Développement de l'enfant

Et s'il est freiné dans ses mouvements… ?

8 mois, c’est l’âge où le bébé, au sol, a une motricité riche, variée, harmonieuse. On attend de lui qu’il roule, soit à l’aise sur le ventre, commence à se déplacer… Certains petits ne sont, malheureusement, pas dans cette richesse, cette variété, cette harmonie de mouvements.

« Il faut respecter le rythme de l’enfant, il est important qu’il découvre par lui-même les différentes étapes du développement, c’est vrai. Mais il faut aussi savoir que certains enfants, pour une raison ou une autre, ont besoin d’être un peu guidés, de recevoir un coup de pouce », explique Bénédicte Guislain, kinésithérapeute pédiatrique et thérapeute Bobath NDT* au CHIREC (site Delta) et en privé, à Bruxelles. Alors, à quoi faut-il être particulièrement attentif ? Voici quelques repères.

À la découverte de l’autonomie motrice

Vers 8 mois, le bébé acquiert une autonomie motrice. Sur son tapis (style tapis de gym ou tapis-puzzle), il attrape ses pieds, roule sur le dos, sur le ventre, essaie des appuis des mains et des pieds, des poussées, des repoussées, se met en équilibre, en déséquilibre… Il aime attraper et manipuler des objets et devient de plus en plus habile avec ses mains. « Quand on observe un enfant de cet âge – et j’invite les parents à prendre du plaisir à observer leur bébé, et même à se coucher au sol à ses côtés –, on voit qu’il fait mille choses en cinq minutes ! Et si, par exemple, il se retourne, il ne le fait pas deux fois de la même manière ! Il utilise plein de stratégies différentes. Tous ces mouvements vont bientôt l’amener à se déplacer ou le mettent déjà dans une forme de déplacement, laquelle va bien sûr évoluer : elle va devenir plus efficace, plus rapide et plus coordonnée », décrit Bénédicte Guislain. C’est le moment de lui proposer des jouets qui roulent… mais pas trop loin (une balle en tissu, un gros camion…) et des jeux qui l’incitent à prendre un peu de hauteur par rapport au sol – une façon de le préparer au déplacement à quatre pattes. En se mouvant ainsi dans l’espace, le bébé renforce aussi sa sécurité de base.
Bon à se rappeler : une nouvelle compétence psychomotrice n’arrive pas du jour au lendemain, le bébé la prépare pendant des semaines, et ses parents, par leurs comportements appropriés, permettent que ce développement se fasse au mieux. « L’âge de 8 mois est le moment où l’enfant parvient à se déplacer et peut-être déjà à se mettre en position "quatre pattes". Évitez de le mettre assis lorsqu’il joue au sol. Il risque de rester coincé dans cette position, de ne vouloir plus que cela et, dès lors, de passer à côté des apprentissages de son âge. Répétons-le : c’est au sol qu’il va développer ses mouvements, son autonomie et se préparer aux apprentissages ultérieurs. »

Si le bébé bouge peu…

Parfois, des inquiétudes apparaissent au sujet du développement de l’enfant. L’âge de 8 mois étant celui de la richesse motrice, « il faut faire attention à un enfant qui ne bouge pas, n’a pas envie de bouger ou a peur de bouger », insiste Bénédicte Guislain.

Une nouvelle compétence psychomotrice n’arrive pas du jour au lendemain, le bébé la prépare pendant des semaines…

À 7, 8 ou 9 mois, les difficultés que les bébés peuvent présenter sont de différentes sortes ; souvent, elles sont déjà observables avant. Certains bébés ont des vrais retards : « Ils font les bonnes choses mais juste un peu plus tard que les autres. Pour moi, ce n’est pas un souci », indique la kinésithérapeute. Certains petits ont des blocages : ils restent par exemple sur le dos et ne trouvent pas la façon de se retourner sur le ventre. Ou coincés dans la position assise, ils ne sont pas capables de se déplacer. Parfois, on observe une dysharmonie au niveau du tonus musculaire, avec des bébés soit très tendus, très raides, soit très mous. Ils ont des difficultés à coordonner leurs mouvements (de bras, de jambes…). « Pour qu’un mouvement puisse se faire, et pour que ce mouvement soit harmonieux, un certain équilibre entre les différentes chaînes musculaires est essentiel. Parfois, pour des raisons physiologiques, neurologiques…, il y a un déséquilibre dans le tonus de ces chaînes musculaires. » Il y a aussi des bébés qui manquent de coordination œil-main-bouche (ils ont du mal à manipuler des objets…) ou de coordination mains-jambes pour avancer. Par ailleurs, certains bébés sont peu dans le contact, peu dans le sourire, ils restent dans leur monde, ils ne répondent pas à leur prénom, ils ne regardent pas dans les yeux, ils sont peu intéressés par les objets qui les entourent. Attention aussi aux bébés qui utilisent toujours le même côté de leur corps ou toujours la même main : la dominance latérale vient bien plus tard et, à 8 mois de développement, ils devraient être compétents tant de la main droite que de la main gauche.

