Développement de l'enfant

Bébé n’a pas que les pleurs pour s’exprimer

Votre tout-petit n’a pas que ses pleurs pour exprimer qu’il a besoin d’être apaisé, caressé, nourri, porté, stimulé, bercé. Non, les pleurs ne sont pas son seul langage ! Invitation à observer votre bébé avec Ingrid Bayot, sage-femme et formatrice en périnatalité et en allaitement.

Les pleurs ne sont-ils pas LE moyen d’expression du bébé qui ne sait pas encore parler ?
Ingrid Bayot :
« Les pleurs sont un signal important. Mais, avant eux et autour d’eux, il existe d’autres signaux corporels, d’autres comportements qui permettent, si vous en tenez compte, de ne pas attendre que votre bébé pleure pour vous ajuster à lui. »

Quels sont ces signaux, ces comportements ?
I. B. : « Ils sont nombreux. Parmi eux, plusieurs sont simples à repérer. Ce qui compte pour un parent, c’est observer son bébé : les expressions de son visage, son tonus musculaire et sa posture, les mouvements qu’il fait. Autant d’indices qui montrent qu’il est prêt à continuer dans une interaction, à vivre des découvertes, à recevoir de la nouveauté ou, au contraire, qu’il a besoin d’une pause dans tout cela.
Il y a bien entendu des variantes d’un bébé à l’autre, mais les comportements d’approche (‘Je suis ouvert aux stimulations’) et les comportements de retrait (‘Stop, les stimulations deviennent trop intenses’) se ressemblent pour l’ensemble des bébés (1). »

Pouvez-vous les préciser ?
I. B. : « Au départ, ces comportements sont des réflexes. Mais plus le parent y porte attention, plus le bébé y a recours. Côté comportements d’approche : le bébé a le visage détendu, il vous suit du regard, il a une posture arrondie, il se blottit contre vous, ses mouvements sont doux et vont vers l’avant… Les comportements de retrait : le visage du bébé se crispe, son regard se détourne, son dos se raidit, il se cabre vers l’arrière, ses mouvements deviennent brusques… Bien sûr, il faut toujours remettre les choses dans leur contexte pour éviter les interprétations au premier degré !
Votre bébé et vous êtes face à face et vous lui parlez. Il ‘prend’ ce moment. Votre regard capte le sien, il est souplement blotti dans vos bras. Quelques instants plus tard, il détourne le regard, son dos se raidit, il étend un bras, une jambe… Ce n’est pas que cette interaction ne lui convient pas, mais elle ne lui convient plus à ce moment-là. Il a besoin d’une pause pour intégrer les nouvelles sensations. À la prochaine interaction, il tiendra sans doute plus longtemps. »

Stimulation ou surstimulation ?

Un bébé n’est donc pas le même à 2 semaines, à 1 mois, à 1 mois et demi…
I. B. : « Exact ! Pour se développer, un bébé a besoin à la fois de sensations connues et de nouveautés. Et son monde est tout le temps en train de s’ouvrir. Quand il est bien dans ses repères connus, il a envie d’explorer. Par exemple, à la maternité, passer de bras en bras désorganise un nouveau-né. Il a juste besoin d’être ‘couvé’. Alors qu’un mois plus tard, à une réunion de famille, il sera content de voir plein de monde !
Un papa qui fait l’avion avec son tout petit bébé saisit vite que cette stimulation est trop forte pour lui : l’enfant se raidit, multiplie les mouvements vers l’arrière et finit par hurler si l’on continue. Mais, quatre mois plus tard, il se mettra à rigoler quand son papa le fera tournoyer. Il battra des mains, en redemandera… jusqu’au moment où son rire deviendra nerveux et sa posture crispée. Avant qu’il ne se mette à hurler, son papa, qui aura repéré son changement de réceptivité, pourra le prendre contre lui pour l’aider à intégrer ces sensations fortes. »

On passe de la stimulation à la surstimulation…
I. B. : « Pour saisir la frontière entre les deux, le bébé est notre meilleur guide. Exemple classique : de retour de l’école, votre aîné, 4-5 ans, se jette sur le cadet, 1 mois, joue avec lui et l’excite. Le petit adore… un temps. À un moment donné, il montre des signes que c’est assez pour lui. Si le grand continue sur sa lancée, le petit finit par pleurer. Ce qui était jusque-là une stimulation joyeuse est en train de devenir une surstimulation, un ‘trop’. Il est très valorisant pour un aîné d’apprendre à repérer les signaux qui précèdent les pleurs. »

Une danse  à deux

Le bébé réagit aussi différemment selon les moments de la journée, ce qui s’est passé avant…
I. B. :
« En effet, une stimulation qui lui plaît beaucoup le matin, il peut ne pas l’apprécier le soir. Une maman propose un massage à son bébé, mais il est tout raide et regarde ailleurs. Elle comprend qu’il vaut mieux qu’elle l’enveloppe et le prenne contre elle. Cela ne signifie pas que le massage n’est pas bon pour le bébé, cela veut simplement dire que ce n’est pas ce qui lui faut à ce moment. Si elle lui propose de nouveau un massage un peu plus tard, quand il fait plus chaud dans la pièce, quand il est apaisé, quand elle-même est plus paisible, son comportement dira sans doute : ‘Je suis prêt à vivre cette activité’. »

Entre le bébé et son parent, il y a des réajustements permanents : vous parlez d’une danse à deux…
I. B. : « Le bébé a des compétences pour s’autoréguler, se réconforter lui-même, rester en équilibre avec lui-même et son environnement : porter les mains à la bouche, croiser un regard, s’agripper à un doigt ou à un bout de tissu, se protéger avec les bras, frotter ses jambes l’une contre l’autre…
Et puis, le bébé est co-créateur avec son parent des relations qu’ils établissent entre eux. Quand il montre des comportements de retrait, le parent peut coréguler, en lui parlant doucement, en le regardant dans les yeux, en le contenant, en le berçant… Plus votre bébé vit proche de vous et plus vous l’observez, plus il vous sera facile de vous adapter à lui. Je ne dis pas qu’un bébé ne va jamais pleurer, mais il aura moins besoin d’avoir recours aux pleurs. »

(1) Ces observations sont tirées des travaux du Dr Heidelise Als, élève du pédiatre américain T. Berry Brazelton, pour soutenir le développement des bébés prématurés : il s’agit de la théorie synactive du développement.

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