on rallonge le temps de visionnage initialement prévu. C’est une sorte de judo parental, là où vos incohérences sont vos faiblesses et vont vous servir de force.

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