Société

Un voyage scolaire coûteux peut-il être imposé aux élèves ?

Après trois mois d’interruption pour cause de covid, les voyages scolaires reprennent. Une reprise qui signe pour la Ligue des familles, le retour de nombreuses questions de parents relatives à l’organisation de ces séjours parfois très coûteux. L’interrogation qui revient le plus souvent est la suivante : ces voyages sont-ils obligatoires ?

« Avec cinq enfants, un en maternelle et quatre dans le secondaire, je peux vous dire que c’est un casse-tête pour tout payer. Les excursions, les voyages obligatoires. Au mois de septembre, nous avons dû débourser la somme de 985€ hors abonnements de bus... C’est tout simplement impossible. »
« Les voyages coûtent cher. La classe verte la moins chère, c’est 178€. Les classes de neige, 500€ + le matériel (vêtements de ski...). En plus, les voyages sont obligatoires : ‘Si vous ne voulez pas inscrire votre enfant, vous devez le changer d’école, c’est inscrit dans le contrat d’école signé en début d’année’… et si jamais notre enfant est malade et ne peut pas y aller, on n’est pas remboursé ! »

Obligatoires ou non ? Une réponse tout sauf simple

La Fédération Wallonie-Bruxelles ne dit rien à ce sujet dans sa législation. Aucun décret ne traite du caractère obligatoire ou non des voyages scolaires. Le seul outil que l’on peut analyser pour avoir des pistes de réponse est une circulaire, c’est-à-dire des instructions ministérielles aux écoles, qui ne s’appuie, en l’occurrence, sur aucune base légale. Le seul document officiel sur la question laisse entendre que les voyages ne sont pas obligatoires… mais sans le dire clairement.
La circulaire en question n’indique nulle part « les voyages scolaires sont obligatoires »… ni l’inverse. La Ligue des familles a dès lors opéré un travail de déduction à partir des autres indices laissés dans le texte. On en trouve deux :

  • Le premier est l’existence d’un taux de participation minimal des élèves à atteindre pour organiser le voyage. Il faut, par exemple, que 85% des élèves d’une classe comptant entre 20 et 30 élèves participent au voyage pour que celui-ci soit organisé. Si 15% des élèves ne peuvent pas participer au voyage, c’est que celui-ci n’est aucunement obligatoire.
  • Le second indice est l’invitation que reçoivent les écoles à « penser à ceux qui restent » (présent dans la Circulaire 6289 relative à l’organisation des séjours pédagogiques avec nuitée(s) en Belgique et à l’étranger). À nouveau, si des enfants restent, c’est qu’il n’y a pas d’obligation de participer. Plus encore, pour que les élèves qui ne partent pas en voyage ne se voient pas pénalisés, il est demandé aux enseignant·es « d’envisager la mise en place d’un projet alternatif à la destination de ces élèves ».

Est-ce dès lors évident que les voyages scolaires ne sont pas obligatoires ? Ce serait trop simple. Le projet d’établissement peut-il néanmoins contraindre les élèves à partir ? C’est souvent ce que nous disent les parents : « D’après l’école, le voyage scolaire est obligatoire car il est prévu dans le projet d’établissement que nous avons signé en début d’année ».
Effectivement, le projet de l’école est un document engageant les parents, l’élève et l’école à son respect. Or, comme tout contrat entre tiers, il doit se subordonner aux normes supérieures. Ici, on doit donc considérer comme nul le projet de l’école qui prévoit l’obligation de participation à un séjour pédagogique avec nuitée, car il est manifestement contraire au droit de la Communauté française, c’est-à-dire en l’état la circulaire.

La Ligue des familles appelle à une clarification

Les voyages scolaires s’avèrent parfois très coûteux : dans l’enseignement secondaire, toutes années confondues, sur un an, un élève sur deux paye plus de 300€ pour partir en voyage scolaire (selon notre enquête sur l’année scolaire 2016-2017). Dans certaines écoles, la facture monte jusqu’à plusieurs milliers d’euros pour un seul voyage. De nombreuses familles ne peuvent pas se permettre de payer de telles sommes, a fortiori multipliées par deux ou trois enfants. Le coût est d’ailleurs la première raison invoquée par les élèves qui ne partent pas.
La Ligue des familles appelle dès lors la Fédération Wallonie-Bruxelles à inscrire dans un décret le caractère facultatif des voyages scolaires, quelles que soient les dispositions prévues par le projet d’établissement.

L'ACTU

La ministre clarifie les choses

Le 16 mars, la Ligue des familles publiait une brève analyse sur ce sujet. Dès l’après-midi, la ministre de l’Enseignement, Caroline Désir, était interrogée par trois député·es (Ecolo-PTB-PS) au Parlement de la Fédération Wallonie-Bruxelles. Elle a clarifié la situation : non, les voyages scolaires ne peuvent pas être présentés comme obligatoires aux familles. Chacun reste libre d’y participer ou non.
En revanche, elle s’est dit opposée à ancrer cette disposition dans un décret et propose de mettre le focus sur la « réflexion dans l’école » pour permettre à tout le monde de participer aux voyages.

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