Développement de l'enfant

Elles sont présentes dans beaucoup de contes de fées, ces horribles femmes qui ne supportent pas la fille de la première union de leur mari. Celle qui obligeait Cendrillon à faire toutes les corvées et l'empêchait d'aller au bal du Roi. Celle qui n'a pas supporté que Blanche-Neige en grandissant devienne plus belle qu'elle. Et tant d'autres !
Comme toujours, les contes de fées nous racontent des vérités... qu'il va falloir nuancer ! Toutes les nouvelles femmes des pères ne sont pas d'horribles sorcières, elles ne veulent pas toutes éliminer leur jeune rivale... Rivale, le mot est lâché ! Car bien souvent, il s'agit de cette terrible rivalité entre femmes surtout lorsqu'une génération les sépare.
Les petits garçons, entre 3 et 6-7 ans, ont envie de se marier avec maman et pour ce faire, ils imaginent qu'il suffit d'éliminer papa. Puis, ils comprennent que, tout compte fait, il vaut mieux grandir et devenir grand et fort au moins comme lui.
Pour les petites filles, c'est un peu plus compliqué. Éliminer maman, ce n'est pas possible : elle est leur premier objet d'amour, celle sans qui on ne peut pas vivre, ni même survivre. Il va falloir alors composer entre l’envie de se marier avec papa et la rivalité avec maman. Mais puisque papa aime maman, elles vont aussi prendre maman comme modèle… Bonjour l'ambivalence !
À l'adolescence, tout se rejoue. Les petites filles deviennent de jolies jeunes filles et les papas sont bien fiers de ces demoiselles qui les accompagnent pour faire une course ou qu'ils conduisent à l'entraînement de sport. Mais maman veille au grain et puis papa est amoureux de maman...
Et patatras, une nouvelle amoureuse…
Pour Élodie, ce n'est plus le cas. Ses parents sont séparés. Les enfants sont une semaine chez l'un, une semaine chez l'autre. Chez papa, pendant une semaine, notre demoiselle a le champ libre. En plus, elle est débrouillarde et réellement efficace au quotidien. C'est la grande fille, petite maîtresse de maison, avec laquelle papa discute beaucoup. Cela les arrange tous les deux.
Mais voilà que papa ramène une autre femme à la maison. Il est tout fou, parle d'elle tout le temps, la trouve magnifique... Il voudrait qu'elle soit comme une maman pour ses enfants. Et ça, c'est insupportable. Élodie n'a qu'une maman et le fait savoir haut et clair. Elle ne veut pas du terme belle-mère, elle parle de l'amie de son père, sa compagne, sa deuxième femme, mais « mère » ou pire, « maman », il n'en est pas question.
Et notre ado va mettre ce nouveau couple à l'épreuve. Elle ramène des photos de maman dont une qu'elle met en évidence sur sa table de nuit. Trouve les talents culinaires, les goûts vestimentaires de sa mère nettement supérieurs à ceux de l'intruse. Tout ce que sa mère fait retrouve un éclat qui s'était un peu terni.
En plus, cette marâtre est là à temps plein. Elle reprend la vie domestique en main, cuisine à sa manière, a des exigences d'ordre, de ponctualité, etc. Elle occupe le terrain.
Cette marâtre est devenue la rivale et comme elle n'est pas le premier objet d'amour de l'enfant, elle reçoit de plein fouet toute l'agressivité, compréhensible, d'Élodie.
Composer dans une famille recomposée
Ce n'est pas facile pour cette femme d'être en rivalité avec une jeunette, fraîche comme un bouton de rose, qui n'en fait qu'à sa tête, critique tout et qui est la prunelle des yeux de son papa.
Il va falloir du temps, de la diplomatie et de la patience. Les territoires de chacun, tant physiques qu'affectifs et de compétences, vont devoir se redéfinir. Le maître mot est la communication. Mais l'attitude de papa est fondamentale. Il va devoir renoncer à son idéal d'une nouvelle famille où tout sera bien et bon.
C’est ainsi que ce sera une famille recomposée… où il faudra composer ! C'est à lui de soutenir sa nouvelle compagne. Elle est la femme qu'il a choisie. Les enfants ne sont pas obligés de l'aimer, mais ils doivent la respecter. Ce nouveau couple est responsable ensemble du bien-être de la famille recomposée, c'est-à-dire du cadre de sécurité, avec ses limites et ses règles, qui permettra à chacun d'y être bien.
Mireille Pauluis et Y.-M. V.-L.
Des parents en parlent...
Je suis la marque du passé de mon père
« Mes parents se sont séparés quand j’avais 2 ans. Et j’ai été trimballée entre les histoires d’amour de ma mère et de mon père, qui s’est tout de suite recollé avec ma belle-mère. Je les ai toujours connus ensemble. Mes petits frères et sœurs sont arrivés très vite. Je suis comme une entrave au bonheur pour ma belle-mère. Je suis la charge du passé de mon père. D’ailleurs, dès qu’elle parle de ma mère, ça part en crise. On se déteste avec beaucoup de force. »
Julia, 19 ans
La belle-maman la plus cool du monde
« Mon job de belle-mère, je le fais bien. D’abord, pour mon homme, car il sort d’une relation pas facile. Ensuite, pour le consensus familial. Je résorbe les crises. J’écoute tout le monde, je tranche, j’apaise, je répare. Je suis très investie, quoi. La plus grande qualité, c’est de ne pas se heurter aux mots des ados qui dépassent souvent leur pensée. Et, bien sûr, de ne jamais se substituer au rôle de mère. Et si possible, éviter de prendre parti. Les combinaisons familiales sont complexes. Autant ne pas être un nœud de plus. Après tous ces efforts, j’espère bien avoir mon propre enfant ! »
Frédérique, 37 ans, belle-maman de deux ados de 16 et 18 ans
Elles se battent pour moi
« Un premier mariage, deux filles merveilleuses, un divorce et, des années plus tard, un coup de foudre. C’est à ce moment-là que mes deux filles décident de marquer leur territoire et de pourrir la vie de ma compagne qui le leur rend bien. L’aînée a quitté la maison, la cadette vient rarement. Mais si un dimanche on se retrouve autour de la table, on passe de l’état de tension au champ de bataille en quelques mots. Je suis certain qu’un jour elles s’entendront à merveille. Un psy m’a expliqué que j’étais l’objet de la bataille et m’a conseillé de trouver la bonne distance. C’est-à-dire à la fois distant et présent. »
Max, 43 ans, papa de deux jeunes filles de 16 et 22 ans