Société

Y aura-t-il un jour suffisamment de places en crèches ?

Pour 2 parents sur 3, trouver une place en crèche est jugé « difficile » ou « très difficile ». Et pour cause : nombre d’entre eux doivent s’armer de patience et de ténacité pour espérer obtenir le précieux sésame pour leur enfant. Particulièrement à un tarif correspondant à leurs revenus et au moment où ils le souhaiteraient. Que faire concrètement pour résoudre cette problématique qui semble endémique ?

La solution paraît simple tant elle est limpide : il faut augmenter le nombre de places. C’est d’ailleurs l’optique qui a présidé depuis une vingtaine d’années en Fédération Wallonie-Bruxelles, menant à la mise en place de différents « Plan Cigogne ».
Pourtant, créer de nouvelles places est toujours loin d’être une sinécure. Et leur nombre a globalement diminué de 770 places entre décembre 2019 et mars 2023.
La Ligue des familles a rencontré des acteurs de terrain, des élu·es, des représentant·es des syndicats, des fédérations de crèches et des responsables dans les administrations pour identifier concrètement ce qui coince.

Des premiers pas souvent loin d’être évidents

Pour ceux et celles aux prises avec la création de nouvelles places dont les projets ont été retenus par les pouvoirs publics, le chemin se révèle semé d’embûches. Ce sont des projets très complexes : la durée s’étale sur plusieurs années, les coûts peuvent varier fortement et l’appel à des compétences techniques précises est nécessaire. Extraits choisis.
« J'ai contacté des bureaux d'avocats spécialisés dans les marchés publics – parce que moi [directrice de crèche], comment veux-tu que je ponde un cahier des charges de ce type-là ? Je suis tombée sur quelqu'un qui m'a dit : ‘Ah, mais, madame, pour désigner un bureau d'avocats, vous devez aussi faire un marché public !’ ».
« On a su fin décembre que notre projet était sélectionné, mais oralement. On a reçu les notifications avec un mois de retard, fin janvier. Sauf qu’on a cette épée de Damoclès quand on nous dit tout le temps : ‘Attention, si vous ne respectez pas les délais d'ouverture, vous serez pénalisés’. Mais un mois dans un projet tel que celui-là – on est déjà tout juste au niveau des délais –, c'est hyper important parce qu’au niveau des banques, du bureau d'architecte, tant qu'on n'a pas de notification officielle, ça ne bouge pas. »

Gérer une crèche : lange ou démon ?

Quant aux crèches existantes, elles sont confrontées à un sous-financement chronique. 30 à 50% de leur budget n’est pas pris en charge par la Fédération Wallonie-Bruxelles. Dans les équipes, les puéricultrices et puériculteurs sont épuisé·es et mal reconnu·es, ce qui contribue aux difficultés de recrutement dans le secteur. Et les responsables d’équipes triment pour maintenir vaille que vaille un fonctionnement de qualité.
« Les moyens manquent… et les bras manquent. On est en train de se concentrer sur la qualité de l'accueil, mais la qualité de l'accueil passe par le nombre de bras. Et le financement actuel, pour cela, est complètement insuffisant. »
Ces freins amènent certains pouvoirs organisateurs à s’interroger sur l’intérêt de développer leur offre d’accueil ou d’investir dans la petite enfance. Un paradoxe, alors que les besoins sont criants et les parents trop souvent laissés sans solution d’accueil accessible.
« Si tu cumules les difficultés financières, comment veux-tu que les opérateurs se lancent ? Il faut être cinglé [rires], ou convaincu, ou vraiment décidé au sein d’un pouvoir organisateur d'une commune [sur le fait] que la petite enfance est vraiment quelque chose de prioritaire et que tu décides d'en faire une priorité, de le financer en tant que tel. Mais sinon… »

Un enjeu politique majeur dans l’année électorale à venir

Compte tenu de ces réalités, la Ligue des familles a dressé un ensemble de pistes de travail afin de tenter de répondre à ces problématiques, parmi celles-ci notamment :

  • créer un service public spécialisé dans l’accompagnement de ces projets, alliant expertise en matière de marchés publics, sur les aspects techniques et architecturaux, et en matière de normes d’accueil de la petite enfance.
  • mieux informer les porteurs de projets quant aux coûts, à la durée et aux aspects techniques, sur base des expériences passées.
  • améliorer les conditions de travail des puéricultrices, notamment à travers une prise en compte de la pénibilité spécifique à ce métier.
  • assurer un meilleur encadrement : 1,5 équivalent temps plein de puéricultrices pour 7 enfants, au lieu d’1ETP actuellement.

Remettez-en une couche à nos côtés

Évidemment, la création de nouvelles places reste cruciale. La Ligue des familles en a fait l’une de ses revendications politiques majeures en vue des élections à venir, en demandant la création de 10 000 places supplémentaires. Et c’est le cœur de sa campagne de sensibilisation qui démarre ce 25 octobre.

Rendez-vous ici pour connaître la situation dans votre commune et interpeller vos élu·e·s.

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