Société
En Belgique, 1 jeune sur 5 souffre de dépression, 1 sur 6 a déjà eu des idées suicidaires a-t-on pu lire récemment dans le Soir. Éco-anxiété, projection dans un avenir sombre, santé mentale sur le fil sont autant de signaux d’alerte qu’il est urgent de considérer.
Notre jeunesse va mal. Et depuis longtemps. Comme le dit Salomé Saqué, auteure du livre Sois jeune et tais-toi ! (Payot), on leur a confisqué leurs rêves, ils n’arrivent plus à imaginer un monde désirable pour eux. Et on osera s’étonner qu’ils ne veuillent plus avoir d’enfants*.
En cause ? Un monde de plus en plus fluctuant où l’accès au marché du travail est de moins en moins conditionné par un diplôme, où ce sont davantage les IT skills qui sont recherchées dans les profils d’embauche. Aussi éphémères qu’une vidéo TikTok, elles font désormais partie des attendus en termes de compétences aux côtés des aptitudes linguistiques et professionnelles dans ce monde où le culte de la performance prédomine.
À cette fluctuation s’ajouterait la confiscation. Selon la journaliste française, toujours dans Sois jeune et tais-toi !, nous sommes face à la première génération de jeunes qui est davantage lésée en termes de patrimoine que les précédentes. Pire, « la génération au pouvoir ne prépare plus l’arrivée de la prochaine, elle confisque à son profit les différentes ressources ». L’épuisement de nos ressources naturelles, de notre planète n’est plus un secret pour personne.
Une place pour tout le monde
En outre, la courbe démographique nous indique qu’il y aura dans quelques années davantage de personnes âgées que de jeunes et d’enfants. L’ancienne génération risque donc de ne pas laisser de place à la suivante. Et ce, alors même que nos jeunes rencontreront des difficultés à s’émanciper de leur dépendance à leurs parents, notamment à cause d’un accès à la propriété et au logement de plus en plus difficile. Dans quelques années, on risque de se retrouver dans une situation absurde où de plus en plus de jeunes adultes seront dépendant·es de leurs parents qui, eux-mêmes, vivront de plus en plus longtemps. Jeunes et vieux deviendront éternellement interdépendants en quelque sorte.
Plus de 50% des parents témoignent du fait qu’ils pensent qu’ils ne pourront pas épargner suffisamment pour soutenir l’avenir de leurs enfants
Cette crainte dans l’avenir est aussi partagée par les parents. Rappelez-vous les chiffres de notre dernier Baromètre : plus de 50% des parents témoignent du fait qu’ils pensent qu’ils ne pourront pas épargner suffisamment pour soutenir l’avenir de leurs enfants ou leur payer des études supérieures s’ils et elles souhaitent en faire. Pour une fois dans l’histoire, jeunes et vieux ont donc peur de la même manière face aux fluctuations de notre monde.
Alors que faire ? Se laisser inspirer par le biologiste Olivier Hamant et son Antidote au culte de la performance (Gallimard), qui nous indique la coopération comme voie à suivre pour faire émerger de la robustesse. La robustesse, c’est la capacité à maintenir un système stable malgré les fluctuations et, selon le biologiste, c’est la seule réponse face à cette performance autodestructrice.
Dans quatre mois, nous voterons à nouveau, cette fois dans le cadre des élections communales. Pas question de glisser ici quelques consignes de vote, bien sûr. Mais en tant que parents, il faudra d’une manière ou d’une autre, accompagner nos enfants dans leurs premiers pas vers cette expérience de démocratie formelle. Et en ces temps de polarisation des extrêmes, en ces temps d’incertitudes aigues, peut-être faudra-t-il oser aller un cran plus loin en ouvrant le dialogue de manière franche en famille et identifier ensemble ce qui pourra créer entre jeunes et vieux davantage de solidarité intergénérationnelle.
* Selon une étude récente de la VUB, de 2010 à 2019, notre pays enregistre une baisse de 11% de la fécondité. Dans cette même étude, on apprend que 16% des hommes belges entre 25 et 35 ans ne veulent plus avoir d’enfants, c’est plus du double de la moyenne européenne (7%). Idem pour les jeunes femmes du même âge qui sont 7% à ne pas vouloir d'enfants contre 3% en Europe.
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