Consulter et avoir du soutien

Le message que Bénédicte Guislain veut transmettre quand un souci psychomoteur est suspecté chez un bébé : « Mieux vaut ne pas attendre et consulter. Parce que, quand on attend, on laisse s’installer des habitudes qui ne sont pas optimales pour l’enfant et on le laisse s’installer dans la non-activité et dans la dépendance. Si on ne l’aide pas, il va aussi accumuler la frustration. »
Les parents doivent pouvoir se sentir accompagnés et soutenus. Un avis peut être demandé au pédiatre, à la consultation de l’ONE, à un kiné, à un neuropédiatre, aux puéricultrices de la crèche, aux grands-parents… « Il faut pouvoir confronter les avis sans s’y noyer non plus et, même si c’est difficile, il faut essayer de retenir les avis qui semblent les plus cohérents, et pas nécessairement ceux qui sont les plus rassurants. Souvent, les parents sentent ou voient qu’il y a un souci mais ils hésitent à consulter. »
Si le bébé a besoin d’aide, de la kinésithérapie ou de la psychomotricité vont souvent permettre de surmonter les difficultés. Parfois, des examens plus approfondis seront préconisés, pour vérifier s’il n’y a pas une pathologie sous-jacente. Ce n’est pas parce qu’une prise en charge thérapeutique est mise en place que la situation est forcément dramatique. Et plus elle est précoce, plus elle sera bénéfique à l’enfant.

* Thérapeute Bobath (du nom du couple de thérapeutes qui a initié le concept) NDT (pour « neuro-developmental treatment »), Bénédicte Guislain est spécialisée dans la prise en charge d’enfants ayant une atteinte neurologique ou des séquelles liées à la prématurité.

L’AVIS DE L’EXPERTE

Mieux vaut ne pas attendre et consulter

Bénédicte Guislain, kinésithérapeute pédiatrique et thérapeute Bobath NDT

Quand un souci psychomoteur est pressenti chez un bébé, mieux vaut ne pas attendre et consulter. En intervenant adéquatement chez un jeune enfant, on peut souvent rectifier les choses par un coup de pouce qui va tout changer.
S’il s’avère qu’un bébé a un souci neurologique, par exemple, intervenir tôt permettra de ne pas laisser s’installer les mauvaises habitudes qui auront un impact négatif sur son développement. Parce que plus l’enfant est jeune, plus la plasticité cérébrale, c’est-à-dire la faculté du cerveau à se réorganiser, est grande. Intervenir tôt permettra aussi de collaborer au plus vite avec les parents, pour qu’ils apprennent les gestes adéquats pour leur enfant. Ceci est très important.
Certains pédiatres ont tendance à dire : « Ne vous en faites pas, les choses vont se débloquer, respectez le rythme de l’enfant. » C’est vrai qu’il faut le respecter, mais pas à tort et à travers ! Il faut aussi être capable de se dire : « Maintenant, je vois bien que mon bébé stagne et je ne vais pas attendre. »

LES PARENTS EN PARLENT…

Coincé dans la position assise
« À la crèche, tous les enfants qui ont à peu près l’âge de Lucas font des mouvements dans tous les sens, ils roulent, se retournent du ventre sur le dos et du dos sur le ventre, il y en a même qui rampent… Lucas, lui, est coincé dans la position assise, c’est comme s’il ne se sentait bien et stable qu’assis… Dès qu’on tente de le mettre dans une autre position, par exemple sur le ventre, c’est source de stress pour lui : il pleure. Tout cela m’attriste, parce que je vois bien qu’il est frustré dans ses mouvements… Sur proposition du pédiatre, Lucas a maintenant des séances de psychomotricité : là, il fait des petits jeux pour avoir du plaisir à être sur le ventre au sol. Il est en train de développer les compétences qu’il n’a pas pu développer parce qu’il connaissait juste l’assis, nous explique-t-on. À la maison aussi, nous veillons désormais à ce qu’il soit mis davantage sur le sol… et nous avec lui ! »
Camille, maman de Lucas

La même main prend toujours le dessus
« Chaque fois qu’on présente un objet à Alice, c’est toujours la main gauche qu’elle approche. Elle prend le dessus. La main droite est plus raide, plus fermée, plus lente, plus pataude. On se disait qu’Alice était peut-être gauchère comme son papa… Mais ce n’est pas normal et le pédiatre nous envoie chez un kiné, parce qu’à 8 mois, un bébé doit être compétent des deux côtés. »
Virginie, maman d’Alice

EN PRATIQUE

Si votre bébé est né trop tôt…

Si votre bébé est né prématurément, n’oubliez pas de corriger son âge. Ainsi, s’il a 8 mois et qu’il est né deux mois trop tôt, considérez qu’il a le développement d’un petit de 6 mois. Son histoire est particulière. N’hésitez pas à vous faire aider dans l’accompagnement de son développement. Des consultations et des suivis spécifiques existent.

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