Santé et bien-être

Le secteur de la restauration collective, singulièrement dans les écoles, représente un enjeu majeur pour la transition du système alimentaire. Où en sommes-nous ?
En Régions wallonne et bruxelloise, il existe des stratégies pour accompagner les collectivités dans la mise en place d’une politique d’alimentation durable au sein de leur structure. La Cellule Manger Demain en Wallonie et Good Food à Bruxelles ont ainsi développé des labels de restauration durable, respectivement Green Deal Cantines Durables et Good Food.
Du côté des cantines scolaires, pour le moment, 11% seulement se sont lancées dans le défi de la labellisation. Pour certaines, il y aurait un frein économique. Miser sur le durable, le circuit court, les produits sains, c’est aussi accepter une rémunération juste des producteurs et une hausse des coûts pas toujours compatibles avec le portefeuille des familles, notamment celles qui sont précarisées.
En Fédération Wallonie-Bruxelles, en partenariat avec la Cellule Manger Demain, une mesure d’aide aux familles a été lancée, il y a quelques années, pour financer l’accès à un repas scolaire chaque jour. Et cela dans une optique d’approche « universelle », comme cela se fait dans d’autres pays tels que la Finlande. Au cœur de ce projet, l’asbl École à Table (EAT) qui a vu le jour en août dernier grâce à la fondation 4Wings active sur les questions de précarité alimentaire. Marie Crosset et Sophie Aujean, co-directrices d’EAT, ont la volonté de travailler à un changement plus massif que celui rencontré aujourd’hui : « On a clairement identifié la nécessité de développer une méthodologie pour faciliter l’accès à une offre de repas de qualité à l’ensemble des écoles fondamentales ».
Un modèle généralisable
Pour y parvenir, le premier point essentiel était de ramener tous les acteurs concernés autour de la table. Sophie Aujean et Marie Crosset y sont parvenues ! « Les écoles sont soucieuses de vouloir faire mieux. Elles ont un intérêt pour la thématique, explique la première. On réfléchit, on teste ensemble pour valider un modèle généralisable basé sur deux axes : ce qu’il y a dans l’assiette et ce qu’il y a autour de l’assiette (l’encadrement, l’infrastructure…) ». « Tout est validé collectivement, souligne la seconde, c’est une action hyper concertée, c’est ce qui fait la différence ».
Leur modèle se base sur quatre piliers :
- Moins d’aliments ultratransformés. « Qui représentent pour le moment plus d’un tiers des apports énergétiques des enfants en Belgique ».
- Augmenter la part issue de l’agriculture bio. « Le curseur est mis, pour le moment, sur 30% ».
- Adopter le circuit-court. « C’est le point le plus compliqué à mettre en place, mais qui est essentiel pour stimuler l’économie locale ».
- Végétaliser l’assiette. « Plus de repas végétariens permet l’apport de nutriments, le respect de l’environnement et l’allègement de la facture en même temps ».
Ce modèle sera testé sur cent implantations d’ici 2029, et démarre dès la rentrée 2025. « Ce qui se trouve sur papier va être confronté à la réalité, explique Marie Crosset, certaines choses vont peut-être bouger. On va d’abord s’intéresser aux implantations à indice économique faible et du spécialisé, là où la difficulté est la plus grande. Car si on y arrive là-bas, c’est possible partout ».
Valoriser le temps de midi
En parallèle, elles réfléchissent également à l’organisation des repas de midi. « C’est un des points essentiels : la formation des encadrants, insiste Sophie Aujean, À l’heure actuelle, ce personnel est très peu formé, travaille dans des conditions précaires, avec des horaires coupés et un statut fragile. Pourtant, la vie de réfectoire comporte énormément d’enjeux (la discipline, le comportement face à l’assiette…). Mais comme ce temps de midi n’est ni un temps scolaire, ni un temps extrascolaire, il est comme suspendu dans le vide, il est sous-financé et personne ne s’en enquiert vraiment. Ce temps de midi doit être raccroché à un temps scolaire ou extrascolaire pour être financé à sa juste valeur ».
De nos jours, 90% des élèves restent à l’école sur le temps de midi. « Notre démarche est de garantir que les enfants aient un repas de qualité. Mais tant qu’il y a l’alternative des tartines, cela ne fait pas une priorité politique », insiste Marie Crosset. Pourtant ce point est essentiel, parce qu’il touche également d’autres sphères comme l’égalité des chances, la lutte contre la pauvreté, les problèmes de concentration, la lutte contre l’obésité…
Comment les soutenir ? « En nous aidant à faire pression sur le politique pour en faire un sujet. Un repas de qualité avec un bon encadrement est possible si on en fait un choix politique. On ne parle pas de quelque chose de révolutionnaire. Mais il faut que les familles disent que pour elles, ça compte ».
* Chiffre obtenu via Sytra.be
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