Vie pratique

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« Merci Maman chérie d’avoir, comme chaque jour, pensé à nous. C’est tellement bon ! ». Sur le couvercle de la boite en carton qui protège les portions de fromage préemballées, une vache rouge hilare semble participer à la réjouissance familiale. Maman est au centre de la scène. À votre service. Tout le temps. Sur une pub pour de l’eau minérale, elle s’occupe du budget. Ailleurs, elle sert du cacao chaud, glisse des friandises dans la bouche de son mari ou vante les mérites de l’aspirine pour les mioches.
En novembre 1962, madame est sur tous les fronts au fil des publicités qui foisonnent dans le Ligueur. Il est question de « sa » machine à coudre, de « son » congélateur, de « ses » lainages. Tout ce qui touche aux travaux domestiques ramène à la figure féminine de la famille. Et croyez-vous qu’elle se plaint cette femme permanentée, juchée sur ses talons hauts, élégante dans sa jupe plissée et son sage chemisier ? Non. Elle est toujours joyeuse, pimpante et souriante. La technologie l’aide au quotidien avec une bienveillance toute mécanique.
Ainsi, ce fabricant de machines à laver développe un argumentaire qui résume en creux le portrait de la femme parfaite made in 62. « Pendant qu’elle tourne, je peux m’occuper moi-même de tous les travaux du ménage ; ma machine à laver se charge de la lessive, moi je soigne mes enfants et mon intérieur est toujours en ordre quand mon mari rentre. Il est tellement content qu’il n’y ait plus de jour de lessive ».
La joie du foyer éclabousse le lecteur avec un enthousiasme macho et genré à 100%. Bien sûr, aujourd’hui, ce genre de discours reste encore présent, parfois sournoisement, dans les codes publicitaires. Disons qu’à l’époque, il s’assume et s’expose sans chichi. L’image de la femme dans ces pubs est comme figée, unifiée, aseptisée.
Parfois, le récit publicitaire pousse le bouchon un peu loin et compose avec un charlatanisme culpabilisant. Comme celui-ci particulièrement croquignolet. « Votre mari n’aime pas que vous ayez des cheveux gris (et il déteste les teintures). Que devez-vous faire ? ». Sacré dilemme, non ? Eh bien, il suffit de « suivre simplement une cure de Paravitamine FB2. (…) Votre âge importe peu, vos cheveux ne pousseront plus gris ni blancs, mais dans la teinte de vos 20 ans. (…) Votre jeunesse ramènera des compliments affectueux ». Il en faut peu pour ramener la paix dans les familles en 1962.
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