Développement de l'enfant

Ces beaux gestes entre parent et bébé

Porter, habiller, baigner, nourrir, bercer un bébé, « papoter » ou jouer avec lui… Autant de gestes habituels, banals, qui sont en fait essentiels, à la base de son développement. Ils méritent notre attention. La démonstration avec Bénédicte Guislain, kinésithérapeute pédiatrique.

Bénédicte Guislain est kinésithérapeute pédiatrique, formée en neuropédiatrie (Bobath) et à la néonatologie (NIDCAP*). Les lectrices et lecteurs du Ligueur et mon bébé la connaissent : elle fait partie de son équipe de rédaction. Elle vient de sortir Bonjour Bébé. Interagir par les gestes du quotidien (Érès), fruit de plus de vingt-cinq ans d’expérience. Enrichi par les photos de Michaël De Plaen, cet ouvrage hors mode, concret, précis revient aux fondamentaux. La kinésithérapeute y aborde le développement de l’enfant à travers le prisme de sa motricité, et donc « par son tonus, sa posture, ses mouvements ». Une vision globale, car tout est lié : le moteur, le psychique, le cognitif et le social.
On retrouve Bénédicte Guislain chez elle, alors qu’elle achève de prendre son petit-déjeuner avec sa petite-fille, 2 ans et demi. L’aisance avec laquelle celle-ci sort de sa chaise haute résume à elle seule les messages que la kinésithérapeute transmet, avec force, dans ses consultations et les formations qu’elle donne.
Et déjà, celui-ci : « Tout est mouvement : respirer, manger, parler, être dans la relation, bouger bien sûr… Quand le mouvement va mal, il va malmener les autres domaines du développement. Quand il va bien, il va les soutenir ».

Grandir en harmonie

Grandir en harmonie… C’est du concret pour Bénédicte Guislain. « Le développement est harmonieux quand tous les domaines sont investis par l’enfant et s’épanouissent, chacun en son temps. Des parents disent, fièrement : ‘Mon bébé n’explore pas l’espace, mais il aime beaucoup regarder des livres, ce sera un intellectuel’. Eh bien, non, il est important de le nourrir de tout. Même si, on est bien d’accord, certains bébés sont plus moteurs, d’autres plus observateurs. Même si chacun évolue à son rythme ». Sur le plan strictement moteur, « l’harmonie renvoie à un bébé qui bouge de façon aisée, fluide. Pour lui, le mouvement est comme une danse. Il n’y réfléchit pas, il n’y a pas d’effort, pas de tension ».
Bref, un enfant au développement harmonieux, « c’est comme un beau film qui, à chaque fois qu’on le regarde, se renouvelle. On ne se lasse jamais », se réjouit Bénédicte Guislain.
Dans sa pratique, la kinésithérapeute dit être souvent confrontée à la peur de mal faire des parents ou à leur souci d’atteindre la perfection avec leur bébé. « Surtout, on n’a pas conscience de l’importance des gestes du quotidien pour le développement de l’enfant », insiste-t-elle. On n’imagine ainsi pas tout ce qu’on lui communique à travers eux. « Si vous soulevez le bébé comme un sac à patates, vous lui faites passer l’idée négative : ‘Tu n’es capable de rien, il faut que je fasse tout pour toi’, ce qui le pousse à la passivité. Une fois que vous comprenez cela, vous allez le prendre de sorte à lui donner un message positif : ‘On va faire alliance, toi et moi’. Il va alors faire corps avec vous et être actif ».

Éloge de l’observation

Parents, observez votre bébé : voilà un leitmotiv cher à Bénédicte Guislain. C’est, pour elle, « regarder avec attention ce qu’il fait et comment il le fait, s’intéresser à ses expériences sensorimotrices, se nourrir de cette observation ».
En découle « un plaisir à l’observer », déjà. Parfois, des questions surgissent – « Il ne fait pas telle ou telle chose, est-ce normal ? ». « À ces questions, il n’est pas rare que le bébé réponde lui-même, en faisant un peu plus tard ce qu’il ne faisait pas jusque-là ». Des inquiétudes peuvent apparaître : avec un bébé « mou », qui se jette en arrière, qui a du mal à se retourner sur le sol ou à se concentrer… Des pistes sont données dans l’ouvrage pour orienter les parents.

