Développement de l'enfant

Un temps chez l’un, un temps chez l’autre : le principe de l’hébergement en alternance est a priori simple. Pour peu que l’organisation soit claire et la communication présente. Des enfants entre 9 et 11 ans nous en parlent. Et des parents aussi.
Le grand avantage d’un système d’hébergement en alternance (appelée plus couramment : garde alternée), c’est le climat d’apaisement qu’il suscite chez les parents. Plus question de rapport de force entre eux. Par contre, il arrive que certains enfants aient besoin d’un « port d’attache », c’est-à-dire d’un lieu où ils nouent un lien de stabilité.
Cela peut être un facteur d’équilibre pour certains. Il faudra prévoir alors un lieu « principal » dans lequel il passe un peu plus de temps. Mais, comme l’explique Jacques Boland : « Entre deux maux, il faut choisir le moindre. De toute évidence, l’idéal pour l’enfant est d’avoir ses deux parents qui vivent avec lui sous le même toit. Aucune solution d’hébergement n’est parfaite, mais l’hébergement alterné a le mérite de ne priver l’enfant d’aucun de ses deux parents. »
Le jeune enfant a, cependant, besoin de davantage de stabilité. Pour lui, les magistrats privilégieront un hébergement où il résidera principalement avec sa mère. Quitte à adapter ce mode de garde par la suite.
Côté enfants…
Gaëlle, 12 ans, vit une semaine avec son papa, une semaine avec sa maman : « Pour moi, c’est un bon système car on voit et papa et maman. J’aime bien avoir deux maisons et deux chambres. Et deux fois des vacances aussi et deux fois des fêtes ! Mais pour que ça marche bien, il faut que l’on se sente bien avec nos deux parents… Sinon, tu passes une semaine à attendre d’être… chez l’autre ! Ce qui est bien quand on choisit l’alternance par semaine, c’est qu’on a le temps de se poser. En même temps, je n’aimerais pas que les périodes chez l’un ou l’autre soient plus longues, sinon l’autre parent me manquerait trop ! Quand ça arrive, je sais que je retrouve l’autre après. À mon avis, c’est plus dur pour les parents. Je suis contente que mes parents se soient séparés quand j’étais petite. Au début, j’allais moins chez mon papa. Quand je vois mes copines qui flippent parce que leurs parents se disputent, je suis contente de ne pas connaître ça, ça doit être stressant d’avoir tout le temps peur qu’ils se séparent ou de les entendre se dire des horreurs ! Les miens s’entendent plutôt bien. Ils se parlent au téléphone, viennent ensemble aux visites des parents. Mais, en même temps, ils ne se voient pas beaucoup. Mais je n’aimerais pas ça, car s’ils s’entendaient super bien, ils ne seraient pas séparés, non ? »
Madeleine, 13 ans, vit aussi une semaine avec son papa, une semaine avec sa maman :
« Je préfère le système d’une semaine chez l’un et une semaine chez l’autre avec un jour au milieu où on va voir l’autre parent pour que ce ne soit pas trop long. Mais c’est un système difficile avec les activités extrascolaires. Moi, c’est ce que je fais. Ça complique un peu la vie de mes parents, mais ça me permet aussi d’avoir un soir par semaine sans ma sœur. C’est gai d’être une fois seule avec papa ou maman, c’est plus cool, ils sont plus disponibles… Mais c’est important de voir ses deux parents à égalité. Et puis, ce qui est chouette, c’est qu’il y a des différences dans les permissions. Chez maman, je ne peux pas trop regarder la télé, alors que papa ne dit rien… Par contre, question vêtements, maman sera plus cool que lui. D’un autre côté, pour les grandes décisions ou pour notre éducation, ils sont d’accord, ils ont les mêmes exigences… L’inconvénient, c’est que parfois aux fêtes, comme à Noël ou à un anniversaire, l’autre parent manque… Mais bon, on sait qu’on le verra après. Il y a aussi les sacs à ne pas oublier : quand on passe de l’un à l’autre, c’est parfois compliqué. »
… côté parents
Vivien, papa d’Anaïs 10 ans et Martin 12 ans :
« Je me suis séparé de ma compagne il y a cinq ans, quand Anaïs était encore en maternelle. Je voulais la garde alternée dès le départ, car à mon avis le père apporte tout autant qu’une mère à l’enfant et ce, dès son plus jeune âge, car les liens se tissent très tôt. J’ai dû un peu me battre avec la mère, qui était réticente à un hébergement alterné au début, car elle trouvait Anaïs trop jeune. On a donc instauré un système progressif où, pendant un an ou deux, les enfants étaient un jour de plus avec elle. Maintenant, ils vivent une semaine chez l’un puis une semaine chez l’autre. C’est clair, simple, pas de jaloux… Et ils s’y retrouvent bien, à part quelques oublis de temps en temps. »
Dominique, maman d’Olivier, 12 ans :
« Comme je travaille beaucoup et que le papa était demandeur, j’ai accepté un système d’hébergement alterné. En plus, on n’habite pas loin l’un de l’autre, c’est facile. Simplement, j’ai demandé à avoir Olivier tous les mercredis soirs. C’était trop difficile, sinon. Il me manquait. Là, ça coupe un peu l’absence et ça me permet de rester au courant de ce qu’il fait à l’école. »
Sa. S.
EN PRATIQUE
Pour que ça marche…
- L’âge. À partir de 12 ans, l’enfant est en âge de comprendre et peut être entendu d’un point de vue juridique. Cela ne dispense en rien les parents à tenir compte de ses besoins, pour qu’il ne se sente pas pris en otage entre son père et sa mère.
- Une entente entre les parents. Entendre un de ses parents dire du mal de l’autre est très toxique pour l’enfant car c’est le mettre en porte-à-faux avec une autre partie de lui-même, l’autre parent qu’il aime. Dans le même ordre d’idée, il est essentiel que la communication passe bien entre les deux parents et qu’il existe une cohérence dans les principes éducatifs, afin que l’enfant ne participe pas à des conflits qui ne le concernent pas.
- Une proximité géographique. Si les parents n’habitent pas trop loin l’un de l’autre, les trajets et les passages de l’un à l’autre seront plus aisés. Oublier un sac de gym, un cours ou un médicament sera moins compliqué si les deux parents habitent dans un même secteur.
- Un esprit organisé et rigoureux. Ou à défaut, avoir la volonté de tenir une compatibilité des horaires professionnels (ou autre) de l’un et de l’autre. Mieux vaut être disponible aux moments où l’enfant loge chez vous. Au-delà du principe de la juste répartition du temps, il vaut mieux laisser son gamin ou sa gamine avec l’autre parent s’il est plus disponible que vous, plutôt que l’installer de longues heures devant la télé en attendant votre retour du boulot.