Un enfant au développement harmonieux, « c’est comme un beau film qui, à chaque fois qu’on le regarde, se renouvelle. On ne se lasse jamais »

« L’observation permet au parent d’ajuster ses gestes aux besoins et aux compétences de l’enfant, et ainsi de favoriser son développement ». Il s’agit aussi d’adapter son environnement en conséquence, en réorganisant son espace, en lui proposant de nouveaux jouets… Être présent à son bébé, l’observer, s’ajuster à lui : c’est tout cela l’accompagner dans son développement.
Et savoir que, si vulnérable et dépendant qu’il soit, il « naît avec un potentiel époustouflant », aime à rappeler Bénédicte Guislain. « Il est important de permettre au bébé d’être acteur de son développement. Sans compter que quand il fait équipe avec l’adulte, c’est beaucoup moins lourd pour ce dernier ». D’où l’intérêt de ne pas le soulever comme un sac à patates ! Ou de ne pas l’habiller comme s’il était une poupée : « Dès le début, vous pouvez inviter le bébé à tendre son petit bras, à donner sa petite main… En grandissant, il deviendra de plus en plus compétent ». Finies, alors, les batailles avec un enfant de 10-12 mois qui s’agite dans tous les sens sur la table à langer !

Un bagage pour la vie

Bénédicte Guislain plaide pour l’autonomie dans les apprentissages. Le développement est un processus. Au bébé d’en franchir les étapes par lui-même. Chacun de ses exploits prépare les exploits suivants. Mais le mot « autonomie » est souvent mal compris, regrette la kinésithérapeute. « Ce n’est pas, comme certains le croient, laisser le bébé faire tout, tout seul ! C’est lui permettre de faire la part de ‘tout seul’ qui est possible pour lui à un moment, et cela, avec votre accompagnement. Si vous êtes soucieux de son autonomie, vous ne le mettez pas assis (ce qui le rendrait complètement dépendant de vous), vous attendez qu’il trouve par lui-même la position assise (ce qu’il prépare notamment en se positionnant à quatre pattes) ».
Chaque enfant a son rythme : à respecter. « Une idée, elle aussi, parfois mal interprétée. Si le respect du rythme du bébé compte, avoir des repères en tête aide à voir s’il est bien dans un processus d’évolution. S’il s’écarte trop des repères, c’est un petit signal d’alarme ». Il alerte sur l’utilité d’ajustements. Et puis, « il ne faut pas hésiter à prendre conseil, à consulter ».
À partir du moment où le parent s’ajuste aux besoins de son bébé, il fait de la prévention. « Prenez un bébé de 6 mois qui regarde partout et manque de concentration. On le qualifie de curieux. Cette petite faiblesse, on peut la travailler en lui proposant des moments d’attention : enlever ses chaussettes, jouer avec ses pieds… ».
Faire équipe avec son bébé, pour qu’il avance le mieux possible, voilà une belle aventure ! Et chacun a son « mieux possible ». Cela donne un bébé bien dans sa peau, en sécurité (psychique et physique), en confiance (en lui-même et en l’autre). « C’est un bon bagage pour la vie ».

* NIDCAP pour « Neonatal Individualized Developmental Care Assessment Program ».

ZOOM

De la naissance à 18 mois

Bénédicte Guislain a conçu son livre en quatre parties, correspondant à quatre tranches d’âge. Avec, pour chacune d’elles, des repères et des suggestions (« jamais des recettes »).

  • De la naissance à 3 mois, ou le quatrième trimestre de la grossesse (selon la formule d’Ingrid Bayot). Le bébé s’adapte à la vie sur Terre. « Son besoin principal : être regroupé en flexion ».
  • De 3 à 7 mois, c’est la période de l’ouverture au monde. « Le bébé découvre et explore la ligne médiane. Il met les mains l’une dans l’autre, les met en bouche, les dirige vers un objet pour l’attraper, il soulève ses fesses, regarde ses pieds. Il relie la droite et la gauche de son corps, le haut et le bas. Jusqu’à, point culminant, attraper ses pieds et les mettre en bouche, à 6 mois ».
  • De 7 à 12 mois, c’est le temps de la découverte du monde, celui de l’« explosion motrice ». Le bébé rampe, va à quatre pattes, découvre comment s’asseoir seul (position acquise à 9-10 mois).
  • De 12 à 18 mois, une tranche d’âge marquée par la verticalité. L’enfant est en marche pour la marche. À 12 mois, il est debout et, à 18 mois au plus tard, il marche. « Si, à 12 mois, l’enfant ne se met pas debout, est-ce qu’on s’inquiète ? Peut-être que oui, peut-être que non. Il faut voir s’il est en train de préparer cette étape par ailleurs. Ce qui compte, c’est tout ce qu’il met en place pour arriver à cet exploit », assure la kiné.